2.1.12

des anges passent

à JiBé

Quelques échos à mon billet L'ange de la médiathèque, initié par la lecture du roman L'effaceur, dont les personnages Cassiel et Claisse m'avaient aiguillé vers les anges des Ailes du désir de Wenders, et du remake très personnel de Brad Silberling, La cité des anges.
Dans le premier les deux anges étaient Cassiel et Damiel, ce dernier interprété par Bruno Ganz, parfois doublé par Georges Claisse, dans l'autre Cassiel et Seth, interprété par Nicolas Cage. Ma réflexion m'a mené à réaliser que dans la tradition juive Seth est le fils d'Adam, qui doit son nom à la couleur rouge, edom, du sang, dam, et de la terre, adama. C'est probablement le rouge du sang adamique qui a conduit Wenders à nommer son ange Damiel, et j'imagine que Silberling a pu avec le nom Seth signifier son changement dans la continuité...

Une recherche Google m'a appris qu'un Clais, forme de Nicolas, avait jadis trouvé la mort au mont Cassiel, devenu ensuite Cassel, lors d'une importante bataille en 1328 rapportée par les Chroniques de Froissart : L'ennemi du roi Philippe VI, qui a participé lui-même à la bataille où il a proféré le célèbre "Qui m'aime me suive !", était donc nommé ici Clais Dennequin, plus connu de l'Histoire en tant que Nicolaas Zannekin, qui bien sûr me fait penser à Nicolas Cage, .
Cassiel (aujourd'hui Cassel) vient du latin castellum, "forteresse", "hauteur habitée". Je rappelle que le nom de l'ange Cassiel est une déformation de Cafsiel, nom lui-même issu d'une déformation de l'hébreu Tsafqiel.

Par ailleurs Cassel est aujourd'hui dans le Nord (59), de même que la bourgade où l'auteur de L'effaceur a situé son intrigue. Tout ce qu'on en connaît est l'initiale C., grâce au feuilleton écrit par l'effaceur lui-même, L'étrange affaire de C.

L'actualité s'en mêle, et un Cassel apparaît dans A dangerous game, film de Cronenberg sorti le 23 novembre dernier en France, 45e anniversaire de Vincent Cassel qui y joue Otto Gross, l'enfant terrible de la psychanalyse, soigné par Carl Jung, joué par Michael Fassbender. Le film est inspiré de la pièce de Christopher Hampton mentionnée en juin 10, à propos du roman de Tobie Nathan Mon patient Sigmund Freud qui mettait en scène aussi Jung et Gross.
Vincent Cassel s'est déclaré passionné par l'oeuvre de Jung.
Le 23 novembre est encore la seule date mentionnée dans L'effaceur, probablement parce qu'il s'agit de l'anniversaire de l'auteur.

La recherche "L'effaceur" m'apprit qu'il existait une série BD de ce nom, signée Richez. Il y en avait quelques albums à la médiathèque, cote RIC, qui ne retinrent pas longtemps mon attention. En les rangeant, je découvris à la cote voisine ROD les 5 albums de La Maison Dieu, scénario Rodolphe, dessin Nathalie Berr.
C'est d'abord le titre qui m'interpella, car l'arcane la Maison-Dieu m'a aiguillé vers le tarot, dans le billet Triangles, avec de multiples résonances jungiennes.
Les couvertures des albums, nocturnes, montrant d'abord une colonne lumineuse descendant sur un bâtiment élevé, puis la foudre, pourraient suggérer une inspiration immédiate par l'arcane du tarot:En fait, bien que le titre ait peu de chance d'être un simple hasard, aucune référence explicite au tarot n'apparaît dans l'intrigue, selon laquelle la Maison Dieu est le nom d'une aire d'autoroute où 9 personnes ont fait une rencontre du 3e type, caractérisée par l'acquisition de dons divers.
Les services secrets du monde entier les traquent, soit pour exploiter leurs dons, soit pour les éliminer. Seuls Pier et Agathe survivront, et seront récupérés par les extraterrestres qui avaient procédé à une expérience jugée infructueuse.

