17.7.22

il mit le mot âme dans La vie mode d'emploi


  Voici ci-dessous la représentation, annoncée dans le précédent billet, du dernier codage sympathique du mot AME, avec en évidence le message caché.
 

  Le message diagonal est donc:
il mit le mot âme dans La vie mode d'emploi
  On peut cliquer sur l'image ci-contre pour avoir une représentation plus proche d'un carré.
  Je ne doute pas que la plupart des lecteurs du précédent billet auront scruté la diagonale sénestro-descendante  du carré 43x43, aussi ce n'est pas pour faire un scoop que j'ai différé cette "révélation".
  La formule concoctée pour la diagonale a pour valeur 345, et il se trouve que le billet précédent était le 344e de Quaternité: il m'a semblé devoir ne pas manquer cette coïncidence.
  Le billet 344 peut aussi être significatif, car j'y étudiais les 4 niveaux de codage du texte final, or 344 est la gématrie du vocable hébraïque PaRDèS, "paradis", dont les 4 lettres servent aussi d'acronyme aux 4 niveaux d'interprétation de la Tora.

  Le nombre 345 m'a conduit à une curieuse constatation, à partir précisément du titre du "romans":
LA   M    E
  vie oded mploi
   3    4    5   
lettres
  L'AME est bien dans La Vie mode d'emploi, et pas seulement dans le Compendium... Je précise que je n'ai pas cherché à obtenir cette valeur 345. L'idée de départ était de construire une phrase de 11 mots couvrant 43 espaces. Je me suis arrêté à la première solution venue, et j'imagine qu'il n'y en a pas beaucoup d'aussi satisfaisantes.
  Le produit 3.4.5 égale 60, le nombre d'espaces-signes de chaque énoncé du Compendium.

  Au fait, pourquoi Perec a-t-il codé ce mot AME, dans ce résumé presque au centre du livre? Il avait révélé en 1979 que le texte obéissait à deux contraintes, l'une étant les 60 espaces-signes de chaque énoncé, gardant le silence sur l'autre, qui n'a été découverte que peu avant sa mort, en 1981.
  Le Cahier des charges révèle qu'il avait d'abord pensé à composer 5 strophes, avec pour diagonales les lettres A-M-E-C-S. Il est supposé que CS désigne Cyrla Szulewicz, sa mère, embarquée dans un train pour Auschwitz le 11 février 43.
  Perec aurait-il estimé que AME pouvait aussi exprimer l'idée de "mère"?, les phonèmes "a" et "m" apparaissant dans beaucoup de langues pour désigner la mère, peut-être parce que ce sont les premiers formulés par les bébés.

  On trouve notamment en estonien ema, en portugais mãe... Il est frappant qu'en hébreu, la langue des parents de Perec, que lui ne parlait pas, les lettres AME correspondent aux lettres hébraïques אמה, dont un sens est "mère".
 
  Ça se prononce 'ima. Je ne connaissais avant ce retour au Compendium que l'hébreu biblique אמ, 'em, et j'ai eu la curiosité de consulter un dictionnaire d'hébreu moderne. Je précise que notre alphabet dérive de l'alphabet sémitique, via le grec et le latin, et qu'il ne fait aucun doute que les lettres A-M-E sont issues des alef-mem-he hébraïques, elles ont d'ailleurs les mêmes rangs 1-13-5 dans les deux alphabets.

  J'ai expliqué dans le précédent billet pourquoi j'avais nommé Anna la candidate au pacte, en regrettant de n'avoir pas choisi Ana. En turc, "mère" se dit ana.

  Dans W ou le souvenir d'enfance, ce souvenir serait une lettre hébraïque qu'il aurait très jeune su tracer, ce qui aurait provoqué l'admiration des siens. Il y en a plusieurs versions dans les travaux préparatoires, et le graphisme finalement donné dans le livre est en fait fort proche du G qu’il utilisait comme signature, mais vu dans un miroir, latéralement, comme l'a vu Philippe Lejeune.

la signature de Georges et le graphisme donné dans W ou …
la signature de Georges et le graphisme donné dans W

  Il est au moins certain que le graphisme n'a rien à voir avec la lettre gimel, comme Perec l'avance; il rappelle plutôt mem, מ (ם en forme finale), ou éventuellement pe, פ. Bernard Magné a souligné que ça ressemblait à un carré ouvert dans le coin inférieur gauche, ce qu'on retrouve dans les clinamens perecquiens, l'écart du chapitre 66 correspondant au coin inférieur gauche de l'immeuble, l'omission du dernier vers du Compendium, le dernier E de la diagonale sénestro-descendante, le seul qui aurait été une majuscule.

  A propos de majuscule, le premier texte sur les diagonales du Compendium a été écrit par Philippe Guinet, un étudiant de Magné, en juin 1981 (mais c'est un autre étudiant de Magné, Dominique Bertelli, qui avait découvert ces diagonales). Dans ces 12 pages ronéotées, archivées à l'Association GP, à l'Arsenal, Guinet matérialise les diagonales par des majuscules, toutes les autres lettres étant minuscules. Hormis les derniers "vers" des strophes A et M, ceci permet de constater que le seul M originellement majuscule est celui de Méphistophélès.
 

  Les commentaires de Guinet sont souvent pertinents, et j'apprécie celui sur le hamster du vers 29: l'âme s'terre...
  Pour ce vers 74,
74 La jeune femme faisant conclure un pacte avec Méphistophélès
il souligne comme ailleurs la rime femme-âme, et rappelle que le pacte consiste à vendre son âme.
  Etrangement, il donne la forme correcte du vers 6, telle qu'elle est donnée sur le manuscrit de Perec,
6 Le faiseur de puzzle s’acharnant dans ses parties de jacquet
mais toutes les éditions ont "puzzles" au pluriel, portant le nombre de signes-espaces à 61, y compris la récente édition Pleïade, où une note indique que Magné avait signalé l'erreur à Perec, lequel avait dit que, si elle faisait sens pour le lecteur, il fallait peut-être la laisser.
  Il y a une autre anomalie pour le vers 104,
104 La petite parfumeuse choisissant les bagues du vieil artisan
où le "m" de parfumeuse est en position 16, alors que le codage demande la position 17. Guinet suggère de lire "par fumeuse", cette "par(t) fumeuse" étant l'âme.

