aux confins de la sentence, ojourdui
Je reviens sur Révélations minuscules, en guise de préface, à la gloire de Jean Paulhan, le plus long texte des deux recueils de nouvelles de Ricardou parus simultanément aux Impressions nouvelles en 1988. C'est supposé être une préface posthume écrite par la soeur de l'écrivain, Noëlle Riçoeur.
Ce texte abonde en jeux cachés, qu'on pourrait appeler des "cadeaux de Noëlle", en écho aux "Easter eggs" de récentes créations. L'expression Easter egg, "oeuf de Pâques", provient d'un film de 1975, mais Ricardou s'avère encore ici un remarquable précurseur car il donnait en 1965 dans La prise de Constantinople un graphisme sur une roche qui, dans un sens, permet de lire LEON, prénom d'un des personnages, Léon Doca.
Tourné de 180 degrés, le graphisme peut se lire 4031, soit, en prenant les rangs des lettres, D-0-C-A, le nom de Léon... Ricardou appelait ce jeu son "cado de Noël".
Révélations minuscules est entièrement écrit en symétricologie, procédé dont la règle essentielle est un écho entre le début de la phrase et sa fin, écho qui peut se présenter sous de multiples formes, étudiées ici, y compris des couplages de phrases, ce dont j'ai enfin compris la raison en scrutant le texte.
C'est que Ricardou y cite diverses phrases d'auteurs divers, certaines d'entre elles étant supposées des exemples de symétricologie, parfois avec des tricheries, mais deux phrases issues de Terre écrite, l'annexe achevant Pages Paysages (1984) de Jean-Pierre Richard sont citées telles quelles, d'abord celle-ci, ouvrant le texte et lui donnant son orientation boulistique:
Juste après cette liste, Ricardou reconnaît deux erreurs, un oubli, et l'ajout de Jean-Pierre Richard dont il cite page 18 la phrase ci-dessus. Comme elle n'est pas symétricologique, Ricardou donne ensuite une phrase reprenant les syllabes initiale et finale, inversées, soit:
Est-ce à dire que "la pire parmi les structurales injures" s'adresse à l'éminent professeur? Oui, ou du moins c'est ce que peut déduire un symétricologue amateur en se penchant sur "ce texte abscons", constitué de 329 phrases (en fait plutôt 328, selon mon dernier compte), presque chacune d'entre elles nécessitant de batailler pour en discerner ne serait-ce que le sens littéral.
Quant aux sens plus secrets, il ne suffit pas de regarder le début et la fin de chaque phrase, car la symétricologie peut concerner tous les mots équidistants de ces extrêmes, et plusieurs phrases comptent plus de 200 mots...
Le décompte n'est pas facile, car les mots composés peuvent poser problème (mais Ricardou a pris soin d'éliminer certains tirets), car de nombreuses phrases contiennent des citations, en plus petit corps typographique; faut-il en compter les mots aussi? Enfin Ricardou donne des exemples d'autres codages utilisés dans son texte, par l'usage des parenthèses notamment.
Certaines de ces phrases en petit corps citent des passages antérieurs, mais toujours avec des variantes, ainsi il a été vu dans le précédent billet que les deux dernières phrases reprises avec tous leurs mots numérotées étaient différentes des phrases originales, notamment par le nombre des mots.
Je me suis résigné à l'aventure, compter les mots de chaque phrase, et aller au moins en examiner le centre. En restant aussi concis que possible, voici quelques résultats de mon travail, limités à la "dispute" entre Jean Ricardou et Jean-Pierre Richard.
Ricardou avait précédemment utilisé la symétricologie, à l'échelle d'une nouvelle, et cette préface signale que la première nouvelle de Révolutions minuscules a pour titre Jeu et débute par le mot "Je" (le lecteur peut découvrir qu'elle s'achève par le mot "jeu"), et que la dernière a pour titre Autobiographie et s'achève sur le mot "oiseaux".
Il l'a aussi utilisée à l'échelle de la phrase, et la première phrase de sa préface (tiens) aux Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel, de Leonardo Sciascia (1972), débute par "Celle" et finit par "roue".
La citation de Richard a 35 mots, avec au centre le mot "si". La réponse de Ricardou a 53 mots, avec au centre "remettre".