Le scénario m'a paru faiblard, mais il demeure au moins cette quinqualogie La Maison Dieu, découverte par hasard peu après avoir imaginé un ensemble de 5 lames du Tarot lié à Jung, au nombre desquelles l'arcane 16, la Maison-Dieu.
Mon intuition fondamentale de septembre 2008 avait été suivie de peu par la découverte du 5e et dernier album de la série Quintett, de Giroud, qui avait la particularité, entre autres, d'être nettement plus long que les 4 premiers albums, et il se passe quelque chose de similaire, à un degré moindre, avec La Maison Dieu, dont les 4 premiers volets ont chacun 44 planches, et le dernier 46.

Parmi les BD signées Rodolphe de la médiathèque, j'ai remarqué la trilogie La Voix des Anges, et plus particulièrement au premier abord le titre du premier album, Castle Dew, parce que je venais d'apprendre que le nom du mont Cassiel venait du latin castellum.
Je remarque aussi le graphisme du titre en couverture, et la symétrisation du V et du A rappelant une autre quinqualogie BD, L'ordre impair, également construite sur un motif 4+1.
Le personnage central de L'ordre impair, Léonora, était surnaturel, mais plus diabolique qu'angélique. Dans La Voix des Anges, un savant a réussi à créer des anges, d'une part un ange incarné, Alinéa, qui lui tient compagnie et passe pour sa fille, d'autre part des anges gardiens individuels, qui contrôlent les consciences et pourraient promettre un avenir radieux, délivré du mal.
Mais il semble que ce tableau idyllique soit compromis, un groupe supranational contrôlant ces "anges" selon ses visées, peu claires, pas plus que ne le sont les buts d'un groupe adverse, Lénine-Dada, qui multiplie les attentats spectaculaires.
Le groupe doit son nom à l'essai de Dominique Noguez, qui a découvert qu'en 1916 Lénine habitait Zurich, dans la même rue que le cabaret Voltaire où naissait au même moment le mouvement Dada. De là à penser que Lénine aurait été dadaïste, sinon que son approbation (Da, da !) aurait baptisé le mouvement...
Parmi les autres coïncidences ayant réuni des personnalités opposées, Hitler a été en 1904 dans la même école que Wittgenstein, puis s'est promené en février 1913 à Vienne dans les allées de Schoenbrunn Park, affectionnées par Staline au même moment...

Ecrire Schoenbrunn Park me fait réaliser que les lettres BONHEUR forment dans le désordre le coeur de scHOENBRUnn, or le volet final de La Voix des Anges est Bonheur-Park, une île où les comploteurs semblent expérimenter leur projets pour l'humanité.
L'île est dominée par cette statue féminine qui ressemble fort à une "nana" de Niki de Saint-Phalle, mais dont la décoration rappelle aussi la gidouille d'Ubu.
Ce ne semble pas un hasard, car Ubu est explicitement cité dans le premier volet à propos de l'hypothèse Lénine-Dada, avec Lénine qui est mort fou en léguant au monde comme successeur le père Ubu, soit le "petit père des peuples" Staline, le promeneur de Schoenbrunn Park...

Il y a des gidouilles à Schoenbrunn Park, quel bonheur !

Au-delà de l'apparition de Jarry dans cette affaire d'anges, je suis émerveillé qu'elle se fasse par le biais de Niki de Saint-Phalle, dont l'étonnant nom de famille est tout à fait jarryen, puisque "phalle" est un mot rabelaisien que s'est réapproprié Jarry, devenu ensuite le nom du 13e et dernier mois du calendrier pataphysique. Le "saint Phalle" est même une désignation du phallus chez Théophile de Viau:
Mais sois juge du camp, ô généreux saint Phalle.
J'ai vérifié que Saint-Phalle était bien le réel nom de l'artiste, dont le père était le comte André-Marie Fal de Saint-Phalle.
Sa bio me rappelle qu'elle s'est enfuie à 18 ans avec son ami Harry Mathews, né comme elle en 1930, rencontré en 1944, qu'elle a épousé le 6 juin 1949. Etonnante relation, puisque j'imagine qu'à 14 ans Mathews n'était pas encore pataphysicien, ne connaissait pas le "phalle" jarryen, et certainement pas le mois de Phalle, le calendrier pataphysique ayant été créé en 1949.