  Philippe Guinet n'a pas eu l'occasion d'approfondir, car il est mort peu après lors d'une altercation pour une place de parking, devant le bar Le Diagonal, à Toulouse...

  Il voyait encore "E fait mère" dans "éphémère" du vers 163 (43e vers de la strophe E). Je note pour ma part 3 occurrences de "mère" dans le Compendium, chaque fois dans des mots composés, "belle-mère" vers 42, "déesse-mère" vers 49, "fille-mère" vers 124.

 Au 100e chapitre, devenu chapitre 99 par la suppression du chapitre 66, le lecteur comprend que la visite des 100 cases de l'immeuble s'est effectuée au moment figé de la mort de Bartlebooth:
  C’est le vingt-trois juin mille neuf cent soixante-quinze et il va être huit heures du soir. Assis devant son puzzle, Bartlebooth vient de mourir.
  Le vingt-trois juin à huit heures: j'ai déjà remarqué que les chiffres 23/6 et 8 correspondaient sur un cadran de téléphone à C-E-N-T, "cent" dans l'ordre, "sans" vraisemblablement que ce soit intentionnel, car ce moment est celui où Perec a fait la rencontre décisive de Catherine Binet.
  J'avais aussi vu que ces chiffres 2-3-6-8 livrent aussi 36-82, les années de naissance et de mort de Perec, et que les valeurs 36-82 correspondent au découpage voyelles-consonnes de Bartlebooth:
AEOO = 36; BRTLBTH =82.

  Ce que je n'ai pas su voir jusqu'à aujourd'hui, 16 juillet,  vers 3 heures de l'après-midi, c'est que "cent" se dit en hébreu מאה, se prononçant mea, s'écrivant avec les lettres correspondant à MAE dans notre alphabet.
  A l'origine de LVME, il y a la découverte en 1960 d'un carré bi-latin d'ordre 10, de 100 cases donc, objet mathématique qui avait précédemment été conjecturé impossible.
  Le 100e chapitre est aussi un compendium, en ce qu'avant de montrer Bartlebooth mort à son bureau, les événements se passant dans les autres lieux de l'immeuble sont brièvement rappelés.
  Je rappelle le portugais mãe pour "mère".

  Je me souvenais avoir écrit des anagrammes relatives au Compendium, à partir de "naissance et mort". Le 8 juillet, j'ai cherché dans les archives de la liste Oulipo, et les ai retrouvées:

âmes contraintes

c'est son art animé

en tacites romans

âmes contraintes

naissance et mort
  J'ai aussi cherché le mot "diable", ce qui m'a fait redécouvrir un message de Robert Rapilly, intitulé Diable !, et posté le 8 juillet 2013, exactement 9 ans plus tôt. Je me le suis renvoyé sur ma boîte mail.
  Il commémorait l'arrivée sur terre 66 ans plus tôt de l'extraterrestre satanique de Roswell par un texte de 66 lettres et 666 de gématrie:
Soixante-sixième anniversaire de l'affaire de Roswell ? Diable, ce jour amène ban !
  Robert m'a signalé qu'il en avait donné une version améliorée sur son blogue.

  Certaines choses sont fort difficiles à croire, mais je jure, et Robert peut en témoigner aussi, que ce 8 juillet 2022 il a posté un autre message intitulé Diable !, mais je n'en ai pris connaissance que deux jours plus tard, parce que je croyais que c'était le message que je m'étais envoyé quelques heures plus tôt. Aucun autre message avec pour seul objet "Diable" n'a été posté sur la liste de 1999 à 2022. Voici les deux messages sur ma boîte:
 

  Cet autre message Diable ! montrait 48 lettres qui, disposées en 8 rangées faisaient apparaître l'acrostiche ESPOSITO, et en 6 rangées le télostiche FARESE, les deux parties du nom de notre colistier Gef.
 

  Parmi d'autres énonces plus clairs, Robert a choisi celui-ci pour sa gématrie 666. Je me suis avisé ensuite que Robert ne l'avait envoyé qu'à Gef et à moi.

  J'ai cité plus haut le vers 74 du Compendium,
74 La jeune femme faisant conclure un pacte avec Méphistophélès
et remarque maintenant qu'il compte 9 mots, avec
9 x 74 = 666.
  Le nombre satanique est cité dans le chapitre 65, où le complice de la Lorelei qui incarnait Méphisto est prisonnier sous le matricule 1 758 064 176, soit
6 x 66 x 666 x 6666.

  Il y a 105 vers après ce vers 74, et
MEPHISTO = 105 (PHELES = 65).

  Si le mot AME est dans LA VIE MODE D'EMPLOI, comme vu plus haut, le nombre 179 des vers du Compendium s'énonce en français hexagonal 160 19 (cent soixante  -dix-neuf), or
LA VIE MODE D'EMPLOI = 160,
AME = 19.

