29.11.18

Novel Roman se fait vieux


Chapitre 18: RICHE DRAME D'HERITER
  Dans le projet de 1998, la conclusion de Novel Roman était fort similaire à ce que j'ai finalement réalisé, à ceci près que la dernière phrase que j'envisageais alors me semble aujourd'hui d'une telle niaiserie que je me garde d'en dire plus.
  L'idée de la nouvelle dernière phrase m'est venue en écrivant le chapitre 17. Elle peut laisser entendre que Alban Lenoirc, devenu Noël Navrom, serait maintenant un adepte des idées de Nolven Amor, grâce peut-être à ses conversations avec ses nouveaux amis, peut-être d'autres adeptes...
  Mais ce n'est qu'une possibilité.

  La table des chapitres est maintenant complète, la voici sous forme de carré:

AVECUNDEBUTCOMMECA
BILANLETALEDULCORE
CEJEUBRIDELARAISON
DOSESDANAGRAMMESLA
ELLECHERCHAITNOISE
FATALEAUBEENEGYPTE
GRIFFELESAMBIANTES
HONOREDEVALMONDADA
IDEALELAVALENAMOUR
JAMAISELMONEDEROGE
KEPIIMPECENLOUCEDE
LELUDEPIDUODECIMAL
MIRAGEDELAVIEAUMAX
NORMCEDEADIEUNEANT
ORPHELINIMPLACABLE
PUEZARFALLHAGARMAD
QUEDORANNEEDELAFOI
RICHEDRAMEDHERITER

  Je rappelle que chacun des 18 titres est en 18 lettres de valeur 171, somme des 18 premiers nombres.
  Par ailleurs la première colonne est composée des 18 premières lettres, de valeur 171 encore.
  Les deux diagonales forment des messages, de valeur 171 encore. Le premier est Ai-je ce LEVON de NAMOR ?, l'autre Arsène blâmé pécheur. J'aurais probablement pu faire mieux, mais ceci a été trouvé assez hâtivement, à partir des premiers titres envisagés pour quelques chapitres.
  La première diagonale utilise les renversements de NOVEL et ROMAN, alors que je ne savais pas encore que les initiales des 4 héritiers formeraient le nom LEVON de leur auberge. L'autre fait allusion à PAULE SINNER dans Les milliards d'Arsène Lupin, traduit
PAULE LA PECHERESSE = 171.
  Enfin la dernière colonne est composée de 18 lettres de valeur 171. Je n'ai pas cherché à y donner un sens, mais l'apparition du mot REEL n'y est sans doute pas fortuite, si je me souviens bien, de même que la présence de la lettre X, cruciale. Après coup, j'ai cherché des anagrammes, comme l'a fait Ricardou avec la dernière colonne de son carré.
  L'abondance des voyelles, 10 sur 18 lettres, complique la tâche, mais voici quelques possibilités:
l'Eden aéré extasiera
sexe d'âne et rare laie
air, sérénade exaltée
Arsène axe l'aride été
an, taire l'ère désaxée
tirée, Danaé se relaxe
Etc.

  Y aurait-il des messages imprévus dans la grille? J'ai transformé ci-dessous les rangées en colonnes pour mieux faire apparaître les alignements significatifs.

ABCDEFGHIJKLMNOPQR
VIEOLARODAEEIORUUI
ELJSLTINEMPLRRPEEC
CAEEEAFOAAIUAMHZDH
UNUSCLFRLIIDGCEAOE
NLBDHEEEESMEEELRRD
DERAEALDLEPPDDIFAR
ETINRUEEALEIEENANA
BADACBSVVMCDLAILNM
ULEGHEAAAOEUADMLEE
TELRAEMLLNNOVIPHED
CDAAINBMEELDIELADH
OURMTEIONDOEEUAGEE
MLAMNGANAEUCANCALR
MCIEOYNDMRCIUEARAI
EOSSIPTAOOEMMABMFT
CROLSTEDUGDAANLAOE
AENAEESAREELXTEDIR

  J'ai fait ressortir 4 "mots" de 4 lettres en jaune.
UNUS qui débute la 5e rangée, exactement symétrique de CALR achevant la 14e rangée, que je suis tenté de lire CARL, d'autant que deux lignes plus bas apparaît EMMA, la femme de Carl Jung.
  Un concept jungien essentiel est l'Unus Mundus, emprunté à l'alchimie. Je ne vois pas où pourrait se cacher un MUNDUS dans la grille, mais il y a une possibilité d'y lire MONDO, et mieux, MONDO CANE (en italiques roses).
  Mondo cane est un film présenté en 1962 à Cannes, un documentaire accumulant les séquences choquantes, à l'origine d'un genre, le mondo...
  J'avais 12 ans alors, j'entendais parler de ce film par les "grands", et voulais le voir, mais il était interdit aux moins de 16 ou 18 ans. Je ne crois pas l'avoir vu lorsque j'ai été en âge, j'avais probablement oublié son existence.
  Consultant sa fiche aujourd'hui, j'y découvre (ou redécouvre) une curiosité. Une séquence bafoue les anthropométries d'Yves Klein, et l'artiste a fait une attaque en la découvrant à Cannes. S'il n'est pas canné sur place, une nouvelle attaque l'a achevé trois semaines plus tard, le 6 juin 1962, à 34 ans, un an jour pour jour après Jung.
  Ce MONDO CANE qui jouxte CALR me fait rapprocher la mort "jeune" (jung) de Klein ("petit") de celle "âgée" de Jung, à 85 ans; le mot AGEE peut se lire dans les 4 cases au-dessus de CALR (j'ai une pensée pour James Agee, que je ne connais que de nom, et découvre qu'il est aussi mort jeune, et que son oeuvre principale est Une mort dans la famille).

