8.9.16

son premier Couderchet


  Les découvertes relatées dans le précédent billet m'ont conduit à lire le second thriller de Nicolas d'Estienne d'Orves (NEO), Les derniers jours de Paris, paru en 2009 chez XO, puis en 2011 en Pocket.
  J'avais feuilleté le roman à sa parution, et n'avais pas désiré aller plus loin. De fait, s'il m'a fallu un minimum de bonne volonté pour suivre les rocambolesques aventures contées dans Les Orphelins du Mal (2007) et dans L'enfant du premier matin (2011), je ne peux accepter que se situe sous Paris l'Arcadie, pays lumineux et vert dont les habitants maîtrisent les nappes phréatiques au point de pouvoir noyer Paris en restant au sec 500 m plus bas...

  Enfin je ne lis pas que pour le plaisir, mais aussi pour débusquer des coïncidences de tous ordres. Ici il s'agit d'abord d'une grande similitude de construction avec L'enfant du premier matin.
  J'ai analysé dans le précédent billet sa première partie en 67 chapitres non numérotés, alternant 34 chapitres de l'histoire de Lucie Bédarrieux en 2013 et 33 chapitres du récit de Saint-Alveydre à la première personne, de 1891 à 2013, car ce jeune homme ne vieillit pas.
  Les derniers jours débute aussi par une première partie en 34 chapitres numérotés de l'histoire de Sylvain Masson, 33 ou 34 ans, entrecoupés de chapitres dans une autre police de caractères, le récit à la première personne de la jeune Trinité Pucci, 13 ans, presque 14. Mais l'entrelacement n'est pas régulier, il y a 1, 2, ou 3 chapitres consécutifs Sylvain encadrant 21 chapitres Trinité.

  34-21 ! Fibonacci ! alors que je m'étais évertué à trouver un partage 21-13 des 34 chapitres Lucie dans L'enfant.
  Je ne vois pas ici de partage aussi pertinent 21-13 des chapitres Sylvain, ou 13-8 des chapitres Trinité. Je remarque cependant le détail du chapitrage (avec S pour Sylvain et T pour Trinité):
S-T-S / T-S / T-S-T-SSS-T-SS-T-SS-T-SSS-T-S-T-SS-T-SS-T-S-T-S-T /
\ S-T-S-T-SS-T-S \ T-S-T-SS \ T-S-T-SS \ T-SS
  Les slashes correspondent à des partages fibonacciens des S et T, à partir du début (/), et de la fin (\). J'ai réparti en deux lignes selon l'unique double concordance: il y a 13 épisodes T qui suivent les 13 premiers groupes S, totalisant 21 chapitres Sylvain, et bien entendu 8 épisodes T parmi les 13 derniers chapitres Sylvain, formant 9 groupes.

  La coïncidence essentielle est l'entrelacement de 34 chapitres d'une nature avec 21 d'une autre nature. Pour le reste on peut imaginer qu'un minimum de régularité dans la distribution des chapitres Sylvain est responsable des autres césures fibonacciennes. A contrario on pourrait inférer que les irrégularités démontrent l'absence de construction Fibo délibérée, telle celle vue dans une BD:  Les chapitres de Derniers jours donneraient, pour la seconde ligne,
BABABBABABABBABABBABB, qui malgré ses harmonies n'offre qu'une séquence commune maximale de 14 lettres (soulignée; elle correspondrait aux lettres 12 à 25 du mot infini de Fibonacci ci-dessus).

  Cet équilibre fibonaccien entre chapitres numérotés et non numérotés me rappelle l'équilibre doré trouvé entre les chapitres titrés et non titrés de Hasard, de JMG Le Clézio, équilibre parfait qui semblait un hasard, précisément.

  Je reviens à NEO pour la 2e partie de Derniers jours; après la rencontre de Sylvain et Trinité au 34e chapitre Sylvain, la narration les suit pendant 34 autres chapitres, non numérotés, essentiellement titrés par la chronologie des 19 et 20 mai. 22 chapitres se passent le dimanche 19, et 12 le lundi 20 mai.
   Dans L'enfant, après la rencontre de Lucie et Saint-A au 34e chapitre Lucie, la narration les suit pendant 34 autres chapitres, numérotés, en deux parties de 22 et 12 chapitres.
  On a ainsi dans les deux romans une narration extérieure couvrant 34 chapitres dans la 1e partie suivis de 34 autres chapitres clairement répartis 22-12. Il y a une courte 3e partie dans Derniers jours où Trinité reprend son récit à la première personne, non découpé en chapitres.

