1.1.11

Arisu n'est plus ici (jplg 1)

Une récente coïncidence m'invite à consacrer ce premier billet de 2011 à Jean-Pierre Le Goff, à plusieurs reprises évoqué sur mes pages pour les aventures partagées ensemble.
Hélas Jean-Pierre n'est plus totalement parmi nous depuis trois ans, atteint de la terrible maladie d'Alzheimer. Depuis 2008 ses nombreux amis ne reçoivent plus ses courriers, invitations à d'étranges interventions motivées par les méandres de l'insatiable curiosité de Jean-Pierre, éternel émerveillé des coïncidences tissant ce monde.
Jean-Pierre a jadis eu l'honneur de devenir un personnage de BD, dans Demi-tour, collaboration de Benoît Peeters et Frédéric Boilet. Sa passion pour le Rayon Vert l'avait amené à Boilet, auteur en 87 d'une BD portant ce titre, sans rapport avec le film de Rohmer sorti quelques mois plus tôt.
Boilet a été si impressionné par ce personnage hors du commun qu'il l'a fait apparaître dans son projet suivant, de façon quelque peu exagérée, sinon caricaturale :Précisons que Jean-Pierre ne ressemble aucunement à cet "André-Marie", dont le discours est ici calqué sur la Pansémiotique, association qui nous a un temps attirés, Jean-Pierre puis moi, mais dont nous n'avons pu supporter longtemps le radicalisme.
Revenons à plus important. Boilet a longtemps vécu au Japon, où ses contacts lui ont permis de faire éditer Demi-tour en japonais, en 1999. Et voici qu'en septembre dernier ce manga est revenu en France, sous le titre Demi-tour 2.0 :L'intérêt de cette réédition vient d'abord des compléments apportés par les deux auteurs, le nouvel album compte 80 pages contre 64 pour l'ancien (ce qui me rappelle le 5e volume de Quintett).
Sinon la BD elle-même est quasiment identique, et les seules traces de son demi-tour du monde sont les japonisations des noms de deux personnages. Miryam est devenue Misato, et Le Goff se nomme désormais Arisu, son double prénom restant inchangé :Une première curiosité est que Arisu est la forme japonaise du prénom Alice, peut-être choisie pour le Pays des Merveilles, en tout cas pas à cause de l'unique enfant de Jean-Pierre, Alice, dont Boilet ignorait l'existence.
Et puis Jean-Pierre avait été intéressé par mes recherches sur le Carré Iuras, ce qui l'avait amené à écrire en 2002 un texte sur le carré Sator, en ma possession ainsi que deux lettres manuscrites à ce sujet. Mes recherches faisaient apparaître le mot ARISU, mais je demande un peu de patience. Incidemment, Boilet a rendu compte de la fascination de Le Goff/Arisu pour le symbolisme de la croix : Le carré Sator reste à ce jour une énigme, puisqu'il semble construit sur la formule PATER NOSTER, mais que sa paléographie est incompatible avec une origine chrétienne. Mon apport à la question a été de constater que les 11 lettres de la formule PATER N OSTER avaient en gématrie latine la valeur 143 = 11 fois 13, remarquablement équilibrée autour du N = 13 central (vérification sur le Gématron), ainsi 21 lettres du carré Sator présentaient-elles le même équilibre que le carré magique traditionnel de nombres lui aussi équilibré autour de 13.
Mes recherches m'ont ensuite fait découvrir que les 25 lettres de la formule du Titulus, IESUS NAZARENUS REX IUDEORUM (INRI), avaient pour valeur 325 = 25 fois 13, ou encore somme des 25 premiers nombres pouvant former un carré magique (vérification).
Il m'a alors semblé souhaitable d'arranger les lettres du Titulus selon un carré magique de lettres, à l'instar de la formule PATER NOSTER mise en croix ayant peut-être donné naissance au Sator, et j'ai conçu en 1995 un programme pour débusquer d'éventuels résultats.
Programmeur autodidacte, je ne sais si mon programme a trouvé toutes les solutions, ni si certaines ne seraient pas redondantes, malgré une fonction prévue pour éliminer les doublons par rotations ou permutations élémentaires, toujours est-il qu'il a trouvé 111 carrés anagrammes de la formule, où toutes les lignes, colonnes et diagonales ont pour valeur 65.
J'ai toujours la sortie papier donnant ces 111 résultats (cliquer pour agrandir), avec une curiosité : les carrés sont donnés par rangées de 13, les 8 premières rangées sont impeccables, mais dans la dernière rangée, incomplète, seule la première ligne des 7 carrés a été imprimée, 4 fois. Je n'en ai pas cherché la raison et ai recopié les lignes manquantes d'après la sortie écran.
La première bizarrerie est que c'était le dernier carré correctement imprimé qui offrait les plus belles harmonies, motivant ma tentative de manipulation du Carré Iuras. Au-delà des harmonies propres à tous les autres carrés, ce carré avait un N=13 au centre, et 4 groupes de 4 lettres symétriques par rapport à ce centre valaient 52=4x13, notamment les 4 coins IESU pouvant correspondre au vocatif de Iesus.
I U R A S
U S R E E
D N N X O
M I A U Z
U E R S E

Enfin, en tournant le carré d'un demi-demi-tour, sa première ligne correspondait à un mot latin, iuras, "tu jures", pouvant évoquer un serment ésotérique. J'ai alors imaginé un renversement du processus, partir d'une hypothétique découverte de ce Carré Iuras et décrire les étapes de son déchiffrage.
Je n'ai pas eu le toupet de graver un faux carré sur une vieille pierre pour accréditer mon histoire, aussi ma démarche pour publier cette fantaisie a échoué, malgré l'intérêt de la revue Connaissance des Religions qui a néanmoins publié mes découvertes numériques sur le carré Sator dans son numéro 51-52 de 1997.
Curieusement, ma démarche est passée par le musicologue Jacques Chailley, auteur de considérations sur le carré Sator dans Le symbolisme de la gamme. Lorsque j'ai connu Jean-Pierre quelques années plus tard, il habitait 97 rue Jouffroy, et une plaque à l'entrée de l'immeuble commémorait la naissance de Chailley en 1910.