  Dans la même région apparaît (en blanc) le triangle HELIE-LUNE. Hélie est une forme d'Elie, pouvant évoquer hélios, le soleil grec. Cette disposition en triangle me rappelle que j'ai intitulé Triangles un billet débutant par le rappel des relations dorées associées à l'échange Haemmerli-Jung, célébré par la pierre de Bollingen.

  Les seules dates précises connues sont
- 11 février, fracture du pied de Jung, expédié à la clinique de Haemmerli;
- 4 avril, lever de Jung et alitement de Haemmerli, 53 jours après le 11/2;
- 30 juin, mort de Haemmerli (très voisine de la sortie de l'hôpital de Jung), 87 jours après le 4/4.
  53-87 est le partage doré optimal de la somme 140, remarquable car à Jung-Haemmerli correspondent les valeurs numériques 52-84, également en rapport doré. Je suis revenu à maintes reprises sur la correspondance avec les mêmes valeurs numériques des noms hébreux Elie-Enoch, les deux seuls personnages de l'Ancien Testament montés au ciel de leur vivant.
   Par ailleurs l'hébreu permet de transformer le couple soleil-lune en une autre équivalence dorée, leurs noms étant 'hama et levana, de valeurs 53-87.
  J'ai aussi avancé l'orthographe en vieux français
LUNE / SOLLEIL = 52/84 = 13/21, correspondant au partage de CARL en AL/CR.

  J'ai aussi figuré en blanc l'oblique BARBA, qui m'évoque bien des choses, notamment en cette position, juste au-dessous du UNUS commenté plus haut. Alors BARBA, c'est la "barbe" bien sûr, mais ce peut-être aussi une translittération de l'hébreu be-arba', "en quatre", et mon chapitre 17 m'amenait à la formule "du Quatre naît l'Un comme cinquième".
  J'ai mentionné à diverses reprises la nouvelle d'Alain Calame Une affaire en or, pastiche de La mort et la boussole de Borges, où le plan géométrique de l'assassin est déterminé par le nombre d'or et la suite de Fibonacci. Le nom de l'informateur mystérieux du flic, Baruj Spinoza chez Borges, est devenu Barbe Eloha chez Calame, signifiant "en quatre est Dieu".
  Le mot hébreu arba', "quatre", a pour valeur 273, soit 13 fois 21, les nombres de Fibonacci qui (multipliés notamment par "quatre"!) semblent associés à Jung-Haemmerli.
  La semaine dernière, j'ai rouvert Six problèmes pour don Isidro Parodi,(1942), les nouvelles concoctées par Borges et Bioy Casares, où un truand de génie résoud les énigmes qui lui sont soumises, enfermé dans sa cellule 273, nombre que j'avais remarqué jadis, puisque ça fait plus de 30 ans qu'il m'intéresse, mais j'avais oublié sa présence ici.
  Avant d'aller plus loin il me faut commenter l'identité sous laquelle Marc-Antoine Daingot (M-A D) espère faire valoir son droit à l'héritage, Neval Moron. Je me suis émerveillé récemment que cette anagramme de NOVEL ROMAN faisait entendre deux fois le mot "fou", en hébreu et en grec, alors que l'anglais MAD a joué un rôle dans ma découverte du jeu NOVELROMAN. La 14e lettre à part parmi 18 se traduit par un motif 13-1-4 correspondant aux lettres M-A-D
  Il ne fait pas problème que moron soit "fou" en grec (c'est en fait l'accusatif de moros), mais j'ai appris ici que c'est devenu aussi un mot anglais pour "fou", ou "stupide".
  En hébreu, le mot est ordinairement vocalisé naval, faisant au pluriel nevalim. Je l'avais d'ailleurs mentionné chapitre 10. navel est le verbe "être fou", et la vocalisation de l'hébreu est si labile qu'un adjectif ou substantif neval ou navel est fort plausible. De fait, cette page du 1er avril 2013 d'un site religieux parlant du jour des fous est intitulée NEBAL (à entendre NEVAL, car le Beth hébreu se prononce souvent V).
  Alors voici la chose fabuleuse. Lançant une requête "cellule 273", pour voir s'il y avait d'autres cellules 273 dignes d'intérêt, je suis tombé parmi les premiers résultats sur le blog de Nébal, Welcome to Nebalia. Nébal est le pseudonyme de Bertrand Bonnet, critique et traducteur de SF, et je ne sais si c'est l'hébreu qui l'a poussé à choisir ce pseudo, mais je remarque l'intitulé web de son blog, nebalestuncon...
  Nébal a donc consacré un de ses nombreux articles à Isidro Parodi, et celui du 1er avril dernier à Kobayashi, dont Hara-kiri et Kwaidan ont marqué mon adolescence.
  Je viens de décider de modifier les dates de publication des 18 chapitres de Novel Roman, d'abord choisies pour chevaucher deux mois, du 16 avril au 25 mars, un chapitre par jour, mais avec le 14e chapitre publié le 1er avril séparé par quelques jours des 13 précédents et 4 suivants, pour faire ressortir le motif 13-1-4, M-A-D. Ceci avait pour conséquence que la totalité des titres des chapitres n'était pas directement visible dans la barre latérale Archives du blog, et il m'a semblé préférable de tout placer en avril, séquentiellement, du 18 au 1 (pour avoir les chapitres dans le bon ordre). Bref, ainsi le 1er avril, jour des Fous, correspond-il à ce chapitre 18 où apparaît ce M-A D, Daingot, neval, moron...