  A propos d'Apocalypse, le mot vu plus haut  אמה, signifiant "mère" quand il est vocalisé 'ima, m'a rappelé que j'avais déjà vu ce mot dans la série Dig, où un complot vise à faire sauter le Mont du Temple à Jérusalem, et la mosquée Al-Aqsa, afin de pouvoir reconstruire le Temple, sans se soucier des conséquences apocalyptiques...
  Lors d'une fouille de l'appartement d'un comploteur, on découvre ce document  où figure 3 fois le mot אמה, ainsi que la valeur du mot, 46 (1+40+5). Le document n'est jamais commenté. Peut-être l'aurait-il été si la série n'avait été annulée, et recadrée pour aboutir à un dénouement rapide. 
  A mon humble avis, le contexte suggère qu'il s'agit du mot ama, "coudée", et son triplement pourrait évoquer le Saint des Saints du Temple de Salomon, un cube de 20 coudées de côté.
  J'ai donné dans le précédent billet les 1849 signes-espaces du codage final, en 43 rangées de 43 espaces. Comme je ne voulais pas y mettre en évidence la diagonale, j'ai choisi d'y colorer en rouge les 46 lettres AME livrant le mot AME au 4e décodage, sans penser alors à la valeur 46 des lettres hébraïques correspondantes (ou des lettres de notre alphabet selon le Français classique, une option offerte par le Gématron).
  En hébreu, l'expression "vingt coudées", עשׂרים אמה, a pour valeur 666. J'ai étudié ici le croisement de l'expression en clair, précisément pour une dimension du Saint des Saints, avec l'ELS trouvée par le "code biblique".
 
  Robert Rapilly a déjà été cité à plusieurs reprises dans Quaternité pour de formidables coïncidences.
  Il y a eu les 3 grilles en hommage à Perec publiés dans Formules n° 9 (2005), dont les 747 lettres totalisent la valeur 7647, évoquant
GEORGES PEREC = 76  47.
  Il y a eu sa grille ferroviaire FIVES-LILLE, avec sa colonne centrale contenant inconsciemment les lettres PRENOM NOM, comme une autre grille ferroviaire publiée dans ce même numéro de Formules.
  Il y a eu sa grille AIR A RAT, donnée sur la liste Oulipo alors que j'étais en train d'écrire un billet sur ARARITA...

Note du 19/7: Les textes Diable ! de Robert des 8/7/2013 et 8/7/2022 m'ont rappelé que j'avais aussi fait quelque chose en rapport avec 666. J'ai retrouvé ce que c'était.
  Un oulipote, Noël Bernard, a eu l'idée d'un thème journalier de contrainte inspiré d'abord par le calendrier pataphysique. L'année suivante ce fut le calendrier positiviste d'Auguste Comte. L'année dernière, Bernard Maréchal proposa les journées mondiales. A presque chaque jour correspond une journée mondiale, sauf un, et Noël décréta que ce serait la Journée du Mystère des Oulipotes.
  J'écrivis un texte pour ce jour, inspiré par le constat que l'expression comptait 28 lettres, nombre parfait (au sens arithmétique). Voici sa forme finale:

jeu puéril ou vaine anecdote
pour qui refuse l’élan mutin
tout ce fatras emberlificote
le rustre comme le philistin
les nicodèmes et les bigotes
l'indélicat y perd son latin
mystère opaque des Oulipotes

pour coder la fable rigolote
il se faut détenir un dessin
un fantasme su sans antidote
émotif on y vient et revient
étrange cuisine qu'on mijote
suivant l’aptitude de chacun
mystère intime des Oulipotes

pour la décoder tel numérote
tel rumine le texte oulipien
tel tire le fil de la pelote
tel surdétermine et à la fin
découvre comme ça se tricote
logique clé du trésor surfin
mystère vaincu des Oulipotes

qui n’a tête vide de linotte
avouera n'être qu'un ripolin
et pourra crier saperlipotte
je ne sais encore quel moyen
élargit au-delà des jugeotes
un écrit digne d’un magicien
mystère infini des Oulipotes
--
  Le premier jet avait 664 lettres de valeur 7941, proche du multiple 7992 de 666, et il m'a suffi de modifier le 20e vers,
il a la clé du trésor surfin
pour avoir 666 lettres de valeur 666 x (6+6).
  Il y avait une autre contrainte, révélée par une police à chasse fixe:
 

  Il s'agit donc d'un bathmostiche, comme mon codage final de "AME", et je n'ai pas composé d'autre bathmostiche depuis ce Jour du Mystère.
  Quel était-il? Le 8/7, prévisible dans son ironie même. Les autres textes composés pour ce jour sont sur cette page du site de Noël. Je n'ai pas souvenir d'avoir exploité le nombre 666 dans d'autres créations, et je l'avais fait ici parce que le hasard le suggérait.
  Alors en quoi le 8 juillet pourrait-il être une date diabolique? Je ne vois rien d'immédiat sur la page Wikipédia, sinon la naissance de Kevin Bacon, interprète de plusieurs rôles sulfureux.
  C'est le 189e jour de l'année, et je constate que Robert a posté ses deux Diable 666 à 9 ans d'intervalle, et moi mes 666 lettres 8 ans avant le premier Diable et 1 an avant le second.

 
  Voici ce qu'est devenu le Compendium dans la traduction en hébreu de LVME ('החיים הוראות שימוש'). AME est devenu נפשׁ, nefesh, l'un des mots pour "âme" en hébreu. La langue s'écrivant de droite à gauche, la diagonale devient dextro-descendante, ce qui pourrait trahir l'intention de Perec...
  J'ai fait figurer les premiers dizains de chaque strophe, car elles sont numérotées avec les lettres nombres, toujours employées pour certains usages (dates, versets bibliques). Ce sont donc les nombres א-ב-ג, soit 1-2-3, ce qui m'évoque la valeur 123 de GEORGES PEREC.
 

  Note du 23: Dans sa traduction anglaise de LVME, David Bellos a choisi de rendre AME par EGO. Il m'est venu que, de même qu'on passe des lettres hébraïques AME, "mère", à MAE, "cent", par permutation des premières lettres, on passe de EGO à GEO, les premières lettres du prénom GEORGES.
 