C'est assez amusant puisque Jean-Pierre s'intéressait aux plaques commémoratives étranges... Il est maintenant possible de revenir au document présenté ci-dessus, les 111 solutions trouvées par mon programme.
J'ai mentionné ce document il y a 3 ans sur cette page, où je remarquais la présence de deux carrés IURAS, le 104e que j'avais choisi pour ses multiples propriétés, et le 107e, où IURAS croisait avec un ROMER central qui m'était extrêmement significatif, pour de multiples raisons.
La moindre d'entre elles était que l'allemand Römer signifie "Romain", le nom propre étant rendu en français par Rohmer (ou Roemer).
Lorsque Bruno Duval, ami de longue date de Jean-Pierre, m'a appris la parution de Demi-tour 2.0, où Le Goff était devenu Arisu, j'ai instantanément pensé à son intérêt pour le carré Iuras, anagramme d'Arisu, et à Römer/Rohmer, pseudonyme du réalisateur du Rayon Vert, constituant selon ses dires une anagramme.
Je me suis demandé si l'exacte anagramme ARISU apparaissait sur le document, et elle apparaît effectivement, une unique fois, dans la ligne centrale du 65e carré, à la même position que ROMER du 107e carré.
Ainsi la coïncidence des deux Rayons Verts, de Rohmer et Boilet, a conduit Jean-Pierre à contacter Boilet, ce qui a mené Boilet en 1996 à l'intégrer au scénario de Demi-tour, sous les noms Le Goff puis Arisu, au moment où je tentais de publier mon carré Iuras.
La présence d'ARISU dans le 65e carré a un sens contextuel, puisqu'il s'agit de carrés de somme magique 65, mais offre un écho dans la vie du vrai Le Goff, dont les premiers symptômes inquiétants sont apparus peu après ses 65 ans, le 2 août 2007. Quelques mois plus tard est venu le terrible diagnostic, Alzheimer.

ROMER, ARISU, j'ai examiné les lignes centrales de tous les carrés en quête de mots porteurs de sens, et c'est USINE au centre du 80e carré qui m'a retenu.
Je me souviens l'avoir remarqué jadis, mais je ne connaissais pas alors les hétérogrammes de Perec, a fortiori sa série L'USINE A TROC qui est à ma connaissance ce qui se rapproche le plus des carrés magiques de lettres dont j'avais rêvé l'existence, ainsi son dernier poème compte 13 lignes anagrammes, les 11 vers et les première et dernière colonnes.
Je me sens confus de ne pas m'être souvenu ensuite de l'usine des carrés Iuras, alors que L'usine à troc m'a tant marqué que j'ai écrit une suite analogue de dizains à l'occasion du 10/10/10, présentée ici. J'ai eu une pensée pour Le Goff ("forgeron" en breton) en écrivant le 7e dizain, car mon 8e poème affichait des diagonales LU en hommage au biscuit LU magnifié par Perec, ce que j'avais voulu renforcer par les mots Lefèvre et Utile dans les poèmes voisins. Lefèvre étant impossible à caser, j'avais eu recours à un autre sens du latin faber, "ouvrier, forgeron, artisan".
Incidemment, Webern était passionné par l'énigme du carré Sator (qu'il a tenu à faire figurer sur sa tombe). C'est peut-être sa symétrie qui l'a conduit à imaginer avec Schönberg le sérialisme, lequel inspirera à son tour Perec pour imaginer les hétérogrammes...


Parmi les 42 séries de 5 lettres de valeur 65 composant les carrés Iuras, la série EINSU était majoritaire, l'abondance de ces lettres dans la formule de départ permettant jusqu'à 3 séries par carré, cas du carré Iuras proprement dit où elle est présente dans les deux diagonales et dans une colonne. L'anagramme significative USINE n'apparaît que dans le 80e carré.
Vient en seconde série la plus fréquente EERSU, ou EERSV puisque U et V sont une seule lettre en latin. Elle apparaît aux rangées 2 et 5 du carré Iuras sous les formes VSREE et VERSE, répondant à mes REVES secrets d'alors, mais l'irruption récente de l'USINE Perec me rappelle qu'il appelait VERS les lignes de ses hétérogrammes.
Il y a un écho avec le Rayon Vert de l'étrange RÖMER/ROHMER, détaillé sur ma page consacrée au film. Il y a organisé une rencontre avec Hubert REEVES, qu'il a faite passer pour un hasard auprès de ses assistants, lesquels ignoraient jusqu'à l'identité de ce "physicien retraité" qui apparaît au générique du film sous le nom de Dr Friedrich Günther Christlein. C'est ce "petit Christ" qui explique à 4 dames le phénomène du rayon vert, ce qui fait un sacré lien avec le Le Goff/Arisu de Boilet, spécialiste du "50-50", du "Rayon Vert" et de la "Croix" (voir la vignette plus haut).

Peut-être est-il temps d'aborder le sujet de Demi-tour : la nuit du second tour de l'élection présidentielle de 1995, incertaine jusqu'à l'annonce des résultats, les derniers sondages prévoyant du "50-50", Le Goff (Arisu) décrète que le dessinateur Joachim, 38 ans, logé à l'hôtel Terminus à Dijon, est destiné à Miryam (Misato), 19 ans, logée à l'hôtel Climat en face, petite amie toujours vierge d'un militant RPR nommé Rémi.
Ce sont les MI et leurs demi-tours IM qui ont conduit Le Goff à prédire un demi-tour de Miryam partie pour Paris après s'être fâchée avec Rémi, et à convaincre Joachim parti vers l'Italie de revenir lui aussi à Dijon, mais, si Miryam a effectivement fait demi-tour, c'est pour revenir vers Rémi...

Je dois donc à Bruno Duval de m'avoir fait connaître en 2001 le premier Demi-tour, puis le second très récemment. Je l'ai vu en décembre à Paris où je lui ai fait part d'une info concernant sa date de naissance à laquelle il prête une signification essentielle, le 17 février : Marie-Louise von Franz, considérée comme la continuatrice de Jung, est morte le 17 février 1998.
Bruno m'a annoncé en retour la parution de Demi-tour 2.0, avec ses compléments où les auteurs parlaient de Jean-Pierre Le Goff, mais aussi de lui-même. C'est que l'album était paru en février 97, et qu'un ami genevois le lui avait offert pour son 50e anniversaire, sans savoir qu'il connaissait le Le Goff y apparaissant.
Boilet avait envoyé un exemplaire dédicacé de Demi-tour à Jean-Pierre, « Peut-être, cette fois, ai-je vraiment fait le livre pour vous ?», faisant allusion au Rayon Vert. Jean-Pierre, ayant alors pris ses distances avec la Pansémiotique, n'avait guère apprécié l'album, et c'est Bruno qui a répondu à l'appel, ce dont Boilet rend compte ainsi :
Quelques semaines plus tard, en mars 1997, lors d'une dédicace au Salon du livre de Paris, un homme arrive, se penche sur moi et me dit : Je suis un ami de Le Goff… et je vais vous dire, ce livre, Demi-Tour, vous ne l'avez pas fait pour lui, vous l'avez fait pour moi. »