  L'autre mot de 4 lettres en jaune est NANA, qui en 1908 évoque au premier chef l'héroïne de Zola, Zola dont il a été plusieurs fois question dans Novel Roman, notamment dans ce dernier chapitre pour le transfert de ses cendres au Panthéon, le 4 juin.
  Je comptais depuis le départ mentionner cet événement, mais la lecture récente des Nouveaux mystères de Marseille de Contrucci (Les mystères de Marseille est le premier roman de Zola, voir le billet Lupin 1908) m'a fait y adjoindre les affaires conjointes Ullmo et Grégori. Ma dilection pour ZOLA tient en partie à son nom, que l'atbash transforme en ALOZ, ce que je rapproche de l'anglais LOVE et de l'allemand "quatre", VIER, que l'atbash transforme en EVOL et ERVI.
  Ce mot VIER est par hasard magnifié par les 4 coins de Villers, dans le roman de Benoît Peeters (déjà évoqué pour ses similitudes avec Novel Roman) qui n'entendait signifier que les lettres de (L)IVRE, et ces 4 lettres ont une autre propriété: selon l'autre codage le plus immédiat, le rot-13, IVRE devient VIER...
  Alors ZOLA qui devient ALOZ par atbash est l'auteur de NANA qui devient ANAN par rot-13...

  J'ai omis de signaler que j'avais utilisé le rot-13 dans mon chapitre marseillais, avec le BAR ONE de Pancrace Lhormond (BAR <> ONE). C'est un jeu que j'ai découvert il y a quelque 13 ans, avec un colistier de la liste 813, le Marseillais René Barone, par ailleurs un ami de Contrucci, lequel a donné son nom au médecin légiste qui apparaît dans plusieurs de ses romans.

  Nana est aussi la mère d'Attis, dont le père est un amandier issu du phallus d'Agdistis, être androgyne dont la partie féminine est devenue Cybèle, déesse essentielle du panthéon romain. J'ai (re)découvert ceci en lisant Contrucci, au cours de l'écriture de mon chapitre 17, où l'expérience alchimique de Nolven Amor visait à retrouver l'état androgyne primitif.
  Je me suis rendu compte en écrivant ce chapitre qu'il était inconsciemment inspiré par mon intérêt de jadis pour les transmutations, né de la lecture de Louis Kervran, que j'avais contacté dans l'espoir de faire un doctorat avec lui. Kervran habitait rue Campagne-Première, de même que Yves Klein.
  La mort de ce dernier un 6/6 m'évoque celle de Jung, tandis que Contrucci associe à la résurrection d'Attis la date du 4/4, seconde naissance de Jung.
  Cette courte rue Campagne-Première a logé quantité d'artistes, dont Rilke, qui fut un patient du docteur Haemmerli. C'est là que dans A bout de souffle (1960), Godard a fait mourir Bébel(mondo cané!), que Klein et Kervran ont pu voir passer sous leurs fenêtres.

Note: GEF qui a consulté la page Wikipedia de Mondo cane me signale qu'il y est question de Norman Newell, producteur et parolier qui a fait un tube en ajoutant des paroles à la musique du film. Tiens, ce Norman a reçu trois Ivor Novello Awards.

  Pendant l'écriture de ce chapitre 17 est parue une nouvelle aventure d'Arsène Lupin, se passant précisément en 1908 (voir le billet Lupin 1908). Lupin y est confronté à Edna Bovaroff, née Rouault, ayant assassiné son mari Charles Bovaroff. On devine ce qui a inspiré ces noms, mais jamais jusqu'ici je n'avais pensé que Carl et Emma Jung avaient les mêmes prénoms qu'un fameux couple littéraire. Bien au contraire de sa consoeur, Emma Jung était issue d'une famille riche, et sa fortune personnelle a permis à Carl Gustav de n'avoir aucune contrainte financière. Elle était par ailleurs elle-même psychiatre, et a été d'une aide inappréciable à son mari.
  A noter que, pour choisir le nom de son héroïne, d'abord prénommée Marie, Gustave (!) Flaubert a peut-être été influencé par un roman de l'auteur allemand August (autre forme de Gustav!) Lafontaine, Charles et Emma, ou les amis d’enfance, ayant eu son heure de gloire au début du 19e.
  Il est encore ironique de trouver cette référence au couple Charles-Emma dans une aventure de Lupin, car le couple Jung a longtemps été un ménage à trois, où Emma acceptait de partager son mari avec la jeune Toni Wolff (Puella uxori lupa).

  Voilà donc ce que je vois, pour l'instant, dans la grille composée par les titres des chapitres. Il me semble que c'est loin d'être aussi extraordinaire que ce qui a été vu précédemment dans les autres grilles de la série Ricardo-Epstein-Rapilly-Schulz, sur laquelle je me propose de revenir prochainement.