 

sympathie vers Méphistophélès

pour Anna

  La liste Oulipo s'est penchée en mai et juin dernier sur la contrainte sympathique, proposée en 2003 par Alain Chevrier. Au départ, il s'agissait de produire des textes où chaque mot devait partager au moins une lettre avec le ou les mots adjacents. Tiens, la liste Oulipo est gérée par Sympa (SYstème de Multi-Postage Automatique).
  La nouvelle approche a formalisé la contrainte. La 1-sympathie stricte consiste en ce que deux mots voisins aient une lettre en commun, mais pas plus. Puis vient la 2-sympathie stricte, etc. Gef a proposé quelques textes ici.
  Une autre idée est de composer un texte par les lettres communes, et Gef proposa le 6/6 un sonnet 1-sympathique strict codant pour les 111 lettres d'un verset du Cantique des cantiques. Le sonnet est loin d'être aussi lisible que beaucoup d'autres créations de Gef, mais il s'agissait d'abord de montrer la faisabilité de la contrainte, et j'envisageai aussitôt une réalisation sympathique à plusieurs niveaux.

  Un texte A coderait pour un texte B, lequel coderait pour un texte C, jusqu'au texte E, nécessairement le plus court possible. J'ai vite choisi "âme", en pensant au Compendium de La Vie mode d'emploi (LVME), où Perec a codé 60 fois ce mot dans 3 "strophes" de 60 "vers" de 60 espaces typographiques chacun.
  La 1-sympathie stricte demandant plus de 4 lettres en moyenne pour en coder 1, il était envisageable que mon texte A final compte environ 1500 lettres, ce qui était compatible avec une autre contrainte envisagée, nécessitant 1849 espaces typographiques.
  Je suis parvenu sans peine à coder le mot "âme", en 15 lettres:
Sans mal, Rémi code
Vérification sur l'outil proposé par Gef

  Plusieurs tentatives ont échoué pour l'étape suivante, principalement parce que la contrainte est plus difficile qu'il n'y paraît, mais aussi parce que je n'avais aucune idée directrice.
  Je décidai d'abandonner le projet.

  Et vint l'affaire Palau, détaillée dans le précédent billet. L'acteur Palau a joué aussi bien Faust, vendant son âme au Diable (Yves Montand), que le Diable, achetant son âme à Maximus Léo (Pierre Fresnay).
  Les Palau vont en enfer, et il m'a semblé devoir revenir au labyrinthe où je m'étais enfermé, et essayer d'en trouver l'issue.

  D"autant que le Diable est présent dans LVME, et plusieurs exégètes ont étudié sa présence dans plusieurs chapitres, alors qu'aucune contrainte ne le concerne.
  Je me suis particulièrement intéressé au lien entre LVME et L'adversaire, d'Ellery Queen, où cet adversaire se révèle être le Diable.

  J'ai aussi commenté à diverses reprises une curiosité: le chapitre 1 (ou 01) a pour coordonnées 66 sur la grille 10x10 représentant l'immeuble, et Perec a décidé de ne pas écrire le chapitre prévu pour la 66e position, chapitre qui aurait eu pour coordonnées 01.
  Perec a fait une déclaration obscure à propos de l'élimination de ce chapitre 66, indiquant que le Diable devait y apparaître, or le principal sujet du chapitre 65 est l'entreprise de la Lorelei, une Américaine installée au début des années 50 rue Simon-Crubellier, où elle faisait payer des fortunes à des clients désireux de signer un pacte avec le Diable. Elle les mettait en présence de Méphistophélès, un complice qui leur faisait signer le pacte de sang...
  Le précédent billet m'a fait découvrir
MEPHISTOPHELES = 170, et
MEPHISTO  PHELES = 105  65, avec
105/65 = 21/13, mes Fibos fétiches.
  Or, dans ce chapitre 65, les deux formes Méphistophélès et Méphisto sont employées.

  Ceci m'a conforté dans l'idée d'aller au bout de mon idée sympathique, d'autant que la "sympathie" est manifeste pour Méphisto, qui possède 7 lettres en commun avec ce mot.
  Je verrais bien une diablesse nommée Méphistya... De fait, un jeu de rôles connaît une comtesse Méphistia.

  Bref, il m'a fallu adapter les règles du codage sympathique, et voici ce que j'ai décidé:
- lorsque plusieurs lettres du texte à coder sont en ordre alphabétique, je m'autorise à utiliser deux mots seulement pour les coder;
- je m'autorise aussi à employer la 0-sympathie, ou "contrainte du snob", pour faciliter l'intelligibilité des textes.
  Plus simplement, le message codé sera l'ensemble ordonné des lettres données par l'outil de Gef, appliqué au texte codant, pourvu de choisir un degré de sympathie suffisant. 26 permet de toujours afficher les lettres partagées entre mots successifs (mais je n'ai pas dépassé la 4-sympathie).

  J'ai conservé mon premier codage,

Sans mal Rémi code


et j'ai réussi à coder ces 15 lettres en seulement 13 mots, et 54 lettres:

Si lasse, Anna signe MUS, moral larvé: Eh, mon maître, illico, code idem.


  La candidate au pacte se prénomme "Anna", parce qu'elle code pour un "a" et un "n". Après coup, je me dis que j'aurais pu économiser une lettre avec "Ana", ou "Ann". Le code par lequel elle doit signer est "MUS", pour coder un "s" et un "m", et les voyelles "i-e-a" étaient interdites. C'est après coup que je me suis avisé que Anna Mus est proche de animus, "âme" en latin, et qu'elle pourrait se présenter par un palindrome:
Sum Anna, Anna mus (je suis Anna, Anna la souris).
 
  Pour l'étape suivante, je suis parvenu à 48 mots et 196 lettres:

Mais, s'il allait sans sûr socle, Rémi vanta, dans un rare cas si original, gêne mutée, MUS signé. Promo, amour, bal, le lot arrive, avatar né et déchu mollah, nom en jump, amitié, riant rêve, miel... Il le dit: voici contrat, code déifié. Ils devront, dame, mourir.


  Sachant que l'étape suivante serait difficile, j'ai fait au plus court, évidemment au détriment du sens, afin d'avoir plus de libertés pour le texte final.
  S'il y a certainement moyen de mieux faire, à chaque étape de ces codages, je signale que je n'ai pas souvenir de texte (court) m'ayant demandé plus de temps de réalisation. J'aimerais donc passer à autre chose, et je m'arrête donc à ce texte final de 337 mots et 1401 lettres, que je fais suivre de ses 4 décodages.