35+53 = 88, 8+8 = 16, le nombre de nouvelles des deux recueils, et il est souligné dans Révélations minuscules ce double du nombre fétiche de Ricardou.
"si remettre" doit-il laisser entendre "sire maître", désignant l'éminent professeur, à moins que seul "sire" lui soit destiné, tandis que Ricardou était un modeste "maître"? Il a d'abord été instituteur, puis prof dans le secondaire; il a postulé en 1976 à l'université expérimentale de Vincennes, où enseignait alors Richard, mais sa candidature a été rejetée.
Il est souligné que le nom Ricardou signifie "petit Richard".
Ricardou reprend page 57 "l'indispensable citation d'un éminent professeur de Sorbonne", avec quelques variantes:
Peut-être peut-on en déduire que, dans cette "minuscule préface", "ce minus" s'applique au minutieux Ricardou, au "petit Richard", et "ce con" au "doctueur" Richard. Ricardou emploie page 89 pour l'éminent professeur l'expression "célèbre doctueur Richard, ou Cottard". Il y a dans La peste de Camus un bon docteur Richard, qui meurt de la maladie, et un vil personnage nommé Cottard.
Pages 62-63, Noëlle répond à son frère par une phrase où, entre parenthèses, elle dit s'efforcer d'éviter de former "ce minus" par les termes extrêmes. La phrase débute par "Conçois-tu quelque peu, cependant", et s'achève sur "abscons, ton trop rhétorique artifice." Malgré ses efforts structuraux, Noëlle offre à deux reprises "ce con", en reprenant l'adjectif "abscons" qui achevait la réponse de Ricardou à la phrase de Richard, avec des "syllogismes abscons" devenus des "structurales injures" dans sa récriture.
Il pourrait y avoir des correspondances plus précises, notamment page 51, avec "l'éminent critique de la Sorbonne", où "critique" est le 54e mot à compter de la fin de la phrase, tandis que le 54e mot à partir du début est "inconscient", à peut-être comprendre "un con savant".
Cette phrase insiste sur les ressemblances entre les noms Richard et Ricardou, dont un aspect est souligné page 53, dans une phrase de 117 mots dont le mot central est "Ricardou", avec
25 est la position centrale de la première phrase décortiquée selon la symétricologie, d'abord donnée page 59:
Il y a encore les italiques, dont Ricardou rend compte dans cette phrase:
La phrase est reprise page 68, avec ses mots numérotés:
Ricardou signale d'abord que les pivots des expressions symétriques, "démuni du minutieux" et "désir, pour réussir, décisivement", sont eux-mêmes symétriques dans la phrase, "(11) du" et "pour (11)", mais se garde bien d'évoquer les mots adjacents, "(13) concept" et "ce (13)". Il pourrait y avoir davantage, ces termes étant équidistants, l'un du premier mot et du mot central, l'autre de ce mot central et du dernier mot. Et, bien sûr, "concept" jouxte le mot "minutieux"; dans cette phrase de 7 fois 7 mots, il laisse encore entendre "sept", l'un des nombres clés des deux recueils, avec les 7 nouvelles de La cathédrale de Sens adjointes aux 9 Révolutions minuscules.
Noëlle interroge Jean à propos de ce mot central, dans une phrase où "minutieux" fait écho à "son" (un euphémisme courant pour "con"). Jean répond:
Par ailleurs, parmi les précurseurs de la symétricologie, Ricardou cite les deux premiers et deux derniers vers du Cimetière marin,
Quant au mot "midi", il apparaît souvent, presque toujours accompagné de "minuit", en probable référence symétrique à L'art du X, dernière nouvelle du second recueil que j'ai étudiée ici et là, et "midi le juste" apparaît effectivement page 100 pour désigner la position centrale du mot "centre".
"recommencée": la phrase qui expose la symétricologie du recueil Révolutions minuscules, page 48, a 163 mots dont le mot central est "commencé", qui commence par "COM" et finit par "CE", comme la phrase de regret de Richard.
Richard et Ricardou admiraient l'oeuvre de Mallarmé. Ricardou suggère que dans le fameux Sonnet en X, le "septuor" final répondrait à l'initial "Ses purs ongles". Il utilise aussi le sonnet de Mallarmé débutant par
Le but de ces manoeuvres était probablement de forger l'écho entre "M'introduire" et "Raymond". A plusieurs reprises (7), l'écho symétricologique est entre I et O, la lettre ou le son. Ainsi l'on a "Inexorablement-numéro." pour la phrase page 52 reprise numérotée page 95, "Y-crescendo." page 73, "Ou-"i"." pages75-76. Les nasalisations "in-on" seraient une innovation.