  Après le parallélisme de structure des deux romans, il s'impose de constater que les 34 chapitres de la 2e partie de Derniers jours poursuivent la logique fibonacienne des 34+21 chapitres de la 1e partie, avec diverses possibitliés de l'aborder:
- 34 chapitres Sylvain, 21 chapitres Trinité, 34 chapitres Sylvain-Trinité réunis; c'est l'occasion de rappeler que Luca Paccioli a qualifié phi de "divine" proportion parce qu'elle pouvait réunir les trois personnes de la Trinité...
- 2 parties de 55 et 34 chapitres;
- 34 chapitres numérotés et 55 chapitres non-numérotés.

  Il y a dans Derniers jours une certaine saturation du nombre 5, que les phibolâtres anglo-saxons nomment volontiers phive, parce que phi est défini algébriquement par (1+√5)/2, parce que le 5e terme de la suite de Phibonacci est 5, que tous les termes de rang divisible par 5 sont divisibles par 5...
  Bref on a:
- Prologue- 3 parties - Epilogue, 5 éléments;
- les 3 parties se déroulent sur 5 jours consécutifs de mai (5e mois);
- l'épilogue se situe 5 ans après ce mai désastreux;
- la première énigme concerne 5 bébés enlevés;
- cette énigme semble liée aux 5 singes blancs du Jardin des Plantes.

  Il faut tout de même aborder quelque peu l'intrigue. Sylvain est le fils de Gervaise Masson, directrice du Jardin des Plantes. Trinité est la fille de François et Hyacinthe Pucci (en hommage semble-t-il à un couturier dont NEO est fan), dans l'immeuble desquels est commis un rapt de bébé, que Trinité tente d'élucider.
  Sylvain comme Trinité découvrent des indices incriminant les singes blancs, que Gervaise aurait jadis trouvés dans une expédition en Afrique, puis le problème des bébés disparus passe au second plan lorsque une inondation cataclysmique frappe Paris. Lubin, le vieux gardien du Jardin des Plantes, fait à la fin de la 2e partie d'étonnantes révélations à Sylvain et Trinité.
  L'Ile-de-France était jadis peuplée par les Arcadiens, constitués de deux races vivant en parfaite entente, les sombres, décideurs, et les clairs, dociles serviteurs. Lors de l'invasion de la Gaule par les Romains, les Arcadiens se sont réfugiés dans de vastes cavernes sous la Seine et sous la Bièvre. L'eau de la Bièvre contient un principe lumineux permettant d'éclairer ce monde souterrain et d'y pratiquer l'agriculture... Les Arcadiens se sont coupés du monde extérieur pendant de nombreux siècles, puis les progrès en surface ont contraint les sombres à nouer des contacts avec certaines instances en surface, échangeant leurs connaissances contre des aménagements limitant les projets urbains, percement des égouts, réalisation du métro...

  Je soupçonne NEO d'avoir joué avec une variante de la formule Et in Arcadia ego, du genre Et in égouts Arcadia...
  Les cavernes magiques éclairées par le fluide de la Bièvre (dont le nom vient des castors qui y pullulaient jadis) doivent peut-être aussi quelque chose au personnage principal de La montagne magique, Hans Castorp. J'imagine que NEO, porté sur la grivoiserie (et qui le lui reprochera?), sait que l'anglais beaver, "castor", est une désignation argotique du sexe féminin, ce qui peut transparaître dans les mots de Lubin: la Bièvre... telle était leur vraie matrice, la source véritable de leurs bienfaits.

  Lubin révèle que les singes blancs sont des Arcadiens clairs, que la généticienne Gervaise Masson étudiait pour tenter de pallier à la dégénérescence frappant la race. Sa solution a été de croiser les clairs avec les humains, et c'est ainsi qu'elle s'est unie à un clair pour engendrer Sylvain, tandis que Lubin fécondait une claire pour engendrer Gabrielle, élevée avec Sylvain...
  La dernière partie, où Trinité reprend la parole, la montre descendre en Arcadie en compagnie de Sylvain, où elle trouve ses parents, qui sont en fait des sombres, les deux derniers sombres d'Arcadie, car la race est devenue stérile. La naissance de Trinité en surface a été un miracle... Toujours est-il qu'il y avait à côté des 5 singes blancs 5 autres Arcadiens à Paris, les 3 Pucci et les 2 hybrides Sylvain et Gabrielle.