Rémi mata la miss siliconée, star. Il glapit à l'allumeuse, l'ami fatal: Si rationnelle tu es, sais-tu, ange Anna, que par mes dons spéciaux tu verras fuir Satan. Sois mon ciel pascal, refonde pure foi. En réalité, mon amie, vis voracement, tant il faut aimer. Tu adhéreras donc au pacte divin, sans risque, un grand rêve s'approche, fulgurant. Ce valable discours calma Anna. Heureuse, s'avisant godiche, ou décervelée, rosissant, elle dit: Il faut signer, là, me garantir digne aval, gala dingue, et amour. Ni hargne veule, ni mur mutilant. De toi, étrange homme, j'espère la fécondité. Marque MUS sans hésiter, ici, mets-y ton âme. Si tu signes, gagnant, si tu fais le mauvais écho, perdu. Parlons, fou sympa, de MUS, ce nom optimal à vos yeux. Moi, mon réel nom est Ukvol, Uqbar prononce-t-on, débat snob. Ali Qaleb, l'émir de Ykvol Uqbar, me cloitra longuement, bavard racé brun. Ali m'appelait houri, je vivais, élève souris, le sauvage violait. Anna, tu étais la souris, car, en latin, mus, c'est ça. Le dé! cornu diable de Schulz! Chu mon moral, l'alias Uqbar, eh! chassons nom miteux en nous! Et jouir, Judas, empoté impur, avec ma mine, partir, et il vient, leur croix sainte rôdant, rêve venteux, mer. Ami redis-le. Il le redit, divulguant verso: On vit si férocement, c'est nigaud, il faut miser coup confiant, entre roublards. Va, ose, tu connaîtras le constant code de prédilection. Si tu signes, faut griffer ici en bas, c'est là. Ce petit canif, tu vois, c'est un scalpel, il permet, sans risque d'oedème et d'inflammation, d'affranchir l'insistant oeuvre. Vas-y! la piqure sans regret affranchira l'accord. Elle dit: Que mon être s'efface! j'ai honte, quoi, j'ai peur d'un engagement tu, j'aimerais donc aller tout de go, dire d'emblée oui, ça galope! M'acheminer où? Vers tout, le symbiotique amour, le road trip, le vrai reposoir.

Mais, s'il allait sans sûr socle, Rémi vanta, dans un rare cas si original, gêne mutée, MUS signé. Promo, amour, bal, le lot arrive, avatar né et déchu mollah, nom en jump, amitié, riant rêve, miel... Il le dit: voici contrat, code déifié
. Ils devront, dame, mourir.

Si lasse, Anna signe MUS, moral larvé: Eh, mon maître, illico, code idem.

Sans mal, Rémi code

AME


  Je ne chercherai pas à justifier tous mes choix, car beaucoup sont dus à ma paresse ou à ma lassitude.
  Il est certain que ce dernier texte demanderait à être divisé en alinéas, pour marquer les interventions respectives de Rémi et d'Anna, mais ceci m'était difficile à cause de l'autre contrainte de ce texte final, devoir compter 1849 espaces typographiques.
  Pourquoi 1849? parce que c'est le carré de 43, permettant une représentation "carrée" du texte, avec une police à chasse fixe. Certes la réalisation qui suit n'a rien de carré, car le format du blog interdit d'espacer les caractères pour y parvenir.
  La raison du choix du carré de 43 sera donnée dans le prochain billet.

  Voici donc le représentation en lignes de 43 caractères. J'y ai mis en rouge les lettres qui conduisent au AME final. Il devrait y en avoir 48, il n'y en a que 46 grâce à une économie au précédent codage, ou le texte source offrait deux "e" successifs.


Note: Je m'aperçois (avant que Gef ne me le signale) que mon texte final omet le codage du 38e mot, "il", du texte précédent. On va dire que c'est mon clinamen, et que ce IL représente PEREC=47, puisque le texte final ne code que 47 mots.
  Je pourrais probablement corriger, mais le texte a subi déjà tant de triturations qu'il ne m'est plus du tout sympa... A propos du passage le plus abscons, "leur croix sainte rôdant, rêve venteux", je me suis avisé ensuite que EOLE apparaissait verticalement (sur le "O" de "rôdant"); les 4 vents sont aussi les 4 niveaux de l'âme...

Note 2 heures après la note précédente: Il m'est souvenu que, dans L'art du X écrit en hommage à Perec, où il est aussi utilisé un codage diagonal, par mots, Ricardou a volontairement omis une phrase codant un "il", 74e mot du paragraphe initial de 96 mots. Je crois avoir expliqué pourquoi, ou au moins comment, ici.
  Mon "il" oublié correspond aux lettres 147-148 du texte précédent, et 148 c'est deux fois 74.
  La chose ahurissante, c'est que, dans cette partie IV qui comptait dans la 1e édition 95 phrases, il a été oublié une phrase dans la 2e édition, codant pour un autre "il", 65e mot du paragraphe initial. Satan s'en mêle encore, avec le Méphistophélès du vers 74 du Compendium qui fait allusion au chapitre 65 de LVME...

6.7.22

Faust y met les fesses


  Dans le récent roman de NEO (Nicolas d'Estienne d'Orves), Ce que l'on sait de Max Toppard, se mêlent personnages réels et fictifs, les noms de ces derniers étant pour la plupart empruntés aux personnages ou acteurs du feuilleton Belphégor de 1965. Ainsi de Toppard lui-même, le récitant de Belphégor étant Jean Topart.

  Avant de découvrir ceci, je m'étais demandé si René Graindorge, "pape du Nouveau Roman", ne faisait pas allusion par anagramme à Gen Rigardo, Jean Ricardou, "chef de file du Nouveau Roman", ce qui m'avait fait choisir pour titre D'un grain d'orge à Gen Rigardo.