J'hésite à annoncer à mon (demi-)tour que j'ai vu moi aussi des signes me concernant dans Demi-tour, ce dont j'ai parlé en 2001 dans la revue Pan de la Pansémiotique, mais ces "signes" se sont renforcés avec la nouvelle version et ma récente perspective jungienne.
D'abord cette histoire de 50-50 à Dijon entre deux trains. Depuis notre installation en Provence en 1984, je vais plusieurs fois par an à Paris, et j'ai évité le plus longtemps possible le TGV, avec un voyage durant toute la journée s'achevant par le train 5050 partant de Lyon et arrivant à Paris vers 19:37. Puis il a fallu prendre un autre train à Lyon, correspondance à Dijon avec le 5050, et enfin la SNCF semble s'être ingéniée à supprimer toute possibilité de rallier Paris depuis Digne dans la journée sans TGV.
Je regrette ces longs trajets dans des wagons parfois déserts, propices à la méditation, et je me rappelle notamment que c'est dans le 5050 que j'ai en 1994 fait la découverte essentielle sur le vers de Virgile Ducite ab urbe domum..., future trame de mon unique roman Sous les pans du bizarre, publié en novembre 2000 peu après mes 50 ans (je suis né en 50).
C'est en 2000 aussi que Jean-Pierre a eu l'honneur de la "grande édition" avec son Cachet de la poste chez Gallimard, livre que j'ai remarqué tandis que Jean-Pierre de son côté remarquait le mien, prélude à notre contact.
Par ailleurs MI-IM parallèle au 50-50 était extrêmement évocateur pour un numérologue hébraïsant, car les équivalents hébreux de MI (mem yod) constituent un "couple atbash", c'est-à-dire que l'atbash transforme MI en IM. Or ces lettres mem-yod sont aussi les chiffres 40-10, d'où MI-IM = 50-50.

Ce n'est qu'avec Miryam devenue Misato que je me suis avisé de possibles échos avec ma libido, laquelle est essentiellement vouée depuis plus de 30 ans à Anne-Marie, mais il m'est arrivé d'avoir d'autres désirs, très rarement déclarés, encore moins réalisés.
Or l'un des deux cas de flamme déclarée dont je me souvienne était envers une Japonaise prénommée Misa (peut-être était-ce le diminutif de Misato), en septembre 82. Nous avons passé une nuit ensemble, mais limitée à quelques bisous. J'éprouvais une grande tendresse pour elle, et lorsque nos routes ont divergé le lendemain, j'ai beaucoup songé à un demi-tour...
Je rappelle que mon prénom est Rémi, comme le militant RPR qui a finalement conquis Miryam/Misato.

Un peu d'introspection m'a fait me rappeler d'une Suissesse professeur de guitare à Quillan (11), prénommée IMI (diminutif d'Irmgard). C'est l'amour de la musique qui nous avait rapprochés, et peut-être un peu plus, mais nous avions chacun "quelqu'un", et plus d'intimité aurait créé bien des complications.
Toujours est-il que mon plus beau souvenir de notre relation est un spectacle fin juin 81 à l'église de Quillan, où nous avons joué en duo une gavotte d'une suite anglaise de Bach. C'est la dernière fois où je me suis "produit en public", quelques semaines après la victoire socialiste aux présidentielles le 10 mai 81.
Ceci avait été accueilli avec un enthousiasme limité dans mon milieu libertaire, mais j'étais loin d'imaginer alors qu'il existerait 14 ans plus tard des milliers de jeunes tels Miryam ou Rémi, qui n'auraient connu que le mitterrandisme et qui pourraient voir en Chirac un idéal.
Aujourd'hui, à l'occasion du 15e anniversaire de la mort de Mitterrand, des voix prétendument apolitiques (?) proclament qu'il a été le seul président de la 5e avec de Gaulle à posséder une réelle stature d'homme d'état...
O tempora, o mores, comme disait l'autre.

Et Jung dans tout ça ? Il y a d'abord Joachim, auquel Boilet a donné son visage, Joachim fêté le 26 juillet, anniversaire de Jung. Jung voyait Marie/Miryam figure féminine compléter la Trinité masculine pour en faire une Quaternité. Demi-Tour a 4 personnages, Joachim, Rémi, Le Goff et Miryam.
Je rappelle que c'est le 8 septembre, Nativité de Marie, fille de Joachim et Anne, que j'ai eu mon intuition sur le 4/4/44 aux 4/5es de la vie de Jung.

Il m'est apparu ensuite plus important que ce 8 septembre 2008 fût le premier jour de l'an pataphysique 136, alors que les protagonistes de la première NDE rapportée, Jung et Haemmerli, se trouvaient avoir les mêmes valeurs numériques 52 et 84, somme 136, que Elie et Hénoch, les seuls personnages de l'Ancien Testament à n'avoir pas connu la mort.
Quelle n'a pas été ma surprise en constatant que mon article sur le carré Sator, paru en 1997 sous un pseudo (anagramme d'Arsène Lupin), était immédiatement précédé dans la revue Connaissance des Religions par un article sur Elie et Hénoch, thème plutôt rarissime, l'auteur signalant qu'à sa connaissance le sujet de la mosaïque de Cruas est unique dans l'art chrétien :
Je suis loin d'avoir épuisé le sujet et y reviendrai dans le prochain billet, uosʇɐʍ ɹɐǝp ʎɯ ʎloɥ, que j'ai en fait posté avant celui-ci pour permettre une lecture séquentielle des billets de janvier.

uosʇɐʍ ɹɐǝp ʎɯ ʎloɥ (jplg 2)

Je poursuis ici mon hommage à Jean-Pierre Le Goff, JPLG, débuté dans le billet Arisu n'est plus ici qu'il est plutôt nécessaire de lire d'abord.
Il était donc motivé par la présence de LE GOFF dans l'album Demi-tour de Boilet-Peeters (1997), reparu il y a peu au format manga avec LE GOFF devenu ARISU, mot qui était apparu parmi les solutions d'un programme calculant les carrés magiques gématriques obtenus à partir de la formule
IESUS NAZARENUS REX IUDEORUM
J'en avais tiré en 1996 un texte, Le carré Iuras, qui avait intéressé JPLG, lequel avait à son tour proposé une analyse du carré Sator dans un texte de 2002.
En fait la formule comporte généralement une ligature Æ dans IUDÆORUM, et j'imaginais dans mon texte un croisement des deux éléments de la formule, comportant chacun un A presque central, à la manière dont on propose une construction du carré Sator à partir de deux PATERNOSTER croisés sur le N central :
IESUS NAZARENUS + REX IUDAEORUM
Je savais aussi que la ligature Æ est souvent rendue par E en bas latin, et ai ensuite rencontré maintes formes rex iudeorum, ce qu'il est facile de vérifier maintenant sur la toile, la plus curieuse étant sur cette amulette où se croisent Jesus Na-zarenus et Rex Ju-deorum.