  Un autre point important du roman est les peintures de Buffon, lequel aurait été l'un des premiers humains à visiter l'Arcadie. Il aurait créé le Jardin des Plantes pour y accueillir dans ses serres les frileux Arcadiens. Buffon aurait aussi peint quatre fresques inspirées par son séjour en Arcadie, tableaux bucoliques imprégnés du fluide de la Bièvre leur conférant une certaine magie, fenêtres vers un autre monde, idéal.
  Gervaise conservait ces fresques dans une salle secrète, mais Sylvain et Gabrielle en avaient trouvé la clé et passaient de longues heures à les contempler...

  NEO a recyclé ici une idée exploitée dans sa première fiction publiée, Le sourire des enfants morts (avril 2001). Dans cette nouvelle de 50 pages, il arrive entre les mains du falot Félicien Couderchet un livre de même nom, au texte abscons, contenant aussi les reproductions de 8 fresques et 8 adresses parisiennes.
  Félicien découvre les originaux des fresques à ces 8 adresses, et s'aperçoit qu'elles le transforment. Ce sont des paysages forestiers, qu'il peut contempler pendant des heures. Il découvre encore qu'elles sont orientées selon les 8 directions de l'espace, comme des fenêtres sur un monde de verdure...
  Je m'en tiens là quant à cette nouvelle, qui me semble bien plus réussie que Derniers jours, pour analyser le nom de celui qui aurait été choisi parmi tous pour contempler ces fresques:
FELICIEN / COUDERCHET = 63/102 = 21/34,
même rapport fibonaccien que les deux composantes de la 1e partie de Derniers jours, dont l'un des principaux mystères est les fresques bucoliques de Buffon, fenêtres sur l'Arcadie.

  Les initiales FC de Félicien Couderchet me rappellent que le sigle GMA & FAF (valeurs 21 et 13), principal mystère de Un assassin peut en cacher un autre, m'a évoqué la lettre grecque Gamma, devenue C dans notre alphabet, et la lettre hébraïque Waw ou Waf, devenue Digamma dans l'alphabet grec et F dans le nôtre.

   J'ai étudié dans le précédent billet certaines prémonitions du Onze Septembre en rapport avec des harmonies dorées. Le couple 63/102 m'évoque un épisode de Au-delà du réel diffusé en mars 1998, Glyphic (en français Le refus des autres).
  L'épisode débute par une naissance à Tolomey. Juste après l'accouchement, une femme s'empresse de modifier le nombre des habitants de la commune, 102. Le docteur Boussard lui dit qu'elle a été un peu trop rapide car il vient de mettre au monde des jumeaux.
  Au même moment les enfants du docteur, Cassie et Louis, repèrent un éclair lumineux dans le ciel qui s'éteint dans une caverne proche. Ils s'y rendent...
  12 ans plus tard un jeune psychiatre, Tom Young, se rend à Tolomey dont le nombre d'habitant a chuté à 63. C'est que tous les enfants sont morts (sans sourire) d'une maladie non identifiée, ou presque tous car ceux du docteur Boussard ont survécu, mais Louis est dans le coma tandis que Cassie est retardée. Le docteur Young établit qu'elle est en contact avec une intelligence extraterrestre qui connaît le remède à la maladie ayant frappé Tolomey, mais la méfiance des humains annihile cette volonté bienfaitrice.
  Le rapport avec NEO, ce sont bien sûr ces "enfants morts" qui font passer la population de 102 à 63.
  Le rapport avec SEPTEMBER-ELEVEN (= 103-63), c'est qu'il aurait dû apparaître POP : 103 au début de l'épisode, à cause des jumeaux.
 
  J'ai appris dans Derniers jours que l'axe Nord-Sud, ou cardo maximus, de Lutèce correspondait aujourd'hui à la rue Saint-Jacques.
 J'ai étudié dans le billet Coeur primitif les lettres ib, correspondant à une forme norvégienne du prénom Jacob, Jacques, et à l'hiéroglyphe égyptien "coeur". La kabbale associe en outre Jacob au "coeur" du système des sefirot.
  Le latin cardo, "pivot", est proche du grec kardia, "coeur".

