16.11.10

on sait l'heure...

Samedi 13, alors que La possibilité d'une hylé était en cours d'écriture, j'ai découvert qu'un nouveau Paul Halter venait de paraître, La corde d'argent.
Je m'y suis plongé avec délice, et me suis avisé lors d'une pause que le couple Halter-Sinoué contient les 10 lettres ESARTULINO les plus fréquentes en français, à la base de ma création en 10x10x10 lettres pour le 10/10/10 dernier.
Je pense l'avoir déjà constaté, car j'ai écrit après ma découverte de Sinoué en août 2008 la page L'art Sinoué, en référence à une création hétérogramme d'avril 2005 que j'avais intitulée d'abord l'art si noué, puis l'art noué (si...), sans penser alors à Gilbert Sinoué dont je n'avais rien lu. C'est le 2 août 08 que j'ai découvert ses Silences de Dieu, enquête dans un paradis oecuménique où les victimes sont les 10 anges ou les 10 sefirot, et les suspects Moïse, Jésus, Mahomet...
Puis j'ai lu de Sinoué Le Livre de saphir, autre (en)quête oecuménique dont l'équivalent en hébreu serait ha-sefer me-safir, probable allusion aux Tables de la Loi faites de saphir selon la tradition juive. Reprenant le roman aujourd'hui j'y vois que ce livre est assimilé au Livre d'Hénoch, et Sinoué dans une postface rappelle les cas d'Hénoch et d'Elie enlevés au ciel par Dieu... C'est plusieurs mois après ma découverte sur le 4/4/44 que j'ai opéré un lien entre Jung-Haemmerli et Elie-Hénoch, et j'avais alors oublié ce point du Livre de saphir.

Je ne sais plus si j'ai remarqué la série hétérogramme ESARTULINO lorsque la lecture de Des jours et des nuits le 31 août suivant m'a conduit à rapprocher Sinoué et Halter, bien que j'aie été mené peu après ma découverte du 8 septembre suivant à considérer une certaine importance de l'anagramme perecquienne dans sa genèse, toujours est-il que ce n'est que ce dimanche 14/11/10 qu'il m'est venu que Sinoué-Halter correspondait à une série hétérogramme ESARTULINOH + E, et qu'en conséquence il y avait toutes chances de trouver des permutations de ces 12 lettres parmi les 11 onzains en H d'Alphabets, le livre le plus fou de Perec.
J'avais donné l'ensemble des grilles en C dans ce billet, voici les grilles en H, toujours grâce au logiciel de Roland Brasseur :La façon la plus simple de repérer les anagrammes de Sinoué-Halter est de chercher s'il existe des lignes débutant ou finissant par E. Cet E formera avec la ligne précédente ou suivante la série recherchée ESARTULINOH + E.
Il y a 10 cas, parmi lesquels seuls 2 sont composés de mots complets.
D'abord c'est la première ligne du 1er poème, qui suivie du E du "vers" suivant livre
Hélas ! Ni route (...)
J'ai intitulé mon premier compte-rendu de ma découverte Sur la route du mandala, parodiant un poème de Kipling, parce que les coïncidences réunissant les romans de Halter et Sinoué mettaient en jeu des formes circulaires, notamment l'île ronde grecque Strongylé.
Je me souviens de mes interrogations d'enfant devant les lettres bizarres sur les timbres grecs, ressemblant à ENNAZ, mais mon père hellénophile m'a appris que c'était la même chose que Hellas figurant souvent à côté. Ce n'est pas très visible sur le timbre ci-contre, choisi parce qu'il représente Théra-Santorin, l'antique Strongylé, peinte par C. Maléas.

L'autre E significatif débute le dernier vers du 4e poème, et permet de lire avec le vers précédent :
Sait-on l'heure ?
Là je me suis senti récompensé de cette recherche parce que, précisément grâce à Sinoué-Halter, j'imagine qu'aujourd'hui on sait l'heure, celle d'un événement fabuleux du 20e siècle, soit le 4/4/44 à midi, le moment où Jung a débuté sa convalescence tandis que Haemmerli prenait le lit pour ne plus se relever.
Certes la simultanéité absolue des deux événements n'est pas assurée, mais au moins savons-nous que les 4/5es de la vie de Jung tombent à moins d'une demi-heure près du symbolique midi du 4/4/44, et j'ai donné sur mon blog en anglais les liens dynamiques permettant de vérifier que
A : du lundi 26 juillet 1875, 20 h, au mardi 4 avril 1944, 12 h, il y a 25088 jours et 16 heures,
B : du mardi 4 avril 1944, 12 h, au mardi 6 juin 1961, 16 h, il y a 6272 jours et 4 heures.

Pour le reste, si le rituel des hôpitaux suisses est identique au nôtre, où chaque matin une équipe médicale fait la tournée des malades et prend des décisions les concernant, je n'ose imaginer que ce matin du 4/4/44 ce soit Haemmerli qui ait dirigé l'équipe, et déclaré lui-même : "Dr Jung, vous allez mieux, et je vous autorise à vous asseoir sur votre lit pour votre repas de midi."
Je n'ose encore moins imaginer que ce soit vers midi que Haemmerli ait été terrassé par le mal qui couvait depuis quelque temps, mais je suppose que tous ces détails ont été consignés sur les bulletins de santé des deux hommes, peut-être toujours conservés dans les archives de l'hôpital.

Voici les textes complets des onzains de Perec, le premier vient en n° 40 du recueil :
Hélas ! Ni route ni salut hors la nuit héroïne.

Lors, hautain, lustré, hostile n'a Horus hurlé à ton inhalé suroit sa houle intruse, Horla ni - tu ris ? - la honte.
Venise, 16 septembre 1975

Le second est le 58e :
Hier soûlant,
L'hui né rosâtre,
Ont haï l'usure.
O, l'hast nié roulant Histoire :
Huns allant où hérisse hart.
Nu. Loin. Rois à Thulé :
Sait-on l'heure (in last hour...) ?
Venise, 18 septembre 1975

Pour éventuellement relativiser la coïncidence Sait-on l'heure ?, j'ai cherché d'autres anagrammes de Halter-Sinoué, en voici quelques unes :
l'hôte usinera
au thon sériel
l'austère honi*
art, si on le hue
Horus a été Nil
Héroïne, l'as-tu
élu anti-héros ?
lune : Soi, Théra
sun : aérolithe
shine : la route
le thé nous ira
hurlante soie
son, autre hilé
Ô l'athée, rions !

* selon la devise Honi soit qui mal y pense...

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