  Je remarque encore, sur la première grille, avec les lignes composées par les titres, la possibilité de lire CAEN dans le coin droit, de même que Ricardou remarquait la possibilité de lire MARELLE dans le coin droit des mots croisés de Gravitation.
  Tiens, CAEN est l'anagramme de CANE, et MONDO CANE m'a donné l'idée du dernier mot de HV à Caen, victime d'une attaque après l'infâme accusation de Sholem (en fait j'ai abandonné cette idée lors de la rédaction effective du chapitre).
CANE=23 et MONDO=61 font partie de la série additive 1-7-8-15-23-38-61-99... comprenant les valeurs 99 et 61 de NOUVEAU et ROMAN.
  Je remarque aussi deux mots de 5 lettres, OSSIP verticalement à partir du O de EDULCORE au chapitre 2 (Mandelstam?, last mad men?), et ORIEL en diagonale à partir du O de OR chapitre 17 (ou avec une lettre de plus HORIEL, nom d'un ange des peu fiables Clavicules de Salomon).

  La LOREN(E) VOMAN qui exaspère HV fait allusion à The last woman in his life d'Ellery Queen. Elle était déjà prévue en 1998, avec une bête homophonie ("elle rit, couina") à laquelle j'ai renoncé. Je maintiens le nom en remarquant que l'ajout d'un E à NOVELROMAN conduit à 11 lettres de valeur 134, comme les 11 lettres de ARSENELUPIN (les deux messages additionnels de ma grille ROSENCREUTZ du chapitre 9 sont ARSENELUPIN et ELLERYQUEEN en anagramme).

  Le voleur de l'héritage MAXIM DUFRAX est aussi un nom en 11 lettres de valeur 134. Son nom fait allusion à deux personnages de Leblanc, Maxime Dutilleul (frax est plutôt "frêne") dans Le prince de Jéricho, et Maxime Tuillier dans La partie de baccara (la nouvelle qui suit La lettre d'amour du roi George).

  Le vrai nom de HV serait donc NERON VOLMA, allusion à deux fameux détectives, Nero Wolfe et Nestor Burma.
  Il est la 16e victime de la malédiction ROMAN NOVEL (valeur 129). Les deux autres victimes collatérales (à la place de OMAR EL VONN et NORMAN LOVE) sont
IONA D'HAUTOIS = 136, et
JEAN-LOUIS BAROUKH-MALAC = 212.
  Les 18 victimes totalisent pour somme de leurs valeurs
16 x 129 + 136 + 212 = 2412 = 18 x 134.
  C'est totalement imprévu, en 2018, et ce l'était encore plus en 1998 où la supposée victime d'Omar se nommait Louella Mollers.

  J'ai eu beaucoup de mal à écrire ce chapitre, bien qu'il soit très proche de ce que j'avais conçu il y a 20 ans. En fait, le chapitre était si clair dans ma tête que j'ai écrit ces commentaires avant de l'avoir rédigé.
  Une coïncidence fabuleuse est cependant survenue lors de la rédaction effective. L'ultime validation des héritiers le 14 août était prévue en 1998, car cette date vient 120 jours après le 16 avril, écho au post CXX annos patebo des rosicruciens, mais en 1998 je ne m'intéressais aucunement au nombre d'or, et n'avais donc aucune idée que la grande section d'or de l'année tombait le 14 août (vers 14 h une année normale, vers 5 h une année bissextile).
  Il m'a semblé devoir inclure ceci dans l'histoire, pour montrer que les idées de Nolven Amor avaient tout de même marqué Hortense et Alban, bien qu'elles aient été balayées par HV.
  J'ai rédigé le passage correspondant le matin du 25 novembre. Depuis deux jours, je passais du temps sur une toute récente découverte, le roman Letters de John Barth (1979), si riche que je lui consacrerai tout un billet, en principe publié le 12 décembre.
  Je repris son exploration dans la soirée, et y découvris qu'il y était question du Phi-point ("le point Phi") de l'année 1969, le 14 août.
  Depuis 2000 où je m'intéresse au nombre d'or, non je l'espère par aveuglement numérologique, mais parce que je crois l'avoir identifié comme un facteur synchronistique, je me suis efforcé d'accéder à toutes les oeuvres signalées comme y ayant un rapport. Letters n'est pas mentionné parmi ces oeuvres, alors que Barth est considéré comme un écrivain américain important (sinon le plus important).
  Bref, je n'ai jamais vu ailleurs quelqu'un s'intéresser à la section d'or de l'année, et je suis arrivé au moment où j'en parlais dans Novel Roman à ce roman (en fait novel, car il n'a pas été traduit), dans des circonstances coïncidentielles qui seront détaillées dans le billet du 12/12.

  Les 4 héritiers sont nés en 1974 afin d'avoir 34 ans en 1908, comme Arsène Lupin (c'est précisé dans L'aiguille creuse). Omar El Vonn est.né un 30 juin, une de mes dates clés (mort de Haemmerli), et Ramon Olven un 30 septembre car c'est le 273e jour d'une année non bissextile, 273 que j'ai fait intervenir ailleurs, produit des Fibos 13 et 21 (de somme 34), valeur de l'hébreu arba', "quatre".
 