Le carré Iuras me semblait si harmonieux que je n'ai ressenti aucune culpabilité en tentant de lui attribuer une certaine antiquité. Mon histoire de son déchiffrage était si belle que j'étais même tenté d'y croire... Et puis est venu un réel écho antique avec un carré Iurasa, composé par Raban Maur dans ses Louanges de la Sainte Croix, vers 813 :Raban a construit à l'intérieur d'un texte en vers de 36x36 lettres 5 carrés de 6x6 lettres décrivant chacun l'un des livres du Pentateuque. Le Lévitique occupe le centre de ce quinconce avec Iura sacerdotis Leviticus optime psallit ("Le Lévitique chante au mieux les lois de la prêtrise").
J'avais remarqué la 5e colonne, donnant la lecture de bas en haut IESUOS, presque le Iêsous grec, et au moins IESU que j'envisageais être une clé du carré Iuras, composée par ses 4 coins.
Retrouvant cette bizarrerie j'ai cherché IESUOS sur Google, qui m'a envoyé à un livre de JK Watson, Le christianisme avant Jésus-Christ, où l'auteur avance que les hellénophones ne percevaient pas le sens étymologique de Iêsous ("sauveur"), qu'ils ne pouvaient comprendre que comme Fils-de-Dieu, ies-uos, avec ies exprimant l'idée divine et uos proche de uios ("fils" grec).
Quoi qu'il en soit de la validité de cette hypothèse, je suis frappé par cet uos = "fils", alors qu'un demi-tour transforme uos en son, "fils" anglais, d'autant que l'hypothèse vient d'un Watson (qui écrit en français).
J'ai déjà indiqué être depuis longtemps profondément frappé par ces "ambigrammes", notamment le logo des vêtements New Man, dessiné en 69 (année ambigramme également) par Raymond Loewy, également créateur du logo LU dont il était question dans le précédent billet.
Ceci intéressait aussi JPLG, et l'une de ses interventions, la dernière à laquelle j'ai assisté, le 1er avril 2006, s'est tenue à Trans-en-Provence (83), où un ingénieur belge a construit en 1930 un curieux puits aérien, destiné à condenser l'humidité atmosphérique (tiens, cet Achille Knapen est mort le 26 juillet 41, 66e anniversaire de Jung, fête de Joachim héros de Demi-tour).
JPLG a marqué son passage en laissant dans l'USINE à ROSEE deux objets en plastique polymère fabriqués par un ami, ne se différenciant que par leurs couleurs, complémentaires, le VERT et le ROUGE qui étaient une obsession de longue date de JPLG.
Les objets étaient conçus pour permettre la lecture aussi bien de dew, "rosée", que de map, "carte" (les reconstitutions ci-dessus ne sont qu'approximatives).

J'ai écrit en gras plus haut USINE et ROSEE car se sont, à une lettre (O pour U) et à l'ordre près, les deux "mots" les plus importants du carré Iuras, avec 3 (ISNUE, SENIU en diagonales, USNIE 2e colonne) et 2 occurrences (USREE UERSE 2e et 5e rangées).
I U R A S
U S R E E
D N N X O
M I A U Z
U E R S E

Dans son étude de 2002 La magie du carré SATOR, à ma connaissance non publiée, JPLG proposait une nouvelle approche constituant à numéroter de 1 à 11 les lettres de la formule PATERNOSTER,
P1 A2 T3 E4 R5 N6 O7 S8 T9 E10 R11
et à reporter ces homologations sur les 13 lettres du demi-carré SATOR, en doublant A2 et O7 en sus dans le carré, ce qui conduit à ceci :
S8 A2 T3 O7 R5 = 25
A2 R11E4 P1 O7 = 25
T9 E10N6 = 25

Un résultat assurémént curieux, mais dont JPLG ne déduisait rien, sinon qu'une telle cohérence s'accordait mal avec l'hypothèse purement rationnelle de la création du carré SATOR à partir de PATERNOSTER, ce avec quoi je suis parfaitement en accord, mais ce qui me semble plus important ici est la construction symétrique de JPLG qui, après un demi-tour du demi-carré ci-dessus, plaçait le TENET central au milieu d'un 50-50 (ou d'un 25-25-25-25), alors que jusqu'à l'apparition de Arisu il aurait été fort téméraire d'imaginer un lien entre Demi-tour et les carrés Sator ou Iuras.
Le Goff indique que c'est mon Carré Iuras qui l'a mené à s'intéresser au carré Sator, et y fait référence à maintes reprises dans son étude.

Cette étude lui donne l'occasion de mentionner son déménagement récent, et la découverte près de chez lui du square du Regard de la Lanterne, où se dresse une étrange construction ronde, dont la photo ci-contre, première trouvée par GoogleImages, est empruntée à Suri (IURAS/ARISU !)
C'est un accès à l'ancien acqueduc qui alimentait Belleville. JPLG, examinant le mur de la rotonde, y vit un emplacement rectangulaire semblant correspondre à une plaque disparue, et à cet endroit une main malhabile avait inscrit un mot en capitales, RIEИ.
Ce qu'il a lu RIEN, avec un N inversé, et googler "N inversé" lui a vite appris que le N inversé apparaissait dans certains carrés Sator. Je rappelle qu'il habitait précédemment 97 rue Jouffroy, où une plaque indiquait qu'était né là Jacques Chailley, auteur (avec Jacques Viret) d'une théorie sur le carré Sator examinée dans mon étude.
Un hasard a voulu que je visse peu après à RIEZ (04) une inscription où les U ressemblaient fort à des И, et, sachant par ailleurs que rieu signifie "rivière" en occitan, j'émis l'hypothèse que l'énigme RIEИ correspondît au constat trivial d'un provincial de passage, en m’émerveillant d’avoir découvert cette solution à RIEZ, qu’un quart de tour du Z transforme en RIEN.
Le 99e carré découvert par mon programme en 1995 avait en première rangée UEIRO, soit "ô rieu" après un demi-tour, suivi de IUSAR anagramme d'Arusi.

JPLG s'est donc installé début 2002 au 9 rue Arthur-Rozier (19e), qu'on peut voir vers 1900 sur une carte postale, en vis-à-vis d'une photo actuelle, sur le site ParisAvant. Le hasard a voulu que je lusse peu après La double mort de Frédéric Belot (1932), de Claude Aveline.
Dans ce roman qui aurait selon Boileau-Narcejac "donné au genre policier ses lettres de noblesse", on découvre un 4 novembre celui qu'on croyait être Frédéric Belot assassiné chez lui, et dans la chambre voisine un sosie inconnu, mortellement blessé d'une balle dans la tête.
C'est que l'inspecteur Belot n'avait accepté quelque temps plus tôt une promotion à un poste purement administratif que pour mieux traquer les criminels, grâce à ce sosie providentiel, un Frédéric Belot II qui trompait son monde à la préfecture, tandis que Frédéric Belot I poursuivait incognito son activité...
Je suis abasourdi par ce nom, Frédéric Belot I, parfaite anagramme de Frédéric Boilet, celui qui s'est inspiré de JPLG pour créer le personnage de Le Goff/Arisu.
Frédéric Belot s'est servi d'une particularité de son domicile, correspondant au réel immeuble du 26 rue de Crimée qui a une sortie discrète au 43 ter rue Arthur-Rozier, franchissant par un pont la rue de Crimée.
Je m'étais demandé si Claude Aveline, C-A de rangs 3-1 dans l'alphabet, n'avait pas choisi les initiales du héros de sa Suite Policière en doublant les siennes, F-B ou 6-2. Il est en tout cas frappant que CA soit mort un 4 novembre (1992), 60 ans après la double mort de FB.
Je rappelle que je me suis intéressé récemment à ce 4 novembre, saint Charles...
Le cas de la Suite Policière est probablement unique dans la littérature, puisqu'elle a débuté par la mort de son héros, les 4 enquêtes de Belot parues ultérieurement (jusqu'en 1970) étant bien entendu supposées se passer avant cette tragédie.

