6.6.20

novelliseriez-vous Jung ?


   Le billet précédent était en partie consacré au mot hébreu tserouf, présent sans sa signification, "anagramme", dans une nouvelle de 1964 de Ricardou, lequel avait pour signature ses initiales JR schématisées en une patte d'oiseau, de "porte-plume", d'écrivain, alors que צרופ , "anagramme", tserouf,  est en hébreu l'anagramme de צפור , "oiseau", sephor, et que cette prononciation  est l'anagramme du mot sopher, "écrivain".   Lors de la publication suivante de cette nouvelle, Gravitation, dans Révolutions minuscules, la dernière nouvelle du recueil, Autobiographie, s'achève sur cette phrase:
Ce sera au prix, sur le sable, d'insignifiantes courbes que viendront compliquer peu à peu, en tous sens, infiniment, DES EMPREINTES D'OISEAUX. 
  C'est Ricardou qui souligne ultérieurement ces derniers mots, dont la portée était insaisissable à un lecteur ignorant de cette signature, dans la préface à la réédition de 1988 de Révolutions minuscules. Si cette préface fait maintes fois allusion à la "triple fourche" de la signature de l'écrivain, la graphisme lui-même n'est pas donné, et le jeu risque d'échapper à un lecteur n'ayant pas décidé de consacrer ses semaines de confinement à l'élucider.

  La nouvelle Gravitation a été récrite pour cette réédition de 1988, au point de changer de titre, puisqu'il s'agit maintenant de L'enlèvement, voire de L'élève ment, titre qui apparaît une fois en en-tête, page 184. Il y a une construction en abyme, avec un personnage qui lit la nouvelle, Page 185 du recueil il apparaît ceci:
De plus, en remontant les yeux sur le feuillet au plus haut de l'histoire, il constate que le titre courant n'est plus, comme il le fut de page en page, jusqu'ici, L'ELEVE MENT, mais bien, tout simplement, L'ENLEVEMENT.
  Or, le lecteur du recueil constate que, si le titre au haut de cette page 185 est bien L'enlèvement, et celui de la page précédente, en vis-à-vis, L'élève ment, ce n'est qu'à la page 184 que cette forme du titre apparaît, tandis que toutes les autres pages affichent L'enlèvement.
  L'enlèvement occupe les pages 171 à 188, soit 18 pages, et la page 184 où le titre devient L'élève ment est la 14e page parmi ces 18.

  Cet enlèvement d'un N,  14e lettre, à la 14e page parmi 18, m'est monumentalement significatif, la disparition de la 14e lettre d'amour parmi 18, dans une nouvelle de Leblanc, m'ayant en 1996 conduit au jeu N-AMOR, N-LOVE, ROMAN, NOVEL.
  J'ai suivi cette piste dans les limites du raisonnable dans le précédent billet, et je franchis maintenant ces limites, allègrement.

  En 2002 ou 2003, j'ai été fasciné par le catalogue des titres parus dans la collection Folio Policier, à la fin du n° 218, Meurtres à l'antique, d'Yvonne Besson, paru en juin 2001. 171 titres y apparaissaient sur 5 pages, du n° 37 au n° 207, avec de multiples curiosités.
  Wikipédia donne le catalogue complet de la collection, laquelle compte aujourd'hui plus de 900 titres, mais diverses erreurs sur les titres et auteurs sont corrigées. Y figurent néanmoins, avec des notes explicatives, des numéros qui n'ont pas été publiés, 7 en tout parmi ces 171. Le premier cas qui a attiré mon attention est celui de La Marie du Port, de Simenon, qui figurait deux fois dans le catalogue:


   Le numéro 134 serait La Marie du port, et le 167 La Marie du Port, ce qui m'a fait un temps croire qu'il s'agissait de deux romans différents, d'autant qu'un pataquès semblable apparaît dans le tome 15 des Œuvres Complètes de Simenon aux éditions Rencontre,

mais cette erreur a été corrigée dès le tome 16,

la bonne Marie étant donc celle du tome 11, tandis que la seule parue dans la collection Folio Policier était son n° 167.