  Mais Graindorge est le nom d'un personnage du feuilleton. Je me suis demandé quel rôle il y jouait, et ai trouvé la réponse ici. Il n'apparaît qu'au tout début, aux Puces de Saint-Ouen. Après un survol des étalages, commenté par Jean Topart, la caméra se fixe sur André Bellegarde (Yves Rénier), disant à un ami: "L'avion supersonique, la fusée dans la lune, ça l'épatait pas, ce qui l'épatait, c'étaient les coïncidences."
  Un vieil homme se manifeste alors, Graindorge: "Madame votre mère avait raison." Pour Graindorge tout est lié, comme une île qui, si on enlève l'eau, est liée à la terre. Il emmène André chez lui, où il stocke des milliers d'articles de journaux dans des boîtes de conserve. Ce sont des fait fortéens, comme ces "empreintes de ventouses sur l'Everest". Pourquoi la Science ne s'en occupe-t-elle pas? Parce qu'ils sont invraisemblables. Qu'importe qu'ils soient invraisemblables s'ils sont vrais.
  André objecte que les fait cités sont dans des contrées lointaines, et Graindorge lui montre alors un article sur l'apparition d'un fantôme dans la galerie des Glaces de Versailles, le 3 août 1925.
  André passe devant l'immeuble de Graindorge peu après l'apparition de Belphégor au Louvre. On embarque un cercueil dans un corbillard, et André apprend qu'il est mort au moment exact où était tué le gardien Sabourel. "Une coïncidence", dit son interlocutrice, "Y a-t-il des coïncidences?", s'interroge André.
  "Gen Rigardo" a étudié les coïncidences dans les écrits des autres et les siens.


  Çoeur dp a attiré mon attention sur l'acteur incarnant Graindorge, Pierre Palau, né le 13 août 1883, dont c'était l'un des derniers rôles.
  1883, 13/8, ou 8/13 à l'américaine, un jour important pour les cinéphiles car Hitchcock est né un 8/13 (1899).
  Est-ce exprès si Truffaut a débuté ses fameux entretiens avec lui le 8/13/1962?
  Est-ce par hasard s'il a truffé ses propres films de "813"; j'ai récapitulé les occurrences du nombre fétiche dans 10 de ses films ici.
  Tiens, son dernier film (où il y a une chambre 813) est sorti la semaine du 13 août 1983, qui aurait été le 100e anniversaire de Palau (mort le 3/12/1966); c'est une adaptation d'un roman de Charles Williams, né un 8/13 (1909).

  Truffaut a assuré que le nombre 813 était pour lui un hommage au roman de Leblanc. C'est une autre curiosité que Palau ait aussi été un dramaturge, auteur d'une adaptation du Chapelet rouge, de Leblanc.
  Palau est aussi le co-auteur de la pièce Les Détraquées, mentionnée dans Nadja de Breton. L'autre auteur est Babinski, celui du fameux test.

  Palau a joué le rôle de Faust dans Marguerite de la nuit; d'Autant-Lara (1955), où Méphisto, alias monsieur Léon, est incarné par Yves Montand.
 

  C'est une transposition moderne du mythe, où ce Georges Faust descend cependant du "vrai" docteur Faust, né en 1480. Cette date, ou plutôt ce nombre, m'est évocateur, et j'ai vérifié que le réel Faust était effectivement né en 1480.
  1480 est la valeur du grec τελεσφορος, Télésphore, enfant-dieu de la convalescence, que Jung a représenté au centre de la pierre de Bollingen, gravée pour fêter sa guérison de 1944. Je me suis ébahi en 2009 de trouver des demoiselles Jung habitant le n° 1480 d'une voie rurale de la commune d'Aiglun.
  1480 est encore la valeur du grec Χριστοσ, Christ, ce qui est souvent commenté par les exégètes numérologues, en relation avec la valeur de Jésus, 888 (1480/888 = 5/3). Jésus est associé à Noël, renversement de Léon, nom du représentant du Diable dans le film.

  12 ans plus tôt, Palau avait incarné le Diable, ou son envoyé, dans un film de Maurice Tourneur, La main du Diable, inspiré par une nouvelle de Nerval et par le mythe du pacte avec le Diable. Le rapin Roland Brissot (Fresnay), ne croyant ni à Dieu ni à Diable, achète par jeu une main supposée magique, et qui l'est effectivement, car elle l'amène au succès avec des tableaux qu'il signe Maximus Léo.  S'en est-on souvenu pour baptiser Léon le démon de Marguerite de la nuit? C'est un malfrat dont un complice se nomme Angelo, tandis que Brissot achète la main à un restaurateur qui se sait damné s'il n'arrive pas à s'en débarrasser; il a un employé nommé Ange qui tente d'empêcher la transaction.
  Le Diable joué par Palau est un petit homme insignifiant.
 

  La suite de l'histoire révèle que la main magique est passée "de main en main" au cours des siècles, et qu'au départ elle était celle d'un moine du 15e siècle, Maximus Leo précisément, qui l'avait reçue de Dieu, mais qui avait refusé de l'utiliser, préférant consacrer sa vie à la prière. A sa mort, le Diable la lui avait volée, et il n'avait donc aucun droit à l'échanger contre l'âme de ses clients.
 

  Le peintre parvient à retrouver la tombe du moine, et à restituer l'intégrité de son corps, mais y laisse sa vie.

  Ce nom latin peut souligner le voisinage des mots manus, "main", et animus, "âme", à un iota près. Incidemment, l'allemand Faust signifie "poing".