Je m'émerveille de cette irruption de Mathews, dont le texte choisi en septembre dernier par Zazipo est le premier qui m'ait réellement inspiré depuis le début de l'entreprise. Il s'agit d'un alinéa du récit énigmatique Sainte Catherine, or Niki est le diminutif de Catherine, sainte par son nom de famille...
J'en ai proposé jusqu'ici 7 récritures, et la dernière, Face effacée, m'a permis de repérer une coïncidence de ma 4e récriture, Tétragramme, une anagramme des 120 mots du texte original en 120 mots de 4 lettres, les 11 lettres non utilisées donnant le titre. L'abondance des E et N m'a conduit à nommer le personnage "Nêne", titre du Goncourt 1920, roman d'Ernest Pérochon, ce qui m'a amusé car le texte de Mathews est paru en 2000, or j'ai parlé dans 20 ans après de coïncidences entre des textes parus tous les 20 ans, de 1920 à 2000, dont mon Sous les Pans du bizarre, paru en novembre 2000. La proximité de mon nom avec celui du Prix Goncourt 2000 récemment proclamé, Schuhl, m'avait inspiré un petit gag, et la réalisation de quelques bandeaux "Prix Concourt" pour la première signature à la librairie Epigramme, le 23 novembre (tiens, encore un 23 novembre, anniversaire de Vincent Cassel), ce qui a encore eu un écho avec la médiathèque de Digne.
En bref, mon obsession pour la quaternité m'avait fait envisager une récriture avec les 4 notes F-A-C-E, et leurs correspondances dans l'alphabet musical étendu, peu avant la découverte de L'Effaceur, dont la lecture m'a fait concrétiser le projet. Face effacée a encore 120 mots, comme le texte original, 480 lettres, soit en moyenne 4 lettres par mot, et j'ai été jusqu'à donner pour valeur moyenne des lettres 4, une fois le texte transposé en F-A-C-E. Or 480 x 4 = 1920, nombre déjà associé à ma 4e récriture en 120 mots et 480 lettres.
J'ai vu il y a peu un de mes bandeaux "Prix Concourt", et je l'ai cherché pour le partager ici, sans succès, mais ceci m'a fait découvrir le premier roman de Mathews, Conversions (1960), que je voulais relire depuis que j'ai appris en écrivant ce billet qu'il s'inspirait en partie de La déesse blanche (1948), de Robert Graves. J'ai étudié ici la concomitance de son calendrier des arbres, en 13 mois de 28 jours, avec le calendrier pataphysique, pratiquement identique, créé en 1949.
Mon exemplaire de Conversions est une occasion, et j'ai été sidéré d'y trouver en dernière page deux calculs d'une main étrangère, la multiplication 26 x 15 = 390, et cette addition dont le résultat est 1920 !!!! 4 x 480, 4 x 4 x 120....
Un des premiers personnages mentionnés est Isidore Fod, et je m'intéresse aux Isidore dont la fête est le 4 avril. Le 4/4/1920 m'est particulièrement significatif, car c'était un dimanche de Pâques, qu'Eric Rohmer s'est attribué, faussement, pour jour de naissance.