  J'ai détaillé l'affaire ici, parmi d'autres cas, et j'ai conté comment le n° 134 fantôme m'avait conduit, le 13/4 2005, à une découverte qui vaut d'être résumée, mais je m'ébaubis d'abord de ceci:
Lors de sa première publication en 1938, Simenon a jugé bon de publier une présentation dans laquelle il annonçait que ce roman représentait un tournant pour lui, qu’il était le premier à contenir une étincelle de ce qu’il cherchait à exprimer, « un tout petit frémissement de vraie vie », une « luciole »…. 
  Depuis, "luciole" est devenu pour moi synonyme de "coïncidence", grâce à Patrick Bléron, mais il s'agirait plutôt pour le n° 134 d'une constellation.
  134 était d'abord pour moi la valeur d'ARSENE LUPIN, et la redondance de ce nombre dans la geste lupinienne m'avait conduit à soupçonner une intentionnalité de Leblanc.
  Le découpage 13-4 me semblait aussi significatif, et c'est d'abord ce qui m'est apparu dans la disparition de la lettre 14 parmi 18.
  Le titre de Simenon a 13 lettres en 4 mots.
  Les lettres différentes dans ce titre sont
LAMRIEDUPOT = 134, en 11 lettres comme ARSENELUPIN, et le découpage voyelles/consonnes livre
AEIOU / DLMPRT = 51/83, soit le partage d'or de 134. Précisément, un roman de Simenon écrit quelques mois plus tard, Les soeurs Lacroix (n° 181), évoque le nombre d'or.
  J'ai été fort préoccupé par ce n° 134 en mars-avril 2005. Le 13/4, juste après la découverte de cette dernière relation, je me suis réveillé avec le souvenir que 134 était la valeur des 10 lettres ESARTULINO "choisies" par Perec comme base de ses hétérogrammes, "choisies" entre guillemets  car ce sont aussi les 10 lettres les plus fréquentes en français.
  Puisque les 5 voyelles canoniques y figurent, on a donc encore
AEIOU / LNRST = 51/83, partage d'or de 134, mais 134/217 est aussi le partage d'or de 351, valeur des 26 lettres de l'alphabet. Ceci m'a conduit à envisager une architecture d'or du recueil Alphabets, basé sur cette répartition de l'alphabet en ces deux groupes, avec de multiples arguments parfois sensés (le plus anecdotique étant peut-être le format doré des 176 matrices hétérogrammes). Ceci aurait pu ne jamais voir le jour sans le fantomatique numéro 134 Folio Policier.
  Sérendipité, vous avez dit sérendipité...

  Les 171 titres de ce catalogue m'ont encore fait envisager des correspondances avec la valeur 171 de ELISABETH LOVENDALE ou des 18 premières lettres de l'alphabet, avec une attention particulière pour les 14 titres correspondant à N dans ces deux configurations.
  Pour l'ordre alphabétique, N débuterait au n° 142, Nice 42e rue, de Patrick Raynal, débutant par un N. Pour l'ordre LOVENDALE, N débuterait au n° 172, Nevermore de William Hjortsberg, débutant aussi par un N. Il n'y a que 6 titres débutant par N parmi les 171.
  Ce second cas semblait plus intéressant, car Nevermore était le premier titre de la 5e et dernière page du catalogue, où le titre était orthographié Nevermire.
  A l'époque je voyais une anagramme de mon prénom dans ce "mire", aujourd'hui je note que le saut de O à I est éminemment ricardolien.
  La série s'achevait sur deux titres qui m'étaient fortement significatifs, Les Monte-en-l'air sont là !, de Siniac, où j'avais précisément vu l'acrostiche ROAMAN dans les initiales des chiffres des coffiots convoités par d'audacieux voleurs, avec de multiples développements détaillés ici.
  Le titre précédent n'avait pas pour moi de rapport immédiat avec le jeu NOVEL ROMAN, mais il entrait dans un autre jeu que j'avais exploité dans Sous les pans du bizarre (dont la certitude que ce roman serait publié m'avait fait abandonner le hasardeux projet Novel Roman).  Il y a des points communs entre Suzanne et les ringards et RN 86, de JB Pouy, et ces romans étaient précédemment parus en Série Noire sous les numéros 2013 et 2377, à 363 numéros d'intervalle, 365 numéros en comptant les bornes. Mon personnage un brin dérangé, Tom Lapnus, y voyait une ténébreuse machination, et je n'étais pas loin de partager ses vues.
  Aujourd'hui, je constate que ces textes significatifs ont aussi des numéros significatifs, 184 et 185, la page où le titre L'enlèvement devient L'élève ment, et celle où le texte de la nouvelle y fait allusion.