Le filet s'est encore resserré autour de JPLG puisqu'en 2003 est sorti le film Tristan, de Philippe Harel, où l'inspectrice Emmanuelle Barsac soupçonne ce Tristan d'être un tueur en série d'un nouveau genre. Il se trouve habiter 9 rue Arthur-Rozier, la propre adresse de JPLG. Lorsque je lui en ai fait part, celui-ci s'est souvenu qu'il y avait lors de son emménagement une consultation des habitants de l'immeuble à propos d'un film en préparation, à laquelle il n'avait guère prêté attention.
Si l'entrée du 9 rue Arthur-Rozier apparaît dans le film, elle ne correspond aucunement à l'immeuble réel. Par contre l'appartement de Tristan a en commun avec celui de JPLG d'être encombré de piles de livres.
Si l'enquête sur l'étrange Tristan est prenante, le dénouement du film est déconcertant et pourrait lui justifier le sous-titre La double vie d'Emmanuelle Barsac, l'inspectrice cachant une seconde personnalité criminelle...
JPLG est né à Douarnenez, dans l'anse du Port-Rhu, en face de l'île Tristan. La découverte d'une boîte de sardines décorée d'une marine montrant Port-Rhu et l'île Tristan, avec sa maison natale visible à droite, fut l'occasion d'une de ses dernières interventions, le 20 janvier 2007. Elle consista à fixer sur sa maison une plaque SARDINES cela va SANS DIRE (anagramme de SARDINES).C'est en partie le fait d'avoir trouvé une carte postale montrant l'immeuble où JPLG a passé ses dernières années productives, en écho à cette boîte de sardines, qui m'a fait explorer les fictions autour de la rue Arthur-Rozier.

Je vais essayer d'en finir en revenant au principal écho de ROMER évoqué dans le billet précédent. Mon dernier billet de 2010, daté de la veille de ces billets du 1/1/11 consacrés à JPLG, était consacré à une de mes découvertes bibliques quaternitaires, celle qui a le plus tardé à trouver un écho.
Une autre découverte essentielle à mes yeux concernait les deux arbres du paradis, l'arbre de vie et l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Les expressions ont en hébreu les valeurs 233 et 932, soit 4 fois 233, ce qui m'avait semblé éminemment significatif dans le contexte quaternitaire du jardin d'Eden, et s'accordant avec les commentaires traditionnels, notamment celui du Zohar selon lequel les deux arbres n'en sont en fait qu'un seul.
J'ai été près de 10 ans à m'étonner de ne trouver nulle mention de cette belle adéquation, et puis le plus pur hasard m'a fait jeter les yeux sur des pages dispersées dans une décharge d'un village voisin : c'était un cours polycopié d'un kabbaliste hollandais, et l'une des premières pages mentionnait la relation 233-932 des deux arbres... J'ai donné plus de détails ici, et indiqué comment j'avais contacté celui qui avait jeté ces documents, un thérapeute rebirth nommé Römer.
J'ai été ébahi en retrouvant en 2007 le mot ROMER parmi les solutions magiques de la formule du Titulus de la croix du Christ, puisque selon la tradition chrétienne cette croix aurait été formée du bois de l'arbre de vie. Je me sens une nouvelle fois au bord de l'abîme depuis que j'ai rejeté un oeil sur mon article paru dans Connaissance des Religions, où il a tenu à un fil que je pusse y développer mon histoire du carré Iuras, mon article qui était immédiatement précédé par Hénoch et Elie. La mosaïque romane de Cruas.
Selon Francis Laget, auteur de l'article, cette mosaïque unique en son genre montre Elie et Hénoch gardiens des deux arbres d'Eden, le lignum (l'arbre de vie) et le ficus (le figuier, l'arbre de la connaissance).Je ne vais pas revenir sur mon parallèle entre Elie-Hénoch et Jung-Haemmerli, me bornant à remarquer que si j'avais eu conscience de cette relation immédiate entre Elie-Hénoch et un motif Quatre-Un aussi essentiel pour moi, je n'aurais pas manqué de la mentionner bien plus tôt.
Il y a par ailleurs tant d'échos numériques avec mes recherches passées ou récentes que je renonce à les explorer pour l'heure, attendant que les choses se décantent un minimum.

Je ne crois cependant pas devoir éluder un dernier point, un rêve de la nuit du Nouvel An, entre donc les dates choisies pour mon billet Et cetera (parce que 31/12 est le renversement de 21/13, relation fétiche qui m'a mené à poster ce billet, en cours d'écriture depuis longtemps, à 21:13), et le(s) billet(s) en hommage à Le Goff, parce qu'il m'a semblé que le 1er janvier était plus honorifique qu'une date ultérieure.
Bref ce rêve fut extrêmement flou, et tout ce qui en subsistait à mon réveil était un nom, vu clairement orthographié Claude Exquier.
Ce nom ne me disait absolument rien. Je googlai "Claude Exquier", aucun résultat. Une centaine de résultats pour "Exquier" seul, l'un des premiers étant une page d'un annuaire californien contenant :
EXQUIER Ezequiel. 1111 ALASKA AV FRFLD. Vallejo , CA. (707)429-2502.
L'écriture de Et cetera m'avait fait penser à l'affaire des deux arbres de valeurs 233 et 932, or l'une des curiosités majeures de ce dossier est pour moi un oracle du livre d'Ezéchiel (verset 37,9), dont la traduction la plus immédiate de l'hébreu serait
Des quatre souffles viens, le souffle !
Ceci s'écrit en hébreu en 4 mots dont les gématries sont
mearba' ruhot = 313 + 620 = 933
bai haruah = 13 + 219 = 232
soit un 933-232 pour ce motif 4-1, presque le 932-233 idéal.
L'adresse 1111 de cet Ezequiel me sembla justifier de noter ceci sur mon "carnet des coincs", que je tiens depuis 6 ans. J'utilisais d'abord des fichiers trimestriels, intitulés 115, 145, 175 et 1105, puis ils devinrent semestriels, et enfin depuis 2 ans annuels, soit 119 et 1110. La nouvelle année imposait un nouveau fichier, 1111 on l'aura deviné, mais ce n'est qu'en créant ce fichier que je me suis avisé que le premier jour de 2011 était en abrégé un 1/1/11, ce dont je ne suis guère fier en tant que spécialiste du 4/4/44 et subséquemment du 1/1/11...