Niki de Saint-Phalle a créé un Jardin des Tarots en Italie, où elle a conçu 22 immenses sculptures correspondant aux 22 arcanes.
Dans un livre associé, elle confie que la puissance des symboles du Tarot s'est manifestée à maintes reprises lors de l'entreprise, ainsi elle a conçu la sculpture associée à L'Empereur, lame 4, comme un palais dominé par une tour, mais lors de la construction la tour s'avéra mal conçue et instable, et Niki en fit la Tour de Babel, le nom qu'elle donne à l'arcane 16, la Maison-Dieu.
Dans le clip 3 des vidéos du site précité, elle imagine que l'arrêt de la construction d'une centrale nucléaire voisine, visible du Jardin, est en rapport avec son entreprise.
Le livre donne aussi un jeu de Tarots graphique, où je remarque qu'elle attribue aux lames leur correspondance "française" avec l'alphabet hébraïque, ainsi la Lune ci-contre correspond à la lettre Tsadé, attribuée à l'Etoile dans le Tarot Bota.
Incidemment, la porte du Jardin des Tarots est due à l'architecte suisse Mario Botta.

En googlant saint-phalle jarry j'ai découvert qu'un neveu de Niki était également artiste, Yom ou Guillaume de Saint-Phalle, et qu'il avait son atelier à La Jarry, un ancien garage de taxis à Vincennes.

J'ai quelques livres qui traînent à mon chevet, certains depuis pas mal de temps, et je me suis avisé il y a quelques jours que l'un d'entre eux était La révélation de l'ange, de Jacques Neirynck, en attente depuis décembre 2010. C'est le second volet de la trilogie Un pape suisse, dont j'avais lu le premier. C'est catho et verbeux, avec parfois des éléments intéressants, pas tant que ça faut-il croire puisque le premier opus ne m'avait guère motivé pour poursuivre.
La thématique angélique récente a suffi pour me faire lire le roman, d'abord paru en mars 1999 sous le titre L'ange dans le placard. C'est plutôt curieux car dans La cité des anges Seth, lorsque Maggie lui demande son nom complet, est pris au dépourvu et après un coup d'oeil alentour déclare se nommer Seth Placard (dans la version française).
Le film de Silberling est sorti en avril 1998 aux USA, et plus tard en Europe, trop tard me semble-t-il pour avoir pu influencer Neirynck dont la trilogie est parue à un rythme assez lent, de 1994 à 2003. Ce serait alors plutôt fabuleux, car son intrigue est centrée sur le scientifique rationaliste Michel Martin, mis en demeure de trouver des preuves scientifiques de l'existence de l'âme. Il ignore que sa femme Irina converse depuis peu avec un ange résidant dans son placard, Daniel...
Je rappelle que Seth correspond à Damiel dans le film de Wenders, que Neirynck a bien plus certainement vu en temps utile, Damiel étant vraisemblablement inspiré par Daniel (en hébreu dam signifie "sang", et la première manifestation de l'incarnation de Damiel comme de Seth sera la possibilité de saigner).
Irina cache donc un ange dans son placard comme d'autres cachent des cadavres ou squelettes. Je me suis demandé si l'expression "ange dans le placard" n'était pas typiquement helvétique, et une requête Google m'a mené à cette pièce d'un autre auteur suisse, dont le sous-titre est Un ange dans le placard.

Quoi qu'il en soit de la réalité de cette coïncidence avec le film de Silberling, je m'émerveille du cas d'Irina partagée entre son époux Michel et son ange Daniel, ces noms à première vue banals ne l'étant plus du tout dans un contexte angélique.
Ceci est lié aux trois versets successifs de 72 lettres d'Ex 14,19-21, parlant de "l'ange de Dieu" aidant les Hébreux à traverser la mer Rouge. Je n'ai pas trouvé d'étude "sérieuse" de cette affaire, le plus grand mystère de la Tora selon le Zohar, et ne peux donc livrer que les éléments de moi connus, détaillés ici et .
La tradition juive a formé 72 groupes trilittères à partir de ces 3 versets, selon un procédé d'une absolue logique, détaillés pour la première fois dans le Zohar au 13e siècle. A chaque groupe a été ajoutée une désinence en el ou iah pour former 72 noms d'anges.
La plupart des noms ne ressemblent à rien, sauf le 42e qui est Michel (ou Mikael plus conforme à l'hébreu), nom d'un des 4 archanges, mentionné dans la Bible, identifié ultérieurement à l'ange de Dieu de l'Exode.
Et le 50e Daniel, nom d'un prophète, précisément celui qui donne le nom du prince Michel (Da 10,13-21), seul ange nommé dans la Bible hébraïque. J'ignore si Daniel a pu être considéré comme ange antérieurement au jeu sur les versets de 72 lettres.