  Suzanne et les ringards est construit à partir d'un poème de Maryline Desbiolles, donné intégralement à la fin du roman, et décortiqué compulsivement par Lapnus. Il y dénombrait 366 mots rythmés par les trois occurrences de "Suzanne", deux y tenant "une identique respective place en regard des extrémité", comme dit Ricardou, à la position 169, l'autre faisant partie des 28 mots intermédiaires.
  Lapnus reliait ceci aux nombres fondamentaux qu'il avait décodés dans les Bucoliques de Virgile, 365 somme des carrés 169 et 196, 366 doublant 183, valeur latine de CAIVS IVLIVS CAESAR, instigateur du calendrier julien, 28 ou 29 jours de février, de la dernière "Suzanne" à la première, en omettant ou non l'intermédiaire, à la position 24 parmi les 28 mots centraux, l'original jour bissexte ayant été fixé au 24 février, 6e jour à compter des Calendes. Lapnus en trouvait des confirmations dans la valeur actuelle de
JEAN-BERNARD POUY = 169,
et dans le numéro du roman en Série Noire,
2013 = 11 x 183.

  J'avais déjà remarqué plusieurs parallèles entre l'écriture de Ricardou et mon roman paru en 2000:
- le codage d'un sonnet de Perec dans ses 14 chapitres (par des caractères en corps plus gros, alors que Ricardou avait dissimulé une récriture d'un sonnet de Mallarmé en majuscules dans ses Improbables strip-teases);
- le détournement du démembrement d'Osiris en utilisant le nombre gouvernant le texte (8 chez Ricardou dans La prise de Constantinople, 365 ou 366 chez moi);
- l'inadvertance de remplacer "suivant" par "selon".
  Voici donc qu'à ces parallèles s'ajoute la symétricologie.

  J'avais aussi étudié une symétrie autour du numéro fantôme 134 dans le catalogue Folio Policier:
- 33 numéros plus loin vient la vraie Marie du Port, n° 167;
- 33 numéros avant, n° 101, c'est Le Coup-de-Vague, précisément remplacé par La Marie du Port dans un catalogue des éditions Rencontre;
- 51 numéros plus loin vient  Les Monte-en-l'air sont là !, n° 185, en 38 chapitres;
- 51 numéros avant, n° 83, c'est Quand la ville dort, en 38 chapitres également.

  51 et 83, c'est comme vu plus haut le partage d'or de 134 (OR=33). Il y a des possibilités dorées dans Les Monte-en-l'air sont là ! comme dans Quand la ville dort, ce qui m'avait fait intituler la page consacrée à cette étude Quand la ville d'or.
  J'y constatais que, les 3 Simenon ayant 8 chapitres, 3x8 = 24, ce qui menait pour les 5 numéros à
38-24-38 chapitres, double partage d'or de 100 (BURNETT=100, et SIMENON/SINIAC=89/55, rapport fibonaccien idéal).
  Je rappelle que Simenon est l'un des premiers auteurs ayant mentionné le nombre d'or dans une fiction, Les soeurs Lacroix, précisément en 38 (1938). Ce roman fait aussi partie des Quatorze, sous le n° 181, nombre qui est devenu pour moi la valeur essentielle de
MARK Z DANIELEWSKI = 181, illustrant la "quine" 26-43-69-112-181, avec
MARK Z / DANIELEWSKI = 69/112, et
MARK / Z = 43/26.
  Danielewski a imaginé le titre Concatenating Le Corbusier, où Aristides Quine étudierait la maison Navidson dont le secret semble lié au nombre d'or et à la "quine des bâtisseurs".

  Je n'étais pas loin de partager les lubies de Lapnus, ce qui m'avait fait envisager de réunir les 365 titres de la Série Noire, du n° 2013 au n° 2377, de Suzanne et les ringards à RN 86. J'y avais renoncé en constatant que ceci aurait demandé près de 4 mètres de rayonnage, mais j'avais repris l'idée pour les 171, ou plutôt 170, titres Folio Policier, car j'avais un rayonnage s'y prêtant. J'imaginais bien autour du 134 manquant les 97 et 73 volumes réels, m'évoquant les
DIX MILLIARDS = 37+97 = 134
d'Arsène Lupin transportés par 18 camions dans Les milliards d'Arsène Lupin, sauf le n° 14 qui contient les biens de son voleur.
  Je n'ai pas été loin d'y réussir, mais l'entreprise m'a fait découvrir que le n° 134 n'était pas le seul manquant parmi ces 171 titres. Les numéros 97, 116, 118, 132, 141 et 204 ne sont de même jamais parus. La collection s'est assagie par la suite, avec deux seules anomalies constatées à ce jour, le numéro 319 manquant, et deux numéros 809.