Ricardou donne dans la phrase suivant "Ou-"i".", page 76, la valeur symétricologique de cette correspondance:
Les deux mots au centre de cette phrase de 86 mots sont "sait pourquoi", dont le plus immédiat pourrait être les 4 et 8 lettres, les "fétiches numéros" de JEAN RICARDOU.
C'est peut-être son obsession pour Roussel qui a inspiré la signature de Ricardou réduite aux initiales JR, la "triple fourche" évoquée à diverses reprises dans cette "minutieuse préface".
Roussel devient "Roussil" en page 100, vraisemblablement pour la symétrie "O-I". Ricardou a encore probablement remarqué que M est au milieu de RAYMOND, encadré par Y et O.
Note: çoeur Erica m'informe que la signature JR est d'abord inspirée par les empreintes de pattes d'oiseaux, d'où les "empreintes d'oiseaux" achevant la nouvelle Autobiographie (et le recueil Révolutions minuscules).
L'oeuvre peut-être la plus fascinante de Roussel, Nouvelles impressions d'Afrique, est magnifiée par la phrase "Inexorablement-numéro." de la page 52, où ce titre en 4 mots trône au centre de ses 108 mots.
La phrase de la page 76 que je viens de citer "In extensO" est suivie par une phrase en 138 mots débutant par "Il" (Jean) et finissant par "soeur jumelle." (Noëlle), évoque la fiction essentielle de Ricardou, La prise/prose de Constantinople, et ses "deux titres spectaculaires, en face à face".
Au centre de ces 138 mots figurent précisément les 8 mots des titres alternatifs de l'ouvrage, mais Ricardou les a modifiés en La prise de la rose, La prose dérisoire, si bien que les mots "prise" et "prose" s'y trouvent symétriques.
Un personnage énigmatique de La poussière de soleils, de Roussel, a pour seule appellation le Minus-Habens.
Au mot RICARDOU pourrait correspondre, ou s'opposer car ce n'était pas sa qualité la plus péremptoire, le mot MODESTIE, également en 8 lettres avec O et I aux mêmes positions, inversées. Ce mot apparaît à plusieurs reprises dans cette "confuse préface", notamment achevant page 69 une phrase qui débute par un mot de 8 lettres, TIENDREZ, et dans une phrase page 101 dont les mots centraux sont "avec modestie, j'en". Les 4 et 8 lettres de "avec modestie" font donc écho à "j'en", à probablement comprendre "Jean".
De quoi s'interroger sur l'abondance de l'expression "j'en conviens" dans cette complexe préface, notamment au centre de sa dernière phrase.
Il faut encore revenir sur la dernière phrase numérotée par Ricardou pages 99-100, en 197 mots avec "centre" pour 99e mot, mais la phrase originale page 47 a 200 mots, les 100es mots centraux étant "juste centre":
Parmi divers changements, la phrase reprise pages 99-100 s'achève sur "je ne sais pas pourquoi, la mise à nu d'une improbable concordance.", avec un mot final se suffisant à lui-même, "concordance". Ailleurs, page 17, Ricardou associe le mot "compétence" à l'éminent professeur, et "connaissance" page 29.
Les jeux avec "ce con" ne sont qu'un aspect de cette compulsive préface, laquelle nécessiterait probablement des volumes entiers pour dénicher les "cadeaux de Noël" semés par Ricardou, sans garantie de décoder tous les jeux prévus, ni de mettre à jour des niveaux imprévus.
C'est cet aspect qui m'intéresse, et m'a motivé pour décortiquer toute cette confuse préface. Je rappelle que j'y ai relevé d'emblée trois coïncidences majeures:
- D'abord l'inscription dans un espace minime, le rectangle que j'ai tracé plus haut sur le scan de la page 47, des lettres ROMAN NOVEL qui me sont depuis longtemps significatives. Au cours de cette étude j'ai fait une découverte reliée à ce jeu qui sera le juste sujet du prochain billet; avant une étude détaillée je l'ai ajoutée en note à la fin de ce billet.