4.11.18

Lupin 1908


  Comme je l'ai signalé récemment, un autre auteur a fait revivre le gentleman-cambrioleur, Frédéric Lenormand, avec Le retour d'Arsène Lupin, paru le 10 octobre dernier.   Lenormand est un auteur prolifique, ayant déjà repris le personnage du juge Ti de Robert van Gulik, pour une vingtaine de nouvelles enquêtes, et créé diverses séries historico-policières. J'avais remarqué son nom parce qu'il avait obtenu le prix Arsène Lupin pour un de ses romans, or l'une des identités de Lupin a été le chef de la Sûreté Lenormand.

  Il y a deux ans, je m'étais précipité sur une nouvelle aventure de Lupin, Les héritiers, et en avais été fort marri. J'en ai dit quelques mots ici, parce qu'il faisait intervenir un marchand d'armes nommé Emil Hazaroff, évident avatar du réel Basil Zaharoff, écho à un roman jungien où apparaît le vrai Zaharoff.
  Je n'avais pas jugé utile d'indiquer que ce roman se passait en 1907 (en mars), ni qu'il y intervient deux peintres réels.
  Delacroix, dont Lupin réalise une copie de La Liberté guidant le peuple, en remplaçant l'émeutière par la femme qu'il aime, Ariane, fille de Hazaroff, peintre elle-même, et en la signant de son nom.
  Picasso, piqué par le succès d'Ariane, est poussé à faire une oeuvre encore plus novatrice, Les Demoiselles d'Avignon (achevée en juillet 1907).

  J'imagine que Lenormand n'a pas lu ce roman, mais voici les échos qu'on pourrait y voir.
  Son personnage principal est Edna Bovaroff, veuve d'un industriel qui lui a laissé toute se fortune. Ce nom est évidemment calqué sur Emma Bovary; madame Bovaroff a assassiné son mari, prénommé Charles comme monsieur Bovary, et Edna est née Rouault, comme Emma...
  Madame Bovaroff avait un original de Delacroix, L'Homme au gilet vert, mais il a été remplacé par une copie, où le gilet est devenu rouge... Lupin déchiffre des lettres dans la chevelure, Picasso, et rend visite au peintre qui ne cache pas avoir effectué cette copie, sur commande.
  Picasso lui montre aussi ses Demoiselles d'Avignon, qu'il garde sous une bâche car même ses amis jugent mal la toile, et Lupin l'encourage à poursuivre dans cette voie.

  Lenormand a situé son histoire en 1908, la première date donnée étant le 20 février. Il n'y a rien de plus précis ensuite, sinon la mention du printemps.
  Lupin y a pour identité principale le détective Jim Barnett, utilisé par Leblanc dans dix nouvelles. Pourquoi pas, puisque Leblanc précise que Lupin a utilisé l'Agence Barnett avant la guerre, sans plus de précision, et de toute façon la chronologie lupinienne est très floue.
  Lenormand cite des maîtresses de Lupin qui sont obligatoirement postérieures à 1908, mais passons. L'enquête de Barnett La lettre d'amour du roi George est celle qui m'a conduite au jeu NOVEL ROMAN, relié ensuite aux 18 périodes de 106 ans conduisant à 1908. Je n'aurais pas osé situer l'activité de Barnett en 1908, année qui à partir d'avril est entièrement occupée par L'Aiguille creuse, et je ne peux qu'apprécier cette datation coïncidentielle, d'autant qu'elle est avancée par un Lenormand qui slavise Bovary, et que je serais tenté de slaviser à son tour en Lenormanov (anagramme de novelroman, le premier mort de la série étant d'ailleurs Len Romanov).
   Pour paraphraser le titre d'une des nouvelles de L'Agence Barnett & Cie, le hazaroff fait des miracloffs...

  Il y a davantage, en se souvenant que j'avais prévu en 1998 pour Novel Roman une table des chapitres formant un carré permettant de lire en diagonale ROSENCREUTZ, et que j'ai découvert en 2012 que Ricardou avait eu la même idée, pour son roman Les lieux-dits publié en 1969, avec un carré permettant de lire en diagonale BELCROIX.
  Ce roman est essentiellement une enquête menée par deux jeunes gens sur le peintre Albert Crucis, dont le nom est explicitement vu comme le génitif du latin crux, "croix", signifiant donc "de la croix", peut-être à l'origine de sa vocation de peintre.
  Seules deux années sont mentionnées dans le roman, 1917, pour la révolution russe, et 1908, année de parution d'un dictionnaire des peintres contemporains, où figure Albert Crucis (probablement parce que 8 est le nombre générateur du roman).
  Il y a plusieurs occurrences de ses initiales, A. C., seules initiales mentionnées, or dans Le retour d'Arsène Lupin un seul personnage est signalé par ses initiales, le détective Augustin Cloribus, A.C. donc, qui signe ainsi une lettre où il avoue avoir joué un rôle dans la disparition du Delacroix (page 114).

  Il me semble tout à fait improbable que Lenormand ait lu Les lieux-dits, et j'en profite pour signaler que L'intégrale Jean Ricardou, que Les Impressions Nouvelles ont entrepris d'éditer, se vend fort mal, et qu'il n'est pas sûr qu'on aille au-delà du tome 4, à paraître en principe en novembre, s'il n'y a pas plus d'amateurs. On y trouvera notamment Les lieux-dits.