  Une des grandes adaptations du mythe de Faust est La beauté du diable (1950), de René Clair, où l'échange joue à plusieurs niveaux.
  Méphistophélès y apparaît d'abord au vieux professeur Faust (Michel Simon) sous l'apparence d'un beau jeune homme (Gérard Philipe). C'est gracieusement que Méphisto accorde à Faust la jeunesse, comptant que l'expérience le conduira à signer le pacte, ce qui ne manquera pas d'arriver.
  Ayant donné à Faust le corps du beau jeune homme, Méphisto prend l'apparence du vieux Faust, et tous deux seront associés dans de nombreuses scènes du film.
 

  Comme dans d'autres adaptations, les pouvoirs du démon sont limités, et, alors que Faust et Marguerite semblent dans une situation désespérée, un retournement survient, et c'est Méphisto qui est écharpé par la foule. Le précieux pacte est détruit, libérant Faust de son engagement.

  Méphisto ou Méphisto-phélès. Le nom semble dérivé du grec et signifier "aimant l'obscurité" (ou la "non-lumière"). Certains spécialistes voient une même origine au grec φως, phôs, "lumière", et au latin faustus, "heureux". La gématrie livre
MEPHISTOPHELES = 170, et
MEPHISTO  PHELES = 105  65, avec
105/65 = 21/13, mes Fibos fétiches, que j'ai notamment trouvés dans
HAEMMERLI / JUNG = 84/52 = 21/13.

  J'avais remarqué ici que le nom du médecin qui a sauvé Jung en 1944 pouvait livrer
EMMA = 32, la femme de Jung, et
H(e)ILER = 52, "guérisseur".
  Je remarque aujourd'hui que EMMA se renverse en AMME... Est-ce à dire que Jung aurait vendu son âme en 44, à 68 ans, pour obtenir une tranche de vie supplémentaire de 17 ans? Si ce serait aller un peu loin, il est au moins certain que le mot était significatif pour Jung, témoins certains de ses titres:
L'homme à la découverte de son âme
Métamorphoses de l'âme et ses symboles
Problèmes de l'âme moderne
L'âme et la vie


  Bien sûr, l'âme c'est en allemand die Seele, mais la synchronicité est polyglotte, et j'ai songé à titrer ce billet
les mots c'est festif,
autre anaphone (anagramme de phonèmes) de Méphistophélès, mais Faust y met les fesses est plus immédiat.

  Sur le partage doré de 170 en 105-65, j'écrivais dans mon 170e billet:
 Non seulement la valeur 170 est en base 4 le nombre 2222, premier résultat de cette recherche, mais son partage d'or 65/105 s'exprime par deux palindromes, 1001 et 1221.
  65 et 105 sont les 5/4 de 52 et 84, valeurs de JUNG et HAEMMERLI, encore dans le rapport 13/21 que je rencontre si souvent.
  Il se trouve que le rebond Méphistophélès apparaît en une année où il y a eu un 2/2/22.

  Il ne m'était pas indifférent à l'époque que les nombres 105 et 65 soient dans un rapport 5/4 avec les 84 et 52 de Haemmerli et Jung, le fameux "échange" ayant permis à Jung de voir sa vie allongée d'exactement un quart des jours qu'il avait vécus jusqu'au 4/4/44.
  Le nouveau contexte "diabolique" m'amène à remarquer l'équivalence avec l'américain
SAVIOR = 84, "sauveur", désignation du Christ, vs
DEVIL = 52, "diable".
  J'avais souligné que Haemmerli avait effectivement sauvé Jung, et noté ici que les deux formes savior et saviour apparaissaient dans les anagrammes de Vocalisations, composées par des auteurs américains et anglais. Comme
SAVIOUR = 105, je me suis demandé s'il existait un nom satanique de valeur 65.
PRINCE = 65 pourrait convenir, puisque Satan est le Prince of Darkness, ce qui serait aussi exprimé par le nom Méphistophélès.


  A propos d'échanges, j'ai découvert le 2 juillet une affaire de crime en chambre close, un sujet que j'affectionne, Vol AF 747 pour Tokyo, de Nils Barrellon (2021).
  C'est un petit polar sympathique, 230 pages, reposant par rapport aux pavés assenés par les maîtres du genre.
  Le commandant Pierre Choulot prend l'avion pour Tokyo avec sa femme, voyage offert par ses collègues flics pour son départ en retraite. Au cours du voyage, le commandant de bord Joël Puis-Bausec se trouve seul dans le cockpit, et adresse par le téléphone du bord un inquiétant message au chef de cabine. La porte menant au cockpit est bloquée, et lorsqu'elle se débloque on découvre le commandant mort, d'une blessure à la gorge qu'il aurait pu s'infliger lui-même, mais il y a quelques détails qui clochent.
  Personne n'a pu sortir du cockpit depuis le message du commandant. Il y a normalement trois personnes dans le cockpit, mais le copilote Josselin Nunceti a eu un malaise au début du vol, et repose dans une cabine, tandis que le commandant a ordonné à l'autre copilote, Noé Taum, d'aller vérifier quelque chose dans la soute électronique.
  Les interrogatoires menés par Pierre Choulot pourraient permettre à un lecteur futé de comprendre ce qui s'est passé. Les équipages sont composés de gens qui ne se connaissent souvent pas du tout, et le commandant a profité de sa vague ressemblance avec Noé Taum pour le tuer, échanger leurs galons et casquettes, sortir du cockpit après avoir bloqué le système de verrouillage de la porte avec un stylo, lequel sauterait à la prochaine turbulence, et appeler le chef de cabine d'un autre poste. Je passe sur les détails.

  Je suis arrivé à la solution sans éplucher les indices de l'enquête. Un passager auteur de polars se nomme Yann Codole, où je lis assez immédiatement Conan Doyle. Une passagère observatrice se nomme Cathie Sarghati, Agatha Christie... Quand au flic Pierre Choulot, c'est bien sûr Hercule Poirot, ce qui est d'ailleurs révélé dans les remerciements en fin d'ouvrage.
  Ainsi, les noms plutôt bizarres des protagonistes livrent
- Noé Taum = on m'a tué;
- Joël Puis-Bausec = je suis coupable;
- Josselin Nunceti = je suis l'innocent.