Mes pages précitées font déjà état de plusieurs coïncidences sur les nombres 72 et 216 et les noms Michel et Daniel.
Le héros de la quinqualogie des Anges et Dieux de Werber se prénomme Michael, et 26 des 72 anges (dont Michel et Daniel) se trouvent énumérés dans la section 216 des Thanatonautes, bien que Werber m'ait déclaré tout ignorer de l'origine de ces noms à partir des 216 lettres.
Le principal interlocuteur angélique des protagonistes des Silences de Dieu, de Sinoué, est Daniel.
Je remarque que Alinéa est, comme Damiel, à une lettre près l'anagramme de Daniel, et qu'on retrouve toutes ses lettres dans Lénine-Dada.

Bref c'est une affaire extrêmement complexe et, s'il est évident que Neirynck n'a pas donné par hasard au mari athée d'Irina le nom de l'ange le plus célèbre, je ne crois pas qu'il ait connu la présence simultanée de Michel et Daniel parmi la liste des 72 anges, d'origine quelque peu magique.

Neirynck fait évidemment penser à Meyrink, ce qui procèderait du plagiat par anticipation car Meyrink est le pseudo de l'autrichien Gustav Meier (1868-1932), alors que Neirynck utilise son véritable patronyme.
J'ai 4 des 5 romans de Meyrink, mais je n'ai jamais pu en achever un seul, malgré plusieurs tentatives. Le 5e et dernier étant L'ange à la fenêtre d'Occident, il m'a semblé devoir faire l'effort de le lire, effort méritoire car je n'ai pas réussi à entrer dans le roman, et il m'a semblé que le traducteur (non nommé dans l'édition du Rocher) n'y avait pas vu très clair non plus...
Enfin pour ce que je comprends, il s'agit d'une quête humaine vers l'état angélique, avec l'aide de cet "ange d'Occident" qui s'avèrera n'avoir de réalité que dans l'âme même du questeur, John Dee au 16e siècle, son continuateur John Roger (Müller) au 20e...
Ce ne me semble pas un hasard si la poursuite de la quête par John Roger ait été initiée par le legs d'un baron mourant, Michael Arangelowitsch Stroganoff (selon l'orthographe de l'édition originale allemande). Le nom Arangelowitsch semble signifier une origine "archangélique".
Je rappelle que la ville d'Arkhangelsk doit son nom à un monastère dédié à l'archange Michel, ce dont témoignent les armoiries de la ville.

Ainsi Meyrink comme Neirynck ont joué avec le nom Michel, mais il y a plus frappant encore, pourvu toujours de recourir à l'original allemand, où la principale aide à la quête angélique est apportée par un certain Theodor Gärtner, souvent appelé Theo (ce qui est apparu négligeable au traducteur).
Les personnages récurrents dans la trilogie de Neirynck sont la "sainte famille" de Fully, nom d'une réelle commune suisse, mais évoquant par l'anglais la complétude (full, fully, de même étymologie que le latin plenus). Ces de Fully sont les deux frères Théophile, souvent raccourci en Théo, et Emmanuel (nom du Messie selon Isaïe) qui est donc le "pape suisse" Jean XXIV, leur plus jeune soeur se nommant Colombe.
On y reconnaît aisément Dieu, le Fils et le Saint-Esprit.
S'il est assez banal de trouver des Théo dans des fictions spiritualistes, il l'est moins de trouver un Christophe Colombier, Christopher Taubenschlag dans l'original allemand, héros du Dominicain blanc de Meyrink, qui y déclare que ce nom s'est imposé à lui. Le nom le plus théophore évoquant Jésus est au premier chef Christophore, nom du géant qui aurait porté Jésus, ou ses diverses formes vernaculaires.