- Cette phrase est reprise page 99, avec "centre" pour 99e mot central, et une référence dans le texte à cette page 99. Il y a de même dans l'autre recueil une autoréférence dans le texte à sa page 61, or 99-61 sont les valeurs des mots NOUVEAU-ROMAN. Le précédent billet m'a été l'occasion d'un prolongement, avec la constatation que, selon la gématrie ricardolienne, mais je n'imagine guère que Ricardou l'ait effectivement prévu,
NOUVEAU ROMAN = LECTEUR NEUF = 81 45.
Son oeuvre la plus vendue, l'essai Le nouveau roman, portait en exergue Aux nouveaux lecteurs.
- Enfin j'ai remarqué dans cette constructive préface ses deux phrases finales de 183 et 226 mots, car 183 et 226 sont deux des mesures du Modulor, correspondant à la taille de l'homme jusqu'à la tête, et jusqu'à son bras levé.
J'avoue n'être pas certain que ceci n'ait pas été calculé par Ricardou, car la dernière phrase contient en position 9 à partir de la fin "(φ)", symbole du nombre d'or, symétrique de "au", symbole du métal or. Par ailleurs, un couple de phrases pages 73-74 semble établir la liaison entre "Or" et "nombre.".
D'autres éléments sont venus lors du décorticage de cette confraternelle préface. La 183e phrase (plutôt 182e), page 54, a 113 mots, or le Modulor est basé sur une taille idéale de l'homme de 183 cm dont la section d'or tombe au niveau du nombril, à 113 cm.
Cette phrase offre quelques subtilités, débutant par "Bref" et finissant par "ténèbres.", avec pour mot central "longtemps". Une symétrie intérieure apparaît entre "moins" et "moindre", alors que Ricardou souligne dans l'avant-dernière phrase commentée la correspondance entre "moindre" et "moi", page 97 (à peut-être relier à minus, "moins" en anglais).
Tiens, la 186e phrase (plutôt 185e), page 55, a 51 mots, et pour mot central "moins", tandis que la 192e phrase (plutôt 191e), page 57, a 83 mots, et pour mot central "moindre". 51 et 83 forment pour moi un couple doré particulier, parce qu'il s'agit du partage doré idéal de leur somme 134, et parce que 51,83° est "l'angle d'or", l'angle dont le cosinus est 0,618..., φ (SUIS-je-CON d'envisager le jeu du COSINUS?) Par ailleurs les mots centraux ont les rangs 26-42, dont le rapport se simplifie en les nombres de Fibonacci 13-21.
Le MOINDRE cacherait-il une MINE D'OR ?
La dernière phrase de la page 83 commence par les mots "Or, au" et s'achève sur "art, Jean.". J'avais noté la correspondance "or-argent", et remarque maintenant que le second mot est aussi le symbole chimique de l'or, Au, dont j'ai soupçonné l'écho avec (φ) dans la dernière phrase .
Deux phrases successives, page 50, ont pour symétries début-fin "Or-décor." et "Au-noyau.".
L'or a le numéro 79 dans la classification périodique, ce qui pourrait donner un indice de pourquoi l'or interviendrait dans cette contagieuse préface aux 7 nouvelles de La cathédrale de Sens et aux 9 Révolutions minuscules. Ces nombres sont souvent cités et font l'objet de divers jeux symétricologiques.
Si je n'ai pas trouvé de phrase de 79 mots qui viendrait appuyer le plus immédiatement cette hypothèse, il y a deux phrases de 97 mots, et elles montrent chacune une symétricologie élaborée, alors qu'à mon sens la plupart des phrases se limitent à un écho entre début et fin.
La première est page 59, 197e phrase (plutôt 196e), formant un paragraphe avec la phrase suivante de 49 mots, celle avec "méridional" au centre, donnée et commentée supra.
Son mot central, 49e donc, est "nommé", préparant peut-être "méridional" au coeur des 49 mots suivants. Plusieurs échos sont patents, "léger souci" avec "profond coeur", "personnelles pensées" avec "convictions intimes", "insidieux" avec "insu", d'autres peut-être.
Il s'agissait selon mon premier dénombrement de la 197e phrase, avec 197 qui pourrait se décomposer en 1 convaincante préface, 9 Révolutions minuscules, 7 nouvelles de La cathédrale de Sens.