  D'autres personnages ont des noms aisés à décrypter, mais certains me sont restés impénétrables, Linnet Ducrêt, Albert Loulié...

  Le nom Noé Taum a attiré mon attention pour une autre raison, car
NOE TAUM = 34 55, deux nombres de Fibonacci consécutifs.
  Le récent billet Le complot m'a conduit à
SATAN = 55,
et je me demande donc s'il existe des noms divins de valeur 34. Précisément, Satan vient de l'hébreu satan, "adversaire", et une désignation de Dieu en hébreu est adon, "Seigneur", dont la translittération donne selon notre alphabet
ADON = 34.
  satan devient chaytan en arabe, où Dieu est
ALLAH = 34 (toujours selon notre alphabet).

  A propos de meurtre en chambre close, j'ai imaginé récemment le sonnet hermétiquement clos.
  C'est Alexandre Carret, déjà mentionné dans le précédent billet, qui m'en a donné l'idée, avec un sonnet publié le 1er juillet sur la liste Oulipo. Il était basé sur un premier vers de 28 lettres,
  Ô, Léo déroba couverts et assiette
  Les 14 premières lettres étaient reprises en acrostiche dans des vers isocèles, dont les finales donnaient les 14 autres lettres. Le dernier vers était un anaphone du premier, offrant hélas peu de sens. Incidemment, j'ai pris connaissance de ce sonnet exactement après avoir capturé l'image Maximus Léo donnée plus haut.
  Ceci m'a donné l'idée de partir d'un palindrome, répété au dernier vers, ainsi le sonnet serait ceint par un cadre formé d'une expression de 14 lettres, à lire dans tous les sens...  Un "lieu cerné en recueil", comme palindromisait Stéphane Susana.
  J'ai posté quelques heures plus tard un sonnet ainsi composé, et me suis avisé ensuite qu'il comptait 96 mots, soit le nombre de pieds des quatrains d'un sonnet d'alexandrins.
  Ceci me donna l'idée d'écrire un autre sonnet sur le même principe, mais en 72 mots, le nombre de pieds des tercets du sonnet, avec une pensée pour le Billet de loterie n° 9672, prédit gagnant longtemps à l'avance, et sortant effectivement à la loterie nationale norvégienne dans le roman de Jules Verne, lequel taquinait volontiers la muse et a composé de nombreux sonnets.
  Il se trouve que mon 72e anniversaire tombe ce 6 juillet, et j'ai attendu ce jour pour composer le sonnet, avec néanmoins une idée pour le palindrome initial (et final, et acrotélostiche).

  Voici les deux sonnets:

relever as... rêver revers à révéler
ê
tre celui qui va vers le terme celé
l
evant par son désir le voile boréal
e
nsemençant du coup la limite idéale

v
iser la pureté de ce lent leitmotiv
e
t cette dérision partout définitive
r
égir en décidant de jamais n'ériger
a
ucun observatoire au bord du Lapojä

s
i j'ai redéfini l'alibi des erreurs
r
éalisé le soi je viens en éclaireur
e
n mystique lassé de fuir l'inachevé

v
oici qu'est avenu le règne de Kokav
e
t que se dépérit le déni du concave
révéler as... rêver revers à relever


récuseras-tu, las, saluts à resucer
e
nvieras-tu la loi du regret exaucé
c
ommandant nominé devenu caoutchouc
u
nique Sinatra du Candidat Mandchou

s
i sans enlisement tu conjectureras
ê
tre suprasensible, être privilégié
r
andomiseras-tu tel écart langagier
a
u ressort incertain du tradéridéra

s
elon la punition des amis gabelous
t
u remaquilleras ton reconnu statut
u
nanimement clos, ce profil andalou

l
argement impliqué, démenti tapecul
a
nniversaire échu. ton écot nonupla
saluts à récuser, resuceras-tu, las

  Dans le premier sonnet, j'ai imaginé le fleuve "Lapojä" pour rimer avec "ériger".
  "Kokav" est le nom hébreu de Mercure ("étoile"), avec une pensée pour le Redeunt Saturnia regna de Virgile.
  Je suis moins satisfait du second sonnet. La limitation du nombre de mots n'y simplifiait pas la composition, et je me suis imposé aussi d'avoir 6-7 mots aux deux premiers vers, les 50 mots suivants s'achevant sur "anniversaire échu.", pour exprimer ma date de naissance, 6/7/50.
  John Frankenheimer a réalisé en 1962 The Manchurian Candidate (en français Un crime dans la tête), avec Sinatra, histoire d'un militaire américain qui a subi un lavage de cerveau par les Chinois. Incidemment, une coïncidence "2222" concerne le remake du film en 2004.
  Frankenheimer a aussi réalisé en 1966 L'opération diabolique, au scénario faustien. J'en parle ici, ainsi que d'une approche similaire récente.

  Les 96 mots et 416 lettres du premier sonnet ont, par hasard, la gématrie palindrome 4664.
  Ceci m'a fait décider une autre somme palindrome pour les 72 mots du second sonnet, et je suis arrivé à 5005, en modifiant légèrement à partir de la somme 5027 du premier jet. J"aurais préféré 5335 qui aurait conduit au total 9999 pour les deux sonnets, mais il faudrait tout remanier. Néanmoins le total 9669 a son charme...
...et je m'aperçois en relisant de sa proximité avec 9672, le nombre visé au départ par les mots, 96-72, ce qui me fait modifier un mot du vers 5 du second sonnet pour arriver à la valeur 5008, et donc au total 9672 pour les deux sonnets ("enlisement" était précédemment "enjôlement").

  Sans absolu calcul, le second sonnet a 424 lettres, palindrome, ce qui avec les 416 lettres du premier mène à 840, ainsi les 168 mots des deux sonnets, décidés au départ, se trouvent avoir une moyenne exacte de 5 lettres par mot, ce que je n'ai vu qu'après coup.