Au passage, ceci m'a fait découvrir l'origine commune du sanscrit purna, du latin plenus, de l'anglais full, de l'allemand voll. Je n'avais pas soupçonné cette parenté lorsque, dans un récent billet, j'avais comparé l'erreur de Jung sur le mot plenum au début du Livre Rouge à son inachèvement volontaire par l'omission de la lettrine de (A)ls alles in mir vollendet war (...)

Il faudrait sans doute parler des Dialogues avec l'ange, étonnant document qui, quoi qu'on en pense, existe en tant que livre, et relate 88 entretiens de cet "ange" avec 4 personnes, entre le 25 juin 43 et le 24 novembre 44, avec pour centre le 10 mars 44, au moment où Jung était entre la vie et la mort.
Sans entrer dans le contenu des Dialogues, je remarque qu'ils se déroulaient en principe tous les vendredis, avec quelques exceptions notables :
- le premier dialogue hors vendredi a eu lieu le 9 avril 44, le dimanche de Pâques clôturant la semaine du 4/4/44.
- le premier vendredi où l'ange ne s'est pas manifesté est le 30 juin 44, le jour de la mort de Haemmerli.

Et voici donc que c'est un Michel, Michael Fassbender (cercleur de tonneaux), qui incarne Jung à l'écran. Je remarque, en écho au couple Michel-Irina de Neirynck, que Tobie Nathan avait étrangement rebaptisé la femme de Jung Irena (au lieu d'Emma), alors que la plupart des autres protagonistes apparaissent dans Mon patient Sigmund Freud sous leurs noms réels.

J'ai décidé de remettre au prochain billet la plupart des multiples coïncidences numériques associées aux divers thèmes de ce billet, mais il y en a une que je ne peux omettre, car concernant son dédicataire JiBé, qui en comprendra la raison.
Si c'est bien Michel l'ange de Dieu qui a conduit les 600 000 Hébreux hors d'Egypte, Michel dont le nom apparaît fort bizarrement parmi les 216 lettres des "versets longs" Ex 14,19-21, il est curieux qu'il y ait eu un "Michel" parmi ces Hébreux, le premier Michel nommé par les Ecritures (Nb 13,13). Il s'agit de Mikael père de Setur, qu'une source traditionnelle juive (dont j'ai oublié la référence) donne comme exemple de personne mauvaise dont le nom est mauvais (parmi les 4 catégories déterminées par ces 2 critères).
Je ne pense pas que cet abaissement ait été motivé par la gématrie de Setur, 666, nombre qui n'est diabolique que dans la tradition chrétienne, où ce triple 6 est volontiers assimilé au cube de 6, 216, aussi je m'émerveille de la possibilité d'associer un Michel au satanique 666 alors que la récente affaire des lettres-notes diaboliques C-A-D-E m'avait fait évoquer Michel Cade, pataphysicien fondateur de l'association 813 (dont un membre actuel est Sébastien RUTES, renversement de SETUR).
J'ai ensuite découvert que j'avais un polar de Michel Cade-Lebrun, Attention au barracuda, qui se trouvait être le n° 666 de la collection Un Mystère. La relecture de cet honnête roman, de construction ingénieuse, ne m'a d'abord pas paru justifier de commentaire.
Mais voici ce Setur 666 fils de Mikael, et le Mystère 666 dû à un autre Michel est fabuleux car Setur vient de la racine satar, "cacher", souvent citée dans l'étymologie de "mystère", notamment ici par Malherbe.
D'autres vont beaucoup plus loin, comme René Guénon qui associait le Seth biblique au Seth égyptien, ainsi qu'au substantif setur, "chose cachée", et au démon Sorath (formé des mêmes lettres), vu comme l'opposé idéal de l'archange Mikael...
Il semble que Guénon n'ait pas pris garde au verset donnant Setur fils de Mikael. Quant à Sorath, c'est un nom forgé par Agrippa pour correspondre à la numérologie 666 du carré du Soleil, de même que Zazel = 45 pour le carré de Saturne, rencontré à propos de L'effaceur. Tous ces noms forgés par Agrippa relèvent bien entendu de la fumisterie, mais ce n'est pas parce que la Bible est plus ancienne que son authenticité en est plus sûre, et à mon humble avis il suffit d'examiner (par exemple) la liste des noms donnés en Nb 13 pour en déduire que le scribe responsable manquait quelque peu d'imagination.