Et voici que, alors que les deux habitants dans la fiction policière de la rue Arthur-Rozier sont un Frédéric (Belot) et un Tristan (sans plus), Frédérick Tristan a écrit en 1970 Les premières images chrétiennes, du symbole à l'icône, où il émet l'idée que les rotas du carré Sator correspondent aux roues de la vision d'Ezéchiel.
Frédérick Tristan fut un temps responsable, avec Antoine Faivre, de la publication française des oeuvres de Jung, et c'est à eux qu'on doit l'excellent choix d'Etienne Perrot comme traducteur.

J'ai précisé plus haut 813 comme date de composition des Louanges de la Sainte Croix, avec quelques arrière-pensées.
J'avais apprécié la bizarrerie qui avait conduit mon programme de 1995 à imprimer correctement les 104 premiers carrés magiques, en 8 rangées de 13, s'achevant sur le carré Iuras proprement dit, de loin le plus harmonieux.
JPLG avait un talent pour jongler avec les nombres qui m'a toujours sidéré, tant il semblait guidé par de mystérieuses intuitions. C'est ainsi que, confronté au fameux 813, il lui avait suffi de pianoter quelques instants sur sa calculette pour annoncer que, si un nombre de 5 chiffres était divisible par 813, les permutations circulaires de ce nombre l'étaient aussi.
Il s'est trouvé que les deux permutations non triviales de 00813 m'étaient toutes deux significatives :
- 13008 (16x813) parce que j'ai eu en 1998 un grave accident dans le 8e arrondissement de Marseille, code postal 13008.
- 30081 (37x813) parce que c'est le numéro de visa de L'enfant sauvage, film tourné à 37 ans par Truffaut, obsédé par le nombre 813 qui apparaît dans au moins 10 de ses films.

Sur la liste des carrés magiques, j'avais noté 1 les carrés 104 et 105, pour leurs multiples symétries numériques. Ensuite venait en 2 le carré 6, pour des raisons bien moins claires.
L'idée m'a traversé que les 10 lettres DOUARNENEZ étaient présentes dans la formule IESUS NAZARENUS REX IUDEORUM, et l'examen de la liste me semble pointer vers ce carré 6, où ces 10 lettres sont symétriques par rapport à l'axe central.
Lors de l'intervention à Douarnenez où il avait posé la plaque SARDINES cela va SANS DIRE sur sa maison natale, JPLG avait posé une autre plaque en un autre lieu qui lui était cher, portant une anagramme de DOUARNENEZ, RUE DE AN NOZ (rue de la nuit).

M I D U U
R A U O N
S U N E I
R R E X E
A S Z E S

tout bien pesé (jplg 3)

Il n'est pas facile de se débarrasser d'un sujet, ainsi le carré Sator et ses avatars ont continué à tourner dans ma tête après l'écriture des deux derniers billets.
J'ai correspondu il y a quelques années avec un Allemand professeur de latin, Armin Rieble, très versé en numérologie. Si son orientation religieuse m'est absolument étrangère, certaines de ses découvertes me semblent tout à fait remarquables.
Je me souvenais qu'Armin s'intéressait au carré Sator, j'ai eu la curiosité d'y revenir, et ai été à nouveau frappé par un détail de son abondante étude, la constatation que les 8 lettres différentes utilisées dans le carré forment le mot latin pensator, soit selon Gaffiot "celui qui pèse ses paroles" (penso signifie "peser"):Armin a remarqué que les rangs de ces lettres dans l'alphabet latin offrent une certaine harmonie :
AENOPRST = 1-5-13-14-15-17-18-19
soit deux triades de lettres consécutives 13-14-15 et 17-18-19, avec un écart de 4 qui est aussi l'écart entre les lettres A-E. Ceci permet de répartir les 8 lettres de 3 manières différentes en 4 groupes de 2 de valeurs identiques 2 à 2. Le mot PENSATOR est remarquable puisqu'il exprime immédiatement une de ces possibilités :
PE-NS-AT-OR = 20-31-20-31.
Incidemment ces propriétés sont conservées dans notre alphabet de 26 lettres.
Par ailleurs un autre découpage symétrique est possible,
P--S A--R = 33 18,
-EN- -TO- = 18 33,

un double "bateau" qui est extrêmement évocateur pour les familiers des carrés magiques pairement pairs, et de fait il suffit d'écrire symétriquement deux PENS-ATOR pour avoir toutes les rangées ou colonnes égales à 51:
P E N S
A T O R
R O T A
S N E P

Dans un vrai carré magique, la constante doit aussi être présente dans les diagonales, ce qui n'est pas le cas ici, mais la présence d'un troisième équilibre des lettres,
--NSAT-- = 32 19,
PE----OR = 32 19,

m'a conduit à supposer que c'était possible, et effectivement quelques ajustements m'ont rapidement fait aboutir à cette forme, où la clé est encore PENSATOR, écrit en boustrophédon,
P E N S
R O T A
S N E P
A T O R

Ce carré offre des harmonies proches de celles du carré de Dürer, aussi je me suis amusé à retoucher le carré de Dürer avec les nombres correspondants du carré Pensator.
Les diagonales 2-2 expriment aussi la constante, comme 7 des 9 carrés de 4 éléments contigus.
J'ai encore eu envie d'esquisser, à partir du carré d'Oppède, un pavage infini du plan avec des carrés Pensator, dans lequel chaque séquence horizontale ou verticale de 4 lettres exprime la constante magique, de même que chaque séquence diagonale rouge dextro-descendante, ou chaque séquence non teintée sénestro-descendante :Et il y a toujours une bonne part (latin PARS !) des carrés de 4 lettres...

Armin avait trouvé une phrase sujet-verbe-complément qui me semble tout à fait adaptée :
Pensator personat per notas.
Surtout si on la traduit ainsi : "Celui qui pèse ses mots s'exprime par des lettres."
Dans l'article publié en 97 étudiant les similitudes entre le carré Sator et le carré magique de nombres d'ordre 5, je remarquais le mot notas, "signes, lettres", de même valeur 65 que la constante du carré d'ordre 5.
La magnifique double anagramme d'Armin me fait penser à celle découverte par une puce de silicium survoltée, qu'il n'est pas besoin de traduire :
Discounter introduces reductions.

J'ai été ébahi de lire ANTS dans une diagonale du premier carré réellement magique obtenu à partir de PENSATOR, car ce mot représente pour moi plus que tout autre la magie legoffienne.
J'ai donc commencé à échanger quelques courriers avec JPLG en 2001, suite à la coïncidence déjà signalée de nos intérêts respectifs pour nos livres parus en 2000 dans la grande édition.
Je lis régulièrement la revue Pour la Science, et cet entrefilet du numéro de janvier 2002 attira mon attention : Certes le nom Le Goff est fort courant, mais la bizarrerie de l'expérience et le style employé ne me firent pas douter qu'il s'agissait du "bon". Je lui écrivis aussitôt pour lui faire part d'une remarque : l'image "ants" avait provoqué un déport de 5 lignes du texte, 5 lignes s'achevant par les signes ,àtns , soient les lettres mêmes écrites par les ants, les fourmis !
JPLG me confirma qu'il était bien l'initiateur de l'expérience, en me signalant les 4 premières lignes s'achevant par les signes a.nt , soit le tiercé gagn... ant (fourmi) dans l'ordre.