  J'en viens à des coïncidences sans rapport direct avec NEO. Je publie ce billet le 8 septembre parce que c'est le 8e anniversaire de la découverte du 8/9/08 ayant initié Quaternité. Il s'agit du 212e billet, nombre m'évoquant la quine 131-212-343-555-898 aux remarquables propriétés (voir le billet Rêvolutions), avec en prime le 8/9/08 qu'il est possible d'écrire 8/9/8. J'ai eu la curiosité de regarder quel était mon 131e billet, et c'est Verbal corpse du 20/10/12 où j'explorais la structure dorée des 20 chapitres de Hasard de JMG Le Clézio, en 5 groupes correspondant  aux partages dorés des nombres de 2 à 6, selon chapitres titrés (B) et non titrés (A):
BBA BBBAA BA BBBBAA BBAA
  Lorsque j'ai appris que az-zahr signifiait "le dé", j'ai considéré que le titre du roman pouvait correspondre au 1, "face heureuse du dé", pour compléter les 6 faces:
BBA BBBAA BA BBBBAA BBAA B
  C'est d'abord à ceci que m'a fait penser la répartition des chapitres numérotés (B) et non numérotés (A) de la 1e partie de Derniers jours, notamment ses 21 derniers chapitres et je constate que ces 21 chapitres permettent un découpage très voisin de celui envisagé pour Hasard, le seul écart étant une répartition 3-5-2-4-6-1 au lieu de 3-5-2-6-4-1:
BAB ABBAB AB ABBA BABBAB B
  La valeur de "dé" seul en arabe, zahr, زهر, est 212 (où je lis aussi BAB).
 
  Ce 8/9/16 est aussi le 1/1/144 du calendrier pataphysique, entamant donc la 144e année depuis la Nativité de Jarry le 8 septembre 1873. 144 est le terme suivant de la suite de Fibonacci après 34-55-89 donnés par les parties 2 et 1 de Derniers jours. J'ai trouvé ici une représentation des spirales florales 13-21 (comme plus haut l'illustration Phibonacci) telle qu'une numérotation logique des intersections fait apparaître la suite de Fibonacci de part et d'autre d'un rayon:
  Les intersections sur les 21 spirales courtes sont numérotées de 21 en 21, celles sur les 13 spirales longues de 13 en 13, de façon donc entièrement déterminée dès qu'un seul nombre est placé (ici 144). J'observe que de part et d'autre de la ligne en pointillé, après la suite de Fibonacci elle-même, 144-89-55-34-21..., on trouve dans leur ordre de performance les autres suites additives, la double-Fibo 110-68-42..., la suite de Lucas 123-76-47..., la triple-Fibo 102-63-39 (vue pour Félicien Couderchet et Tolomey), la suite dite de Pythagore 97-60-37..., la suite 131-81-50... (dont le terme suivant serait 212), la quadruple-Fibo 136-84-52 (Haemmerli-Jung)....

  J'ai repris Les orphelins du mal pour en étudier la structure, Prologue et deux parties de 19 et 12 chapitres. 12 et 19 font partie de la série additive se poursuivant par 31-50-81-131-212..., la 6e suite additive vue ci-dessus. A la 7e suite appartiennent 52-84, valeurs de JUNG-HAEMMERLI que j'ai aussi rencontrées dans ce roman pour un personnage secondaire, l'oncle NATHANIEL (84) surnommé NATHI (52).
  Nathaniel Korb finance sans le savoir la forme ultime du Lebensborn imaginée par NEO, et j'ai eu la surprise de découvrir dans un autre roman exploitant le thème, Les cendres froides, une Juive se réfugiant dans un Lebensborn pour y accoucher d'un Théodore, forme grecque de Nathaniel.
  Consultant la bibliographie de NEO, j'y ai découvert Fin de race, où il est question d'une famille juive qui met son rejeton Nathaël à l'abri dans une institution privée, laquelle sera investie par des SS animés par un dessein mystérieux...

  Tiens, les 3 thrillers de NEO ont chez Pocket les numéros 13627, 14338 et 15245, somme 43210, Quatre, Trois, Deux, Un, Zéro !

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