  J'ai relu le n° 218 où figure le catalogue des 171 titres (le même catalogue apparaît au moins dans la première édition du n° 215, Cirque à Piccadilly de Don Winslow).
  Meurtres à l'antique, d'Yvonne Besson, est un roman très queenien, où peu à peu se révèle la réitération des drames de Sophocle. Olivier Marek, père de Anne, jeune femme peu équilibrée, s'installe à Marville, ville portuaire dominée par l'armateur Louis Malot, époux de Jeanne, père de Etienne et Pascal. Les morts se succèdent. Jeanne est trouvée pendue, Louis est assassiné à un carrefour, Etienne et Pascal se battent à mort...
  Tout semble accuser Olivier Marek lorsqu'il est découvert qu'il était le fils de Jeanne, et que celle-ci était la mère d'Anne, les protagonistes rejouant les rôles de Laïos et Jocaste, Oedipe et Antigone, Etéocle et Polynice, mais une tierce personne a exploité la situation pour une sombre machination.
  J'avais oublié cela lorsque j'ai commenté en janvier dernier un roman de Scott Turow basé sur le mythe des Dioscures, avec également des noms inspirés par le mythe (les jumeaux Cass et Paul issus d'un adultère entre Zeus et Lydia). Je n'y avais pas davantage pensé lorsque je me suis penché sur divers personnages nommés Marek.

  Dans mes abondantes notes sur les pages de garde, je vois
14 A+T = 4444 (Nevermire)
  Je n'ai pas tardé à comprendre de quoi il s'agissait. Les 14 numéros du 172 au 185 ont pour somme gématrique des noms des auteurs et des titres 4444, en prenant en compte l'erreur Nevermire du premier titre, soit :

Hjortsberg, William    Nevermire    
Delteil, Gérard           Riot Gun    
Holden, Craig             Route pour l'enfer         
Tosches, Nick             Trinités        
Fajardie, Frédéric H.  Clause de style    
Page, Alain                 Tchao Pantin    
Crews, Harry               La Foire aux serpents    
Benson, Stéphanie       Un singe sur le dos
Block, Lawrence          Une danse aux abattoirs    
Simenon, Georges        Les Sœurs Lacroix    
Simenon, Georges        Le Cheval-Blanc    
Simonin, Albert           Touchez pas au grisbi !    
Pouy, Jean-Bernard      Suzanne et les ringards
Siniac, Pierre               Les Monte-en-l'air sont là !

  Comme vu supra, il y a une autre erreur du catalogue, Tchaso Pantin au lieu de Tchao Pantin, n° 177, mais je l'avais écartée pour obtenir ce 4444 qui m'était déjà significatif avant d'avoir prêté attention au 4/4/44 jungien.
  Aujourd'hui, je constate que ce total se répartit en 1943 pour les 184 lettres des auteurs, et 2501 pour les 203 lettres des titres. Ce 2501 m'est récemment évocateur, en écho à la lecture de mon prénom dans neverMIRE, car, passant dans le village où l'annuaire me domiciliait par erreur, je suis tombé sur cette immatriculation RE MI 2501:
  Si Nevermire au lieu de Nevermore a aussi un aspect ricardolien, la première édition de Révolutions minuscules a été imprimée un 25/01, chez l'imprimeur Aubin au logo me rappelant les 9 d'Unica Zürn se fondant en un coeur..