  Bref, Lenormand ne m'a pas du tout convaincu, et pour retrouver le personnage de Lupin j'ai relu Boileau-Narcejac, ceux qui ont le mieux réussi à faire revivre le gentleman. Tiens, dans La poudrière, on cherche 14 lettres de l'archiduc Michel à son aimée Simone, et la 14e est particulière (elle aurait provoqué la tentative de suicide de Simone). Je rappelle que c'est la 14e lettre du roi George qui m'a conduit au jeu NOVEL ROMAN.
  Tiens, dans L'affaire Oliveira, le nom complet de l'escroc est Ramon Oliveira. Le dernier héritier révélé de la fortune Monlorné est Ramon Olven.
  Tiens, dans Le serment d'Arsène Lupin, c'est M. Lenormand qui enquête sur un double meurtre commis le 27 mars 1909. Comme cela fait quelque temps qu'il est chef de la Sûreté, il est probable qu'il l'était aussi en 1908 (dans le cadre de ce roman, car c'est encore incompatible avec L'Aiguille creuse qui s'achève début 1909). Aujourd'hui je suis tenté de lire 27 mars 27/3 ou 273, valeur de l'hébreu arba', "quatre", et l'assassin tue deux autres personnes, quatre donc en tout, avant d'être démasqué.
  Tiens, dans Le second visage d'Arsène Lupin, l'intrigue s'inscrit dans la continuité de L'Aiguille creuse, et ce serait la chronologie strictement "boinarienne" qui serait prise en faute, mais ce pourrait être encore un hommage à Leblanc qui se souciait assez peu de chronologie. Lupin y a l'occasion d'afficher son goût pour la peinture moderne, et cite uniquement Picasso qu'il voit prometteur.

Note de novembre 2020: En 1955, Michel Lebrun a publié sous le pseudo Michel Lecler une nouvelle intitulée Ma vie est un roman, rééditée en 1982 par Jacques Baudou et Paul Gayot.
   Le récit suit le publiciste René Paulins en 1960, âgé de 52 ans, partageant à mi-temps sa vie avec Arsène Lupin. L'intrigue est inventive, proche de L'incroyable destin de Harold Crick, 50 ans plus tard.
   Toujours est-il que cet alter ego d'Arsène serait né en 1908, l'année de L'Aiguille creuse (Lupin se serait d'ailleurs réincarné pour empêcher Leblanc de faire mourir sa femme Raymonde, mais aurait manqué la bonne époque).
   Trois autres auteurs ont plus tard utilisé l'anagramme René Paulins.


  J'ai promis dans le précédent billet de parler des trois romans de Contrucci se passant en 1908.
  Le premier est L'Inconnu du Grand Hôtel (2010). Il débute par un prologue, l'assassinat de l'avocat d'affaires Louis Natanson le 8 janvier 1898. Il avait un rendez-vous avec un mystérieux Anglais, Henry Brougham, séjournant depuis le 6 janvier au Grand Hôtel sous le nom d'Harold Brighton, mais Natanson est trouvé tué d'un coup de revolver. Une lettre de Brougham certifie qu'il s'agit d'un accident, mais il ne daigne pas se présenter aux autorités, et toutes les démarches pour le retrouver échouent.
  Le premier chapitre saute au 6 janvier 1908. Guillaume Natanson, qui pense être le fils de Louis, confie à Raoul Signoret qu'il soupçonne son beau-père, Jacques Bernès, d'avoir fait assassiner son père. C'était un ami de Louis, et il a épousé sa veuve, née Hélène de Cazalis, après un délai de convenance. Natanson avait épousé Hélène âgée de 16 ans, en situation embarrassante, et on apprend plus tard que Jacques Bernès était le réel père de Guillaume.
  Le mystère se dévoile après diverses péripéties, dont la mort de Jacques Bernès, laquelle a tout du suicide d'un coupable proche d'être démasqué. Ce n'était cependant pas Bernès qui avait fait tuer Natanson, mais Hélène, et ces noms Natanson et Cazalis me sont évocateurs.

  Il y a bien sûr Thadée Natanson, accessoirement avocat, premier époux de Misia Godebska dont il a été déjà question dans Quaternité (en fait indirectement, par son dernier mari, José-Maria Sert, et par son nom codé dans la musique de Ravel), mais l'association Natanson-Cazalis m'évoque un roman d'Ellery Queen, sachant que ce nom cachait Frederic Dannay, né Daniel Nathan.
  Dans Griffes de Velours (1949), Ellery et son père enquêtent sur une série de crimes à New York. Ils parviennent à identifier un suspect, le docteur Cazalis, mais n'ont aucune preuve contre lui. Ils lui tendent un piège, il y tombe et avoue tous les crimes... Il est en fait innocent, et c'est sa femme la meurtrière (leurs prénoms ne sont pas donnés).
  Bon, le nom Cazalis est courant, et le membre d'un couple qui s'accuse à la place de l'autre est un poncif du polar (en fait chez Contrucci c'est encore la Cazalis qui a tué son second mari, lequel venait d'apprendre le rôle qu'elle avait joué dans la mort du premier mari), mais l'évocation queenienne ne s'arrête pas là.
  Blanche de Cazalis est aussi l'héroïne du premier roman de Zola, Les mystères de Marseille.