Précisément, la dernière phrase donnée avec ses mots numérotées a 197 mots, avec "centre" pour 99e mot page 99. Parmi les 6 phrases de commentaires, la 5e compte 97 mots, avec au centre cette parenthèse, "(vous savez, le bord trop calculé de maintes parenthèses)", en 9 mots, alors qu'est évoqué ailleurs le degré neuf des parenthèses (rousseliennes).
Parmi les 329 phrases répertoriées selon la méthode exposée supra, il n'y en a qu'une où je n'ai pas repéré de symétrie début-fin, la 35e phrase, page 18:
Sinon, l'accolement "art-Jean" de la phrase vue supra me fait envisager que cette "immatriculation" pourrait être ici synonyme de "numérotation", l'art précisément à l'oeuvre dans cette complice préface (Ion est par ailleurs en roumain le prénom Jean).
La phrase se comprend à la suite du paragraphe précédent, le "volume pharamineux" étant L'univers imaginaire de Mallarmé, publié au Seuil (d'où le Seuil vespéral de Richard), et les "quelques pages" étant l'annexe Terre écrite, dont va être citée la première phrase dans le paragraphe suivant ("Te...te." peut correspondre à une symétrie ricardolienne pour ce titre, d'où l'attention à la première phrase est légitime).
Je vais m'en tenir là, espérant avoir donné une idée de ce jeu, "trop compliqué pour que quiconque, y compris vous à plus d'un titre, puisse jamais apercevoir l'intégrale transmutation que vous me paraissez avoir le dessein de faire...", aurait dit Paulhan à Ricardou (page 106).
J'ai bien entendu cherché un titre symétricologique pour ce 298e billet, en partant de la formule Unir ça (...) j'adore, anagramme de JEAN RICARDOU. Le plus satisfaisant m'a semblé
Unir ça, début, centre, terme, j'adore = 297 seulement, mais il est envisageable d'y ajouter l'unité exprimée. J'ai encore vu
Unir ça, début, ce centre, et fin, j'adore = 298, en 9 mots.
C'est l'anagramme CENTRE RECENT, découverte par hasard après avoir fini le précédent billet, qui m'a motivé pour effectuer le dénombrement des mots de cette complète préface, d'abord pour voir si ce mot "récent" y apparaissait.
Ce n'a pas été le cas, mais j'ai envie de célébrer cette nouveauté par une phrase symétricologique, et voici ce à quoi je suis parvenu:
récent qualifie ce que créent les Lutéciens du centré.
ou "du centre", mais j'ai été tenté de respecter l'accentuation. La phrase a
9 mots,
45 lettres, 9x5,
gématrie 495, 9x55 ou 45x11.
Deux phrases qui ont des débuts et fins identiques ont pour centres "centre" (page 72) et "Lutèce" (100e mot parmi 199, page 78).
Le programme envisagé pour cette année 2020 imposait la publication de ce billet le 4 avril, et je n'ai pas trouvé de 4/4 particulièrement notable (peut-être les deux fois 44 mots encadrant la parenthèse de la page 101).
Ce texte abonde en jeux cachés, qu'on pourrait appeler des "cadeaux de Noëlle", en écho aux "Easter eggs" de récentes créations. L'expression Easter egg, "oeuf de Pâques", provient d'un film de 1975, mais Ricardou s'avère encore ici un remarquable précurseur car il donnait en 1965 dans La prise de Constantinople un graphisme sur une roche qui, dans un sens, permet de lire LEON, prénom d'un des personnages, Léon Doca.
Tourné de 180 degrés, le graphisme peut se lire 4031, soit, en prenant les rangs des lettres, D-0-C-A, le nom de Léon... Ricardou appelait ce jeu son "cado de Noël".
Révélations minuscules est entièrement écrit en symétricologie, procédé dont la règle essentielle est un écho entre le début de la phrase et sa fin, écho qui peut se présenter sous de multiples formes, étudiées ici, y compris des couplages de phrases, ce dont j'ai enfin compris la raison en scrutant le texte.