Dans sa brochure L'écriture des fourmis au Crayon qui tue, JPLG approfondit le sujet, concluant notamment par sa découverte d'un dessin publicitaire pour une barre chocolatée, représentant des fourmis composant le mots ants, puis se dirigeant en procession vers la barre chocolatée... Je n'ai malheureusement pu retrouver le dessin, et ne peux proposer que ce let's eat.
JPLG donne des détails sur l'expérience elle-même, organisée à la mi-mars 2001 chez la myrmécologue Christine Errard. Les premiers essais ont été peu concluants, parce que le mot imposé aux fourmis était trop long, et le lendemain JPLG a pensé au mot ants.
Il me semble envisageable que cette expérience peu académique se soit tenue un week-end, soit les 18 et 19 mars, ce qui serait absolument fabuleux, mais une date voisine ne le serait guère moins. C'était alors le Salon du Livre de Paris, et mon éditeur avait organisé une signature le samedi 18 mars. J'y suis retourné le lendemain, où était prévue la présence de David Ignatius que je désirais rencontrer. Ce 19 mars, j'ai pris le métro à Etoile pour me rendre au Salon, ce qui m'a fait passer devant une braderie aux livres à St Ferdinand des Ternes.
J'y ai trouvé un roman dont je n'avais jamais entendu parler, La bibliothèque de Villers, de Benoît Peeters (1980). Peeters est le co-auteur de Demi-tour, où apparaît le personnage Le Goff/Arisu inspiré par JPLG, et c'est aussi un éditeur, dont la maison Les Impressions Nouvelles a notamment publié La ressemblance et autres abus de langage, de Jean Lahougue (1989).
C'est un recueil de 4 nouvelles dont la dernière imite les Souvenirs Entomologiques de JH Fabre, montrant le naturaliste vieillissant étudier une étrange espèce de minuscules fourmis mimétiques, se cachant dans les mots de son carnet de notes, recomposant avec les mots mêmes qui les ont dissimulées des phrases en contradiction avec le texte de Fabre.
Le traducteur de Fabre découvre la loi gouvernant ces phrases, composées en diagonale à partir des mots écrits le jour même par Fabre, selon la propension de cette espèce à se déplacer en diagonale.

J'ai signalé à JPLG ce texte qui avait quelques rapports avec son expérience, des mots donnés en modèle à des fourmis qui les reproduisaient, de plus des mots parlant des fourmis elles-mêmes, et il s'est souvenu qu'il avait lu le livre à sa parution, mais qu'il l'avait complètement oublié lorsque lui était venue l'idée de "l'écriture de fourmis".
La particularité d'Atta bellifera d'écrire des phrases en diagonale (1er mot de la 1e phrase de Fabre, 2e mot de la 2e phrase, 3e mot de la 3e phrase, etc.) n'avait alors aucun écho pour nous, mais voici qu'aujourd'hui je découvre cette diagonale ANTS composée à partir de la 1e lettre du 1er "mot" (en partant du bas), de la 2e lettre du 2e mot, etc.
C'est début 2002 que j'ai signalé la nouvelle de Lahougue à JPLG, et que je lui ai aussi transmis mon texte sur les carrés Sator et Iuras, ce qui l'a conduit à s'intéresser à son tour à la question.
A propos du Le Goff/Arisu de Demi-tour, je remarque que le carré Pensator est composé de PENS, puis du demi-mot ATOR avec un demi-tour, puis de ces deux premières lignes PENS-ROTA avec un demi-tour...
Une autre curiosité est que goff signifie "forgeron" en breton, un des sens du faber latin dont dérive Fabre.

Je ne suis pas sûr d'avoir lu le 19 mars le livre de Peeters, acquis ce probable jour où Le Goff et Errard faisaient écrire ANTS à leurs fourmis, mais c'est très possible car c'est un très court roman dont le sujet m'intéressait vivement.
J'ai évoqué à diverses reprises la suite d'assassinats qui frappe les 4 coins de Villers, tous les 25 jours. Les victimes successives ont les doubles initiales II-VV-RR-EE. On soupçonne le bibliothécaire Lessing, mais celui-ci est trouvé mort 25 jours plus tard dans sa bibliothèque au centre de la ville.
Il s'agissait pour Peeters d'amener ses lecteurs à deviner que c'était le LIVRE qui était l'assassin, mais la construction de ce mot en mandala à partir d'un carré IVRE m'a frappé, car d'une part ces 4 lettres forment aussi le mot VIER, "quatre" allemand, d'autre part elles présentent une double symétrie immédiate dans l'alphabet, combinaison unique par sa possibilité de former des mots usuels :
A B C D E F G H I J K L M
N O P Q R S T U V W X Y Z

J'ai transmis ces constatations à Peeters, lequel m'a répondu qu'il n'avait planifié que le L-IVRE. Il m'a en outre signalé que, puisque j'étais amateur de coïncidences, j'apprécierais probablement l'album Demi-tour co-écrit avec Boilet, dont je venais d'apprendre l'existence par Bruno Duval.

La toute nouvelle implication du mot ANTS dans un carré magique éveille les plus troublants échos avec IVRE. J'ai indiqué plus haut que l'harmonie du carré Pensator, calculée au départ selon l'alphabet latin de 23 lettres, fonctionnait aussi dans notre alphabet de 26 lettres. L'unique différence est que la constante magique passe de 51 à 54.
Or le mot IVRE (ou VIER) a pour valeur 54, ainsi Le Goff et moi nous sommes environ sinon le même jour intéressés à deux mots de 4 lettres de même valeur, mais les particularités des lettres VIER dans notre alphabet peuvent être en partie (PARS !) reportées sur les lettres ANTS, qui sont équilibrées autour du centre virtuel de l'alphabet de 26 lettres, entre M et N, le rang moyen d'une lettre étant 13.5.
Cet équilibre est bien entendu aussi réalisé pour les 8 lettres PENSATOR, comme pour les 16 lettres du carré. C'est assez savoureux sachant que penso signifie aussi "compenser", les différentes lettres de pensator compensant leurs écarts par rapport au centre de l'alphabet.

Il est encore fabuleux que le texte de Peeters fasse référence aux diagonales, son narrateur déduisant des lieux des crimes IVRE leur continuation logique :
Je n'ai aucun mal à déterminer l'emplacement du prochain crime : c'est sans étonnement que je découvre, à l'intersection des diagonales du précédent carré et au centre exact de Villers, la bibliothèque.
La chair du dos de chacune des 4 premières victimes était gravée d'une étoile à 5 branches, à l'emplacement correspondant au crime dans Villers. Lessing aura son étoile au centre de son dos, mais contrairement aux autres victimes marquées lors de leurs assassinats, cette étoile semble de facture ancienne. L'écho récent avec les carrés magiques me fait rapprocher ce quinconce de pentacles de celui qui apparaît sur la croix de Méphisto, laquelle m'avait fortement ébranlé pour ses 25 lettres Jesus Nazarenus Rex Judeorum disposées en croix, comme je l'avais imaginé pour justifier mon "décryptement" du carré Iuras.
Autour de l'étoile dans le dos de Lessing se lit encore une ancienne scarification : EN LUI L'ALPHA ET L'OMEGA (l'Alpha et l'Oméga sont les compléments justifiant la création du carré Sator à partir de la croix Pater noster).
De facto, le seul désir d'amener le lecteur à ordonner les 5 lettres du mot LIVRE rend parfaitement compte de la multiplicité des 5 et 25 dans le roman, comme de ces Alpha-Oméga christiques.