  Dans L'Inconnu du Grand Hôtel, il y a aussi le retour de la date du 6 janvier, l'arrivée de l'inconnu le 6/1/1898 au Grand Hôtel, le contact entre Guillaume et Raoul le 6/1/1908. La similitude de la date n'est pas mise en avant, comme le 4 avril 1906, où une lettre anonyme est reçue à la Préfecture dans Le Spectre de la rue Saint-Jacques, n'est pas explicitement souligné être l'exact anniversaire de la mort de Berthe Castellain le 4 avril 1896 (voir le billet précédent).
  Or le 6 janvier est la date clé de ce qui était prévu pour être le dernier Queen, Le mot de la fin (1958), où l'intrigue tourne autour du 6 janvier 1930, 25e anniversaire de John Sebastian, lequel est assassiné mais le meurtrier ignorait qu'il avait un jumeau. J'ai présumé que Dannay visait par ce Jour des Rois, 6/1 (1/6 à l'américaine), le propre anniversaire moyen des Queen, Lee né le 11 janvier 1905, Dannay le 20 octobre, à mi-chemin des deux le 1/6 (6/1 à l'américaine), Jour des Queen...
  Ce n'est pas non plus par hasard pour moi si le 20e Queen, Double, double, débute un 4 avril, 4/4.

  Mais tout ça a déjà été développé, ici par exemple, et c'est en partie un motif queenien qui m'a conduit à lire Contrucci. Milieu août a été annoncée la prochaine parution de son nouveau roman, La Nuit des blouses grises, dont le résumé en 4e de couverture disait
Dans la nuit du 18 février 1910 - alors qu’il approche de Marseille-Saint-Charles - le train 4774 est brutalement stoppé. Aussitôt des hommes armés, habillés avec la blouse grise des conducteurs de troupeaux aux abattoirs, le prennent d’assaut. A bord du wagon financier, cent vingt kilos d’or, des pierres précieuses et des bijoux.
  Je suis ainsi fait que la factorisation de 4774 en 77x62 m'est presque immédiate, or 77 et 62 sont les valeurs de ELLERY et QUEEN. J'ai eu envie d'en savoir plus, mais le livre n'a été disponible que courant septembre, aussi je me suis rabattu sur d'autres Contrucci. Lorsque j'ai pu lire ce 13e Mystère, qui mérite à peine ce nom, j'y ai découvert que ce train d'or 4774 était en fait le train 4717. Sans cette erreur, je ne sais si j'aurais jamais lu Contrucci...

  Après la lecture du Spectre de la rue Saint-Jacques, le Contrucci suivant que j'ai pu terminer est La Somnambule de la Villa aux Loups (2011), le meilleur à mon avis de ceux que j'ai lus.
  Le 4 juin 1908, le cocher d'un fiacre qui attendait ses clients entend trois détonations en provenance de la Villa aux Loups, sur les hauteurs avoisinant Marseille. Ses clients étaient un jeune homme et une femme d'âge plus mûr, il doit forcer une porte de la maison pour y entrer, avec l'aide d'un voisin, et ils découvrent la femme au lit, en petite tenue, tuée de deux balles dans la tête. Le revolver est dans la main du jeune homme, qui a aussi une balle dans la tête.
  L'affaire semble limpide, et divers documents des mains des protagonistes attestent que le jeune Henri était l'amant de Madeleine Casals, la femme d'un éminent chirurgien marseillais. Mais celle-ci ne pouvait continuer à vivre dans le péché, et les deux amants ont décidé d'en finir. Par ailleurs, le double suicide s'est produit dans une maison dont toutes les issues étaient verrouillées, et le seul éventuel suspect, le mari chirurgien, était en train d'opérer au même moment.

  Bien entendu, la vérité est tout autre. Le diabolique docteur Casals a conçu un plan machiavélique pour se débarrasser de sa femme, laquelle n'était nullement la maîtresse du jeune Henri. Il suffira ici de savoir que l'hypnose joue un rôle essentiel dans ce plan, et ceci offre un écho immédiat avec le Lupin de Lenormand.
  Car madame Bovaroff y est aussi une hypnotiseuse accomplie. Sans détailler une intrigue confuse, elle a utilisé l'hypnose pour se débarrasser de son mari quelques années plus tôt, et s'en sert aussi en 1908 pour manipuler son entourage.

  Le nom Bovary vient du vieux français boverie, "étable", tandis que Casals vient de l'occitan casa, "maison". Cazalis en est une autre forme, ainsi Casals fait tuer sa femme par une complice, tandis que Hélène de Cazalis faisait tuer son mari par un complice dans le précédent roman.
  Ceci me rappelle une inversion similaire dans deux romans de Queen, La ville maudite (1943) où une femme jalouse ourdit une machination pour tuer sa rivale et faire accuser son mari du crime, tandis que dans La décade prodigieuse (1948), c'est un mari jaloux qui ourdit une machination pour tuer sa femme et faire accuser son rival du crime.
  Question onomastique, il y a aussi une similitude de situation dans Le mystère des frères siamois (1933) et dans Le cas de l'inspecteur Queen (1957), où une femme s'accuse d'un crime et n'est pas prise au sérieux pas les enquêteurs, alors qu'elle est bien coupable; dans les deux cas elle se prénomme Sarah.

  Il y a une ressemblance plus rare entre La Somnambule et le Queen de 1953, Lettres sans réponse, où Ellery est engagé par Dirk Gordon pour surveiller sa femme Martha, qui rencontre régulièrement un homme. Tout semble indiquer un adultère, mais Martha est fidèle et victime d'une machination de son mari, lequel a eu recours à un autre moyen que l'hypnose.