  La fiche Wikipédia consacrée à Jean-Pierre Richard, visé par la préface comminatoire de la réédition de 1988, m'a appris que le dernier livre de l'éminent professeur était Les Jardins de la terre (2014), recueil de courts essais consacrés à divers auteurs, dont Maryline Desbiolles, ce qui m'a conduit à commander l'ouvrage illico.
  Ce n'est pas pour son poème Suzanne que Maryline est conviée, et j'ai survolé rapidement cette étude avant de passer à celle sur Fred Vargas, pour son roman L'armée furieuse (2011). Je n'ai pas encore trouvé l'occasion d'en parler, alors que j'avais consacré plusieurs billets à Fred, dont celui-ci en mars 2009, où je remarquais que, dans ses six derniers romans, le coupable principal (ou secondaire dans un cas) se prénommait Roland (où Arnold, anagramme littérale, ou Laurent, anagramme phonétique).
  J'avais rencontré Fred en 2001 lors d'une manifestation 813, et avais discuté avec elle d'une autre coïncidence onomastique. Je lui ai donc envoyé le lien vers ce billet, qu'elle m'a confirmé avoir lu, tout en m'informant qu'elle ne commentait jamais les articles sur elle.
  Ma prose n'a peut-être pas été prise à la légère, car dans le roman suivant, L'armée furieuse précisément, le coupable était le gendarme Emeri, si insoupçonnable que je l'avais démasqué d'emblée, tandis qu'un suspect est le comte Rémy d'Ordebec.
  Un autre suspect, celui qu'Emeri a choisi de faire accuser de ses crimes, est l'étrange Hippolyte Vendermot, né avec 6 doigts à chaque main, et qui parle couramment à l'envers, ainsi un "petit connard" est pour lui un "titep drannoc", et Adamsberg reprend à son compte ce "mot d'enver(s)" (remarqué par JP Richard).
  Je suis né avec un pouce bifide à la main droite, ce que j'ai signalé dans un billet de 2009. Mon pseudo de blogueur BLOGRUZ est évidemment inspiré par Zorglub, inoubliable inventeur de la zorglangue, strict équivalent de l'hippolangue.
  Il y a eu deux romans de Fred depuis L'armée furieuse. Le nom du coupable est accessoire dans Temps glaciaires, et dans Quand sort la recluse, un coupable secondaire se nomme Rémi Marllot, avec deux "l" (celui qui harcèle Froissy). Un suspect de l'affaire principale est Roland Cauvert, mais la coupable est une Irène (IRENE-EMERI, c'est presque de la zorglangue).

  Tiens, je pense aujourd'hui que Emeri peut évoquer le réalisateur Emmerich, prénommé Roland.

  J'en reviens au sorbonnard Richard, lequel trouve lui aussi que
dire d'un personnage que c'est un méchant petit drannoc, cela va beaucoup plus loin que de le nommer, comme nous tous, un connard.
  J'ignore s'il avait compris que la préface de Révolutions minuscules le traitait symétricologiquement de "con". J'imagine que Ricardou avait pris soin de lui en expédier gracieusement un exemplaire, mais il est très facile d'abandonner cette préface dès sa première phrase.

  L'écriture du précédent billet m'a conduit à examiner le parcours de la ligne 9 du métro parisien, empruntée par le voyageur/voyeur de L'enlèvement/L'élève ment. Ricardou étant adepte du tserouf, de l'anagramme, j'ai pensé à regarder ce qu'étaient devenues ces stations de la ligne 9 sur le plan anagrammatique du tromé conçu par Gef.
  J'ai été surpris d'y voir "Petit connard", et plus encore de constater qu'il s'agit de la gare de Pont-Cardinet, proche de l'appartement familial où j'ai vécu jusqu'à mes 20 ans. De fait, pendant 5 années scolaires; de 1955 à 1960, j'ai fait 4 fois par semaine l'aller-retour Pont-Cardinet - Argenteuil, où ma mère était institutrice (et où je suis né).
  Magie de l'anagramme, le petit connard qui partait de Pont-Cardinet devenait un ultra-génie grâce à l'enseignement prodigué à Argenteuil...
  Quant à la station  Cluny - La Sorbonne, pour laquelle Gef propose Brûlons-y le canon, pourquoi pas Brûlons-y le con, na! (je n'ose avancer On y branle son cul).

  Le chapitre 52 de La Vie mode d'emploi conte l'histoire de Grégoire Simpson, étudiant neurasthénique calqué sur l'unique personnage d'Un homme qui dort, au nom dérivé du Gregor Samsa de Franz Kafka. Il disparut un jour, et la rumeur courut qu'il s'était suicidé en se jetant sous un train du haut du pont Cardinet.
  Je m'en étais inspiré dans Sous les pans du bizarre pour le suicide de Françoys-Napoléon-Alexandre Cortier le 6/6/99, mais en choisissant un pont voisin, celui de la rue La Condamine, parce que ce nom contient les lettres ALCIMEDON, nom issu d'une églogue de Virgile, au centre de l'intrigue du roman, y donnant lieu à diverses anagrammes, dont LECONDAMI, à lire "leçon d'ami" ou "le con d'ami". Quand on est pont, on est pont... J'ignorais évidemment alors que Ricardou avait pu traiter cryptiquement de "con" un ancien ami.
  Le détail permettant d'identifier mon emprunt à Perec était "un tome de la monumentale Histoire de l'Eglise, de Flichte et Martin", trouvé sur le bureau de Cortier comme sur celui de Simpson. "Monumentalement" est le premier mot de Révélations minuscules, minutieusement choisi.
  J'avais exploré ici d'autres développements imprévus de "La Condamine".