Pour revenir à Michel Lebrun, le "pape du polar" s'est donné un nom en 6-6 lettres. Il est né en 1930 (le 2 avril), comme Harry Mathews et Niki de Saint-Phalle, et est mort le 20 juin 1996, à 66 ans...

3 janvier : Le billet achevé, je me suis couché hier avec Conversions, dont j'ai lu quelques chapitres. En tentant ensuite de m'endormir, l'affaire des noms Michel et Daniel continuait d'accaparer mon esprit, et il me vint ensuite une illumination dont je ne suis pas fier, puisqu'elle aurait pu me venir il y a maintes années, si je n'étais aussi obtus.
Ce "mystère des mystères", sitra disitrin dans la langue du Zohar, touche donc les 42es et 50es lettres des versets Ex 14,19-21, or la "plus grande énigme du Coran", à mon avis, touche les Sourates 42 et 50, les seules préfixées par la lettre Qaf, 19e lettre de l'alphabet abjad, initiale de Quran, et qui comportent chacune 57 lettres Qaf, bien que la seconde soit deux fois plus courte que la première. Ceci fait partie de tout un ensemble de spéculations autour des multiples de 19 dans le Coran et des Sourates préfixées, mais après vérifications diverses seul le cas Qaf s'avère totalement fiable.
Je connais ces deux énigmes depuis plus de dix ans, mais un fond rationaliste compartimentant mon esprit m'avait empêché jusqu'ici de les rapprocher. Que Mathews intervienne ici est encore ahurissant, car ma 3e récriture de Sainte Catherine était inspirée par la gématrie 5757 des 491 lettres de l'alinéa de Mathews, qui m'avait rappelé les 57+57 lettres Q des Sourates 42-50. Comme l'alinéa contenait 8 lettres Q, j'en avais isolé un pour faire le titre, calquant la Sourate 50 titrée Qaf, et réparti les 490 lettres en 14 vers de 35 lettres et 44 espaces typographiques formant 7 couples Question/Réponse débutant chacun par Q.
A propos de Question/Réponse, il est curieux de constater à quel point ce verset calligraphié en écriture coufique dans un carré de 19 x 19 ressemble à un actuel code QR (Quick Response).
Il est hors de question d'examiner ici tous les tenants et aboutissants des Sourates préfixées, mais voici un détail inouï : la Sourate 42 fait aussi partie d'un ensemble préfixé Ha-Mim, lettres 8-13 de l'alphabet abjad correspondant à nos H-M, initiales de Harry Mathews.
Par ailleurs mon "Prix Concourt" avait une réalité dans mon roman, c'était un ensemble de 60 questions sous forme de poème préfixé inspiré par le Coran. Le comptage des lettres préfixées A.L.N. menait à 666 pour l'ensemble du poème, titre compris.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous pourrez voir si vous le désirez, Jarry en grosse tête de carton dans un défilé de carnaval en compagnie de Rabelais et de Roussel dans un tableau peint par Débarras(artiste dont Roussel nous parle à plusieurs reprises) en allant sur
http://hommage-a-rabelais.over-blog.com/
Bien cordialement.
R

blogruz a dit…

Merci R. Je me souviens de votre autre blog de la St-Blaise 2009
http://in-memoriam-raymond-roussel.over-blog.com/

Ariaga a dit…

Je déteste les débuts d'année avec les salamalecs de voeux, et je viens tardivement te dire bonjour après avoir eu le temps de me poser sur ton passionnant article. Amitiés.