  Pour ce qui est des échos avec Novel Roman, je remarque que le meurtre de La Somnambule survient le 4 juin, le lendemain du jour où meurt le dernier héritier programmé (chapitre 17).
  J'avais donc emprunté deux Contrucci en vue d'écrire mon chapitre 15, achevé le 1er septembre. S'ils ne m'ont guère été utiles, les 4 avril du Spectre de la rue Saint-Jacques, m'ont fait lire d'autres Contrucci, après avoir achevé ce chapitre, où je fais mourir mon héritier, un enfant-loup, à l'hôpital de la Conception, deux jours après une blessure reçue au jardin Valmer. Or, dans La Somnambule de la Villa aux Loups (je note ces "loups"), le jeune Henri ne meurt pas malgré la balle qui lui a traversé la tête, et il est hospitalisé à la Conception. Les enquêteurs font état d'une prochaine reprise de conscience pour tendre un piège au docteur Casals.
  Lorsque j'ai lu cela, ma femme Anne venait d'être hospitalisée à la Conception, le 6 septembre, après une brusque aggravation de son état. La Conception était une surprise, pas totale parce qu'il y a là un service spécialisé dans sa maladie, mais il y en a un aussi plus proche de chez nous à Aix, où il n'y avait pas de place. Après deux nouveaux mois d'hospitalisation elle rentre à la maison dans quelques jours.

  Le dernier Mystère de 1908 est Rendez-vous au Moulin du Diable (2012), débutant le mercredi 14 octobre 1908 par l'enlèvement du petit Paul Gauffridy, 2 ans et 2 jours, fils d'un riche entrepreneur de Marseille. Je ne vois rien de particulier à dire de ce roman, sinon que l'enlèvement a été commis par une femme en noir, or cet automne 1908 voyait la parution des premiers épisodes du feuilleton de Leroux, Le parfum de la dame en noir (le premier épisode est paru dans l'hebdomadaire L'Illustration le 26 septembre 1908). Cette femme en noir est appelée "dame en noir" à diverses reprises, avec une probable arrière-pensée pour Leroux, dont Le mystère de la chambre jaune (1907) est évoqué dans L'Inconnu du Grand Hôtel par l'oncle du journaliste Signoret, apprenti détective comme Rouletabille.

  Les romans de Contrucci évoquent souvent l'actualité régionale ou nationale, et L'Inconnu du Grand Hôtel m'a ainsi fait connaître l'affaire Ullmo, un officier de marine d'origine juive qui a dérobé des documents secrets militaires en 1907, et tenté de les vendre à l'Allemagne. N'ayant pas été pris au sérieux, il a ensuite proposé au ministère de la marine de se faire racheter les documents, en accumulant des bourdes ayant vite conduit à son arrestation, et à son jugement à Marseille en février 1908, le condamnant au bagne. Envoyé à l'île du Diable, il y a d'abord occupé le cabanon qui avait été construit spécialement pour Dreyfus.

  Dans La Somnambule, il est question du transfert au Panthéon des cendres de Zola en juin 1908, ce que je comptais mentionner dans Novel Roman, sans forcément parler de l'attentat alors commis contre Dreyfus, mentionné par Contrucci. Un nationaliste du nom de Grégori blessa Dreyfus de deux balles, et fut acquitté trois mois plus tard...
  Je peux maintenant en venir à ce qui me trouble dans ce qui pourrait être un Rendez-vous à l'île du Diable, et que je n'imagine guère avoir été à l'esprit de Contrucci (mais mes recherches sur la question sont depuis longtemps en ligne et ont même été publiées, dans Teckel n° 2, 2004). Rouletabille est le fils de Mathilde Stangerson, la dame en noir, et de Ballmeyer, l'ennemi public n° 1, au nom de consonance assez évidemment juive, qui se cachait sous l'identité de l'inspecteur Fred Larsan dans Le mystère de la chambre jaune. A la fin du Parfum de la dame en noir, Ballmeyer démasqué se suicide le soir du 13 avril 1895, et Rouletabille emmène sa dépouille en barque au large pour se débarrasser de ce "corps de trop".
  Or, compte tenu du décalage horaire, à cet instant même en Guyane, dans l'après-midi du 13 avril 1895, Alfred Dreyfus, Fred pour ses proches, est mené en barque de l'île Royale à l'île du Diable, où il aurait dû finir ses jours si ses partisans n'avaient pas remué ciel et terre pour faire réviser sa condamnation.

  Il y a aussi un secret de famille dans Rendez-vous au Moulin du Diable, où le petit Paul n'est en fait pas le fils de Marius Gauffridy et de son épouse actuelle, mais de son fils Jean-Marc né de son union précédente avec Germaine Matheron, et de Bernadette Arnoux, une domestique des Gauffridy.
  Jean-Marc menant une vie déréglée avait été chassé par son père, et le fils de Bernadette avait remplacé le fils de la jeune femme de Marius, ayant fait une fausse couche.
  C'est en fait Jean-Marc qui a enlevé le petit Paul, et la dame en noir était Germaine Matheron.

  Après avoir titré ce 269e billet 1908 tout court, je me suis avisé que
mille neuf cent huit = 197 au Gématron, et que pour arriver à 269 il manque 72, valeur de LUPIN...