  Nevermore est un roman intéressant, où Hjortsberg exploite l'amitié réelle entre Harry Houdini et Arthur Conan Doyle, un rationaliste qui entendait démasquer ceux qui exploitent la veine spiritualiste, et un fervent partisan du spiritisme. Cette amitié a inspiré d'autres créations, dont récemment une série TV.
  A ma relecture, j'ai vu quelques nouvelles choses. Un personnage important est l'étrange Opal Crosby Fletcher, qui a pris le nom d'Isis pour son activité spiritualiste, et qui a choisi de faire de Houdini son Osiris. Le criminel de l'histoire est le magicien Rammage haïssant Houdini, s'inspirant des contes de Poe pour mettre en scène les assassinats de proches de Houdini, lui-même destiné à être découpé par le pendule de Le puits et le pendule. Mais Houdini en réchappe et Rammage est tué, et démembré par Houdini. Osiris, démembrement, ceci évoque aisément le démembrement du dieu en 14 morceaux, significatif pour ce roman ouvrant la série des 14 titres Folio Policier.
  Deleuze a consacré un essai au "dispositif osiriaque", l'application littéraire de ce démembrement, commenté par Ricardou. Celui-ci a en outre souligné (dans Naissance d'une fiction) que, dans Genèse d'un poème, Poe ne signalait pas la relation sonore inverse rapprochant raven et never.

  Rammage a tué 5 personnes avant que son plan ne dérape. Ses premières victimes sont Hilda et Ingrid Esp, tuées dans la nuit du 2 avril 1923. Pâques tombait alors le 1er avril, mais ce n'est pas remarqué. Plusieurs pistes se rattachent au Lundi de Pâques, comme un Marek évoqué plus haut, greffant tous les morceaux d'un criminel guillotiné le Lundi de Pâques, ensuite reconstitué, ce qui rappelle le mythe d'Osiris.
  Le dernier crime réussi de Rammage a été d'enfermer un assistant de Houdini dans le cercueil utilisé pour un de ses tours. Houdini découvre son cadavre en état de putréfaction un jour qui n'est pas directement précisé, mais il est dit chapitre 23 que c'était près de 8 semaines avant le 7 août, soit donc vers le 10 juin, or le carnet où Rammage notait ses meurtres indique que c'est le 28 juin que Rammage a enfermé l'assistant dans le cercueil. Par ailleurs le meurtre des Esp aurait été commis le 12 mars, au lieu du 2 avril...
  Je n'imagine guère autre chose que des inadvertances de l'auteur, mais remarque que ces erreurs apparaissent dans un roman édité par une collection où abondent les erreurs diverses, notamment Nevermire.
  Tiens, alors qu'un des crimes de Rammage est inspiré par Le masque de la mort rouge, plusieurs articles récents de Patrick concernent cette nouvelle.

  J'ai eu la curiosité de chercher ce que signifie Hjortsberg, et c'est "montagne du cerf", ce qui m'évoque aussitôt zwi migdal, "tour du cerf", et mes recherches sur La mort et la boussole. Bien que ce n'ait pas été prémédité, la rue La Condamine de Sous les pans du bizarre est homologue de la propriété de Triste-le-Roy dans la nouvelle de Borges.