Si IVRE a pu m'amener à lire ANTS et PENSATOR selon l'alphabet moderne, la réciproque est possible, et IVRE a selon l'alphabet latin la même valeur 51 que ANTS, PENS, ATOR, etc. On peut même le lire jure, comme dans l'expression de jure, de même racine que juras premier "mot" du carré Iuras.
On peut aussi en faire rieu ("rivière" en occitan); je rappelle que JPLG a mentionné dans son étude sur le carré Sator le mot RIEИ rencontré en déambulant dans son nouveau quartier, qu'il a lu RIEN; je lui ai indiqué l'alternative RIEU, sans évidemment songer alors aux carrés Iuras où peut apparaître cette séquence (ici en première rangée, à rebours)...

En revenant à notre alphabet, la valeur totale des 16 lettres du carré Pensator serait 216, nombre particulièrement apprécié de JPLG, d'abord pour les 216 possibilités de trois jets de dé successifs. Il s'est avisé qu'il vivrait son 21600e jour le 20 septembre 2001, ce qui l'a conduit à aller à Thoires (21) ce jour pour une performance autour du nombre 216. Il n'avait pas épuisé ce qu'il avait à en dire, aussi est-il allé à Thouars (79) 216 jours plus tard, et 216 jours plus tard encore à Thoard (04), en ma compagnie (détails ici).
Les 4 lettres sonores de T(h)OAR(d) sont aussi celles composant deux rangées du carré pensATOR.

Ces lettres ont aussi pour moi un écho particulier, en songeant aux lettres IVRE(L) énumérées tous les 25 jours par l'assassin de Villers. Le LIVRE par excellence dans le monde juif est le Sefer Tora, "Livre de la Loi", et le rabbin Weissmandl a découvert que le premier T du texte de la TORA était suivi 50 lettres plus loin d'un O, 50 lettres plus loin d'un R, 50 lettres plus loin d'un A. Certes il s'agit de lettres hébraïques, mais le mot s'écrit en 4 lettres en hébreu et sa translittération immédiate en 4 lettres est TORA.
C'est le commissaire Weiss qui enquête sur les crimes de Villers.

Les lettres autocompensatoires de PENSATOR m'évoquent mon étude bachienne d'avril dernier, 16 tons, débutant par une citation de la célèbre chanson, I owe my soul to the company store, légèrement modifiée par l'anagrammatisation des deux derniers mots en tympano score. J'ai été absolument sidéré en découvrant après ce choix que ces deux mots avaient pour exacte anagramme compensatory, alors que "compensatoire" était l'adjectif idéal décrivant l'équilibre des tons ou tonalités étudiés.
Je suis à nouveau sidéré en lisant pensator à l'intérieur de compensatory.
J'ai tenté de traduire en anglais cette étude bachienne que j'estime ma plus aboutie, qui est donc devenue Sixteen tones. TONE, "ton" anglais, est l'un des mots "compensés" du carré Pensator.

Les fourmis se sont invitées dans ma propre écriture fin 2007, avec la découverte de la structure palindrome de La révolution des fourmis, de Bernard Werber (1996), ou semi-palindrome car il s'agit d'un travail d'une grande subtilité.
Incidemment, trois personnages du roman se nomment Sator, Arepo et Tenet...
J'ai tenté d'en parler alors à JPLG, mais celui-ci commençait à montrer des difficultés de concentration, d'abord interprétées par ses amis comme une faiblesse passagère.
Je n'avais d'ailleurs plus en tête tous les éléments du dossier, et ne me rappelais plus que la première tentative de JPLG d'associer les fourmis à l'écriture avait été de disposer près d'un nid des tranches de jambon sur lesquelles il avait calligraphié un texte parlant d'une personne donnant ses mots en pâture aux fourmis...
JPLG était curieux de voir comment allait disparaître son texte, mais l'expérience tourna court car les insectes dédaignèrent le jambon, peut-être rebutés par l'encre le souillant.
Feuilletant la trilogie des Fourmis, j'ai été surpris d'y trouver un passage pouvant établir un lien entre les deux expériences de JPLG. C'est dans Le jour des fourmis (1992), où un mourant a pour dernier réflexe de dénoncer avec son sang ses agresseurs. Les enquêteurs découvrent le mot sur son drap, en même temps qu'une mouche :
La mouche était en train d'absorber avec sa trompe le sang formant la première lettre : «F». Ensuite, quand elle eut terminé ce hors-d'oeuvre, elle but le «O», le «U», le «R», le «M», le «I» et le «S».
En lisant ceci il m'est revenu que les 4 premières lettres de FOURMIS forment le mot FOUR, "quatre" anglais.

Une recherche pensator sur la toile mène pour l'instant massivement vers le site de l'auteur de PENSATOR, l'homme qui inventa Jésus, livre paru en 2006. Ses spéculations semblent s'inscrire dans la lignée de la thèse de l'assassinat de Virgile par Octave Auguste, due à JY Maleuvre avec lequel j'avais échangé un courrier lors de mes recherches sur les Bucoliques il y a 15 ans.
Pourquoi pas ? Mais j'aurais besoin de très sérieux arguments pour envisager avec l'auteur que l'Apocalypse pût avoir été inspirée par ce drame hypothétique.
Quoi qu'il en soit, les considérations sur PENSATOR d'Armin Rieble sont antérieures à la publication de ce livre.

J'ai envie de conclure en détournant la célèbre formule grecque EN TO PAN, "Un est le Tout", affectionnée par Jung, en cette variante gréco-latine anagramme équilibrée de PENSATOR :
EN TO PARS
Un est la Partie

J'ai utilisé un autre de mes brouillons du 1/1/11 à 11:11 pour ce 3e billet concernant Jean-Pierre Le Goff et les carrés magiques divers, si bien que les 3 billets peuvent être affichés séquentiellement par ce lien. Le 4e billet, tours & détours, utilisant le 4e brouillon, n'y figure malheureusement pas, sans doute à cause de la longueur des premiers billets.

Note ultérieure : j'ai appris grâce à l'ami de JPLG Daniel Daligand que 蟻, lire ari, était en japonais une fourmi (qui nous veut du bien). Le wiktionnaire donne quelques autres mots intéressants, comme maur en islandais ou norvégien (c'est Raban Maur qui m'a conduit à IURAS/ARISU).