C'est que Ricardou y cite diverses phrases d'auteurs divers, certaines d'entre elles étant supposées des exemples de symétricologie, parfois avec des tricheries, mais deux phrases issues de Terre écrite, l'annexe achevant Pages Paysages (1984) de Jean-Pierre Richard sont citées telles quelles, d'abord celle-ci, ouvrant le texte et lui donnant son orientation boulistique:
Combien je regrette de n'avoir jamais pu participer à l'une des messes boulistiques que présidait, si j'en crois la légende, Jean Paulhan, le dimanche matin dans le rond des Arènes de Lutèce!Jean-Pierre Richard était un ami de Ricardou, lequel participait à ces messes boulistiques, parmi diverses illustres personnalités littéraires, dont 12 sont citées page 16, Jacques Audiberti, Jérôme Lindon, Claude Simon... Le seul survivant est probablement Bernard Pivot.
Juste après cette liste, Ricardou reconnaît deux erreurs, un oubli, et l'ajout de Jean-Pierre Richard dont il cite page 18 la phrase ci-dessus. Comme elle n'est pas symétricologique, Ricardou donne ensuite une phrase reprenant les syllabes initiale et finale, inversées, soit:
Ce qu'il est facile d'apercevoir, en effet, et avec une triste évidence, c'est qu'il m'eût suffi, au lieu de m'en remettre à d'incertaines remembrances, d'en revenir plus tôt aux précédentes lignes mêmes pour que ma prose s'expurgeât du pire, peut-être, parmi ses syllogismes abscons.Les syllabes "com-ce" sont donc harmonisées par "ce-cons", à entendre "ce con", ce qu'avait bien sûr remarqué Ricardou, et est probablement une source essentielle de son texte. Car s'il estimait certains écrits de Richard, comme Pages Paysages, celui-ci avait commis la faute impardonnable d'accepter en 1978 une chaire en Sorbonne, haut lieu du conformisme qu'abhorrait Ricardou.
Est-ce à dire que "la pire parmi les structurales injures" s'adresse à l'éminent professeur? Oui, ou du moins c'est ce que peut déduire un symétricologue amateur en se penchant sur "ce texte abscons", constitué de 329 phrases (en fait plutôt 328, selon mon dernier compte), presque chacune d'entre elles nécessitant de batailler pour en discerner ne serait-ce que le sens littéral.
Quant aux sens plus secrets, il ne suffit pas de regarder le début et la fin de chaque phrase, car la symétricologie peut concerner tous les mots équidistants de ces extrêmes, et plusieurs phrases comptent plus de 200 mots...
Le décompte n'est pas facile, car les mots composés peuvent poser problème (mais Ricardou a pris soin d'éliminer certains tirets), car de nombreuses phrases contiennent des citations, en plus petit corps typographique; faut-il en compter les mots aussi? Enfin Ricardou donne des exemples d'autres codages utilisés dans son texte, par l'usage des parenthèses notamment.
Certaines de ces phrases en petit corps citent des passages antérieurs, mais toujours avec des variantes, ainsi il a été vu dans le précédent billet que les deux dernières phrases reprises avec tous leurs mots numérotées étaient différentes des phrases originales, notamment par le nombre des mots.
Je me suis résigné à l'aventure, compter les mots de chaque phrase, et aller au moins en examiner le centre. En restant aussi concis que possible, voici quelques résultats de mon travail, limités à la "dispute" entre Jean Ricardou et Jean-Pierre Richard.
Ricardou avait précédemment utilisé la symétricologie, à l'échelle d'une nouvelle, et cette préface signale que la première nouvelle de Révolutions minuscules a pour titre Jeu et débute par le mot "Je" (le lecteur peut découvrir qu'elle s'achève par le mot "jeu"), et que la dernière a pour titre Autobiographie et s'achève sur le mot "oiseaux".
Il l'a aussi utilisée à l'échelle de la phrase, et la première phrase de sa préface (tiens) aux Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel, de Leonardo Sciascia (1972), débute par "Celle" et finit par "roue".
La citation de Richard a 35 mots, avec au centre le mot "si". La réponse de Ricardou a 53 mots, avec au centre "remettre".
35+53 = 88, 8+8 = 16, le nombre de nouvelles des deux recueils, et il est souligné dans Révélations minuscules ce double du nombre fétiche de Ricardou.
"si remettre" doit-il laisser entendre "sire maître", désignant l'éminent professeur, à moins que seul "sire" lui soit destiné, tandis que Ricardou était un modeste "maître"? Il a d'abord été instituteur, puis prof dans le secondaire; il a postulé en 1976 à l'université expérimentale de Vincennes, où enseignait alors Richard, mais sa candidature a été rejetée.
Il est souligné que le nom Ricardou signifie "petit Richard".
Ricardou reprend page 57 "l'indispensable citation d'un éminent professeur de Sorbonne", avec quelques variantes:
Minutieux tel que je le suis, combien je regrette de n'avoir jamais pu participer à l'une des messes boulistiques que présidait, si j'en crois cet extrait, Jean Paulhan, le jour du seigneur, au-dessus des Arènes de Lutèce!Sa réponse devient
Ce qu'il est facile d'apercevoir, en effet, et avec une triste évidence, c'est qu'il m'eût suffi, au lieu de m'en remettre à d'incertaines remembrances, d'en revenir plus tôt, tel est le privilège du retour, à ces précises lignes mêmes, pour que mes propos s'expurgeassent du pire, peut-être, parmi les structurales injures dont ils étaient trop munis.et il constate que s'est écrit à son insu "ce minus", anagramme des termes extrêmes "ce" et "munis".
Peut-être peut-on en déduire que, dans cette "minuscule préface", "ce minus" s'applique au minutieux Ricardou, au "petit Richard", et "ce con" au "doctueur" Richard. Ricardou emploie page 89 pour l'éminent professeur l'expression "célèbre doctueur Richard, ou Cottard". Il y a dans La peste de Camus un bon docteur Richard, qui meurt de la maladie, et un vil personnage nommé Cottard.
Pages 62-63, Noëlle répond à son frère par une phrase où, entre parenthèses, elle dit s'efforcer d'éviter de former "ce minus" par les termes extrêmes. La phrase débute par "Conçois-tu quelque peu, cependant", et s'achève sur "abscons, ton trop rhétorique artifice." Malgré ses efforts structuraux, Noëlle offre à deux reprises "ce con", en reprenant l'adjectif "abscons" qui achevait la réponse de Ricardou à la phrase de Richard, avec des "syllogismes abscons" devenus des "structurales injures" dans sa récriture.
Il pourrait y avoir des correspondances plus précises, notamment page 51, avec "l'éminent critique de la Sorbonne", où "critique" est le 54e mot à compter de la fin de la phrase, tandis que le 54e mot à partir du début est "inconscient", à peut-être comprendre "un con savant".
Cette phrase insiste sur les ressemblances entre les noms Richard et Ricardou, dont un aspect est souligné page 53, dans une phrase de 117 mots dont le mot central est "Ricardou", avec
le passage du lent "char" français au vif anglais "car",Dans cette phrase, "vite" est symétrique de "diligence", en position 25 ("vite" est le centre d'une phrase de 123 mots page 14).
25 est la position centrale de la première phrase décortiquée selon la symétricologie, d'abord donnée page 59:
Certes, et sauf bien entendu, à se trouver hélas démuni du minutieux concept d'expertise scalaire, a-t-il poursuivi dans son insupportable jargon méridional, il y a, selon la très secrète coutume, deux symétriques façons, ce désir, pour réussir, décisivement avec l'une peut-être, à enfin l'exaucer.La phrase est reprise en petit corps page 67, ainsi:
C'est, l'on s'en souvient j'espère, ce fragment un rien déplacé:. Les 14 mots introductifs débutent et finissent par le son "cé" (ou "cè", mais les méridionaux ne font guère la différence), comme la phrase citée, avec de minuscules différences ("hélas" antéposé, et "exhausser" au lieu de "exaucer").
Certes, et sauf bien entendu, à hélas se trouver démuni du minutieux concept d'expertise scalaire, a-t-il poursuivi dans son insupportable jargon méridional, il y a, selon la très secrète coutume, deux symétriques façons, ce désir, pour réussir, décisivement avec l'une peut-être, à enfin l'exhausser.
Il y a encore les italiques, dont Ricardou rend compte dans cette phrase:
M'en voudra-t-on si j'observe qu'elle pourrait bien avoir jailli dans une âme, en effet, je restreins, comme la secrète conscience de ce qui était précisément en train d'advenir, en l'écrit, avec telles deux lisibles symétriques formules: "démuni du minutieux" et "désir, pour réussir, décisivement" ?C'est moi qui ai souligné "de", mot central de cette phrase de 51 mots, et les syllabes "con" et "ce" des mots qui encadrent ce centre. Il est maintenant loisible de remarquer que les mêmes syllabes apparaissaient après et avant les deux "symétriques formules", avec "concept" et "ce".
La phrase est reprise page 68, avec ses mots numérotés:
(1) Certes, (2) et (3) sauf (4) bien (5) entendu, (6) à (7) hélas (8) se (9) trouver (10) démuni (11) du (12) minutieux (13) concept (14) d' (15) expertise (16) scalaire, (17) a (18) -t- (19) il (20) poursuivi (21) dans (22) son (23) insupportable (24) jargon (25) méridional (25), il (24) y (23) a (22), selon (21) la (20) très (19) secrète (18) coutume (17), deux (16) symétriques (15) façons (14) , ce (13) désir (12), pour (11) réussir (10), décisivement (9) avec (8) l' (7) une (6) peut-être (5), à (4) enfin (3) l' (2) endosser (1).Le dernier mot a encore été modifié, "endosser", après "exaucer" et "exhausser".
Ricardou signale d'abord que les pivots des expressions symétriques, "démuni du minutieux" et "désir, pour réussir, décisivement", sont eux-mêmes symétriques dans la phrase, "(11) du" et "pour (11)", mais se garde bien d'évoquer les mots adjacents, "(13) concept" et "ce (13)". Il pourrait y avoir davantage, ces termes étant équidistants, l'un du premier mot et du mot central, l'autre de ce mot central et du dernier mot. Et, bien sûr, "concept" jouxte le mot "minutieux"; dans cette phrase de 7 fois 7 mots, il laisse encore entendre "sept", l'un des nombres clés des deux recueils, avec les 7 nouvelles de La cathédrale de Sens adjointes aux 9 Révolutions minuscules.
Noëlle interroge Jean à propos de ce mot central, dans une phrase où "minutieux" fait écho à "son" (un euphémisme courant pour "con"). Jean répond:
- Il me semble, du moins à un brin réfléchir, que le terme du centre, signalé, de part et d'autre, avec le même chiffre, "(25) méridional (25)", puisqu'à l'évidence il supporte l'idée d'un milieu divisant le jour juste, moire son site, précisément, d'un accent peu subtil.Il s'agit à nouveau d'une phrase de 49 mots, dont "méridional" est encore le 25e mot, mais il y a davantage, avec l'écho entre "(14) centre" et "milieu (14)". Il peut y avoir une résonance aussi entre "moire" et "réfléchir".
Par ailleurs, parmi les précurseurs de la symétricologie, Ricardou cite les deux premiers et deux derniers vers du Cimetière marin,
Ce toit tranquille, où marchent des colombes,Les vers 3 et 4 de Valéry sont
Entre les pins palpite, entre les tombes ;
(...)
Rompez, vagues ! Rompez d’eaux réjouies
Ce toit tranquille où picoraient des focs !
Midi le juste y compose de feuxCe "Midi juste" pourrait ne pas être étranger au "méridional (...) juste" de Ricardou, dont plusieurs phrases ont pour centres "juste centre" (page 47), "juste" (pages 15 et 74), "centre" (pages 72 et 99).
La mer, la mer, toujours recommencée !
Quant au mot "midi", il apparaît souvent, presque toujours accompagné de "minuit", en probable référence symétrique à L'art du X, dernière nouvelle du second recueil que j'ai étudiée ici et là, et "midi le juste" apparaît effectivement page 100 pour désigner la position centrale du mot "centre".
"recommencée": la phrase qui expose la symétricologie du recueil Révolutions minuscules, page 48, a 163 mots dont le mot central est "commencé", qui commence par "COM" et finit par "CE", comme la phrase de regret de Richard.
Richard et Ricardou admiraient l'oeuvre de Mallarmé. Ricardou suggère que dans le fameux Sonnet en X, le "septuor" final répondrait à l'initial "Ses purs ongles". Il utilise aussi le sonnet de Mallarmé débutant par
M’introduire dans ton histoireet s'achevant sur
Comme mourir pourpre la rouequ'il modifie en
Du seul vespéral de mes chars
Du Seuil vespéral de Richard(page 93), l'oeuvre majeure de Richard étant parue au Seuil, puis en
Du seul vespéral RicaRdou(page 94), et enfin en.
Comme mourir pourpre la Roue(