  Le 3e roman des "14" a joué un rôle important dans mes pérégrinations, d'abord par sa présence au sein des 14 car Route pour l'enfer de Craig Holden est intentionnellement construit en 3 parties de 14 chapitres chacune, allusion à la généalogie de Jésus en 3 séries de 14 dans l'Evangile de Matthieu, le personnage principal du roman, Joe Curtis, ayant une dimension christique évidente.
  J'avais parlé de ce roman ici, à propos justement de l'assassinat dans Sous les pans du bizarre de Jacques Courtas à la station Denfert(-Rochereau), un JC aux initiales christiques intentionnelles, comme Joe Curtis. Dans le rectangle formé par les lieux des morts des 4 latinistes, le sommet correspondant à la station Denfert était à l'opposé de celui de La Condamine.
  J'ai relu une nouvelle fois Route pour l'enfer, achevé le 6 avril. Le soir, les hasards du streaming nous ont conduits à visionner Ennemis rapprochés (The Devil's Own), de Pakula, essentiellement parce que Anne avait envie de voir Harrison Ford. Brad Pitt y joue le rôle de Frankie McGuire, militant de l'IRA venu à New York pour y acheter des missiles Stinger, afin de pouvoir affronter l'armée britannique en Ulster. Les missiles sont chargés sur un petit bateau, le Voyager, mais Frankie ne peut mener sa mission à bien.
  Une part importante de Route pour l'enfer touche précisément à des missiles Stinger, qu'a réussi à se procurer le gourou d'une secte, et qui sont acheminés vers leur destination finale par un chalutier, le Maribel S. Le bateau a été identifié par le FBI, aussi il est maquillé et reçoit un nouveau nom, le Voyageur.
  Le tournage de The Devil's Own, sorti en mars 1997, a débuté en février 1996, au moment même où paraissait la première édition de Route pour l'enfer (The Last Sanctuary), simultanéité interdisant idéalement toute influence entre les deux oeuvres.
  Si Voyager est un nom "bateau" pour un véhicule quelconque, il est bien plus rare de voir des intrigues mettre en jeu des missiles tombés entre des mains mal intentionnées, et j'en ai eu confirmation lorsque j'ai écrit à Craig Holden pour l'informer de cette découverte, ayant déjà échangé quelques mèls avec lui jadis.
  En avril 1995, Craig a soumis les premiers chapitres de son roman à son agente littéraire, laquelle s'est d'abord montrée fort réticente, jugeant cette histoire de missiles tombant aux mains d'une secte peu crédible, et puis quelques jours plus tard il y a eu l'attentat d'Oklahoma City, le 19 avril, et elle a encouragé Craig à poursuivre.
  Mieux, Tim McVeigh a utilisé pour son attentat un camion loué à l'entreprise Ryder, chargé de plus de deux tonnes d'explosifs, et dans son roman Craig faisait passer les missiles au Canada à bord d'un camion Ryder. Si cette célèbre entreprise doit son nom à son fondateur, James Ryder, le nom évoque un type de voyageur, rider, "cavalier", "motard".
  Il y a plus ahurissant, car Craig connaissait Pakula, lequel avait envisagé d'adapter son premier roman, La rivière du chagrin, et il lui a été proposé de faire la novellisation de Ennemis rapprochés. C'était tentant car immédiatement payant, mais Craig était alors en train d'écrire Les quatre coins de la nuit, et il a refusé cette novellisation qui l'aurait amené à faire à nouveau voyager des missiles Stinger dans un bateau Voyager...

  Heureusement que Craig n'a pas renoncé à ses Quatre coins, roman qui s'est trouvé être mon 4e texte couvrant une semaine pascale, découvert après plus de dix ans d'intérêt pour cette particularité. Mieux, les 38 chapitres du roman m'ont fait découvrir quelques jours plus tard un 5e texte analogue, et près de 10 ans ont passé avant le suivant. Je rappelle les deux romans de 38 chapitres, symétriques par rapport au fantomatique numéro 134 Folio Policier, surtout le n° 185, avec son acrostiche ROAMAN, alors que page 185 de L'enlèvement est remarqué l'absence du N à la page précédente.

  Incidemment, l'un des 16 films de Pakula est Présumé innocent, adaptation d'un roman de Scott Turow cité plus haut.

  Le retour des lettres ESARTULINO (de valeur 134) m'a fait les passer dans un logiciel d'anagrammes et découvrir le mot INSOLATEUR, ou redécouvrir peut-être, mais ceci m'a donné l'idée de tenter un carré SATOR hétérogramme à partir de ce mot.
  Voici ce à quoi je suis parvenu:

R U E T A L O S N I
U S L A T E R I O N
E L A N O R U T I S
T A N E S I L U R O
A T O S U N I R E L
L E R I N U S O T A
O R U L I S E N A T
S I T U R O N A L E
N O I R E T A L S U
I N S O L A T E U R

  Je n'en donnerai pas d'interprétation, possible en acceptant quelques mots étrangers. Perec lui-même indiquait que les lectures de ses matrices hétérogrammes n'étaient que des suggestions.
  Ma dernière évocation des Quatre coins de la nuit, le 10/10/10, avait un rapport diffus avec la création à l'occasion de ce jour de 10 hétérogrammes 10x10 basés sur ESARTULINO. 
  La contrainte de la pseudo-quenine unissant cette série avait trouvé un prodigieux écho avec mon SONÈ composé en 2004, SONÈ dans le grand carré duquel je pus découvrir en 2017 le nom LOVEN DALE, hors de toute intention originelle.
  Je rappelle que SONÈ signifiait notamment pout moi "quatre coins" (Sud-Ouest-Nord-Est).
  J'avais joué avec les jokers de mes 10 hétérogrammes afin d'obtenir pour les 1000 lettres la valeur 13332, soit 3 fois 4444.

  Ce billet est le 300e de Quaternité, un nombre qui correspond pour moi à la somme de deux nombres essentiels de Novel Roman:
- 171 qui est donc la valeur des 18 lettres ELISABETH LOVENDALE, ou des 18 premières lettres ABCDEFGHIJKLMNOPQR, ce qui m'a mené à la découverte du jeu NOVEL ROMAN;
- 129 qui est précisément la valeur de NOVEL ROMAN (le détective du roman a un nom choisi pour avoir 18 lettres de valeur 171, parmi lesquelles NOVELROMAN, hoNORE de VALMONdada).
  En cherchant des mots de valeur 171, NOVELLISERIEZ m'a retenu, en écho à l'éventuelle novellisation de Craig, mais il y avait d'autres possibilités, comme
Symétriques Sortilèges = 171+129.

  Je me suis avisé aussi que 300 est la valeur de la lettre ש, Shin, que je rapprochais dans le précédent billet de la signature de Ricardou. Comme c'est l'initiale de mon nom écrit en hébreu, j'envisage de signer désormais d'un Shin.

  Un peu de biotexte maintenant, et de tectonique des plaques, comme dit l'ami Patrick. Nous avons depuis 15 ans une 206 SW, toujours vaillante, mais l'absence de climatisation devient un problème, alors que l'état de santé d'Anne nécessite trois voyages à Manosque par semaine, et que la canicule devient endémique.
  J'avais fait mes premières recherches juste avant le confinement, décidé à rester fidèle à la marque au lion (loven), et avais repéré une 2008 à l'immat séduisante, DY-753-NG.
  DYNG m'évoquait "dingue", mad, le "très fou" tserouf... 753, c'est la valeur en hébreu du couple Abraham-Sara, et de la somme des 3 lettres mères et de leurs inverses atbash.
  2008 c'est l'année de ma découverte de l'harmonie de la vie de Jung autour du 4/4/44. La différence entre 206 et 2008 est 1802, l'année de naissance de Victor Hugo et la valeur du quatrain qui aurait débuté Feuilles d'automne, mais Hugo y a renoncé pour ouvrir directement avec le fameux
Ce siècle avait deux ans, Rome remplaçait Sparte,
Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte.
  J'ai exploité dans Novel Roman cette curiosité découverte par Robert Rapilly, avec deux anagrammes de ce quatrain, tandis qu'un personnage essentiel était né en 1802, et mort en 1908, 17 et 18 fois 106,
VALENTIN ANDREAE MONLORNE = 251,
même valeur (selon l'alphabet actuel) que
CHRISTIAN ROSENCREUTZ = 251, selon l'alphabet latin, dit avoir vécu de 1378 à 1484, 13 et 14 fois 106.
  Précisément, 753 c'est 3 fois 251, et 2008 8 fois 251.
  C'est dans la nuit du 7 au 8 septembre 2008 que m'est venue l'intuition sur l'harmonie de la vie de Jung, or le 8 septembre est le  251e jour d'une année normale, le 252e d'une année bissextile. Dans leur Bach et le nombre, Van Houten & Kasbergen utilisent la valeur 252 pour Christian Rosencreutz, selon l'alphabet Schwenter.
  J'avais donc porté mon choix pendant le confinement sur cette 2008 DY-753-NG, mais, lorsqu'il s'est terminé, la voiture était déjà vendue. Parmi les 2008 encore en lice, j'ai choisi EL-233-FV, uniquement parce que 233 est un nombre de Fibonacci.
  Ensuite, j'ai pensé que EL était les initiales de Eric Lönnrot, la dernière victime de La mort et la boussole, tuée un 3/3, reliée plus haut à la mort de FNA Cortier, mort le 6/6/99 au pont de la rue La Condamine (dernier d'une série de morts les 3/3, 4/4, 5/5, et 6/6). El est aussi le diminutif d'Ellery Queen, auteur et détective de L'adversaire, inspiré de La mort et la boussole, et inspirant Sous les pans du bizarre
  FV conviendrait à Fred Vargas, mais il m'est venu autre chose en considérant l'ensemble ELFV.
  elf, c'est l'allemand "onze", et V le chiffre romain 5. 11/5 était le jour du déconfinement, prévu de longue date.
 
  Peugeot ne m'a proposé que 200 € pour la 206, alors qu'elle venait de passer vaillamment le contrôle technique, avec pneus, batterie, et balais d'essuie-glace neufs....
  Je la garde donc, imaginant qu'elle vaudra son pesant d'or dans quelques siècles, lorsque je serai reconnu comme l'Ultragénie d'Argenteuil...
  Et je signe de mon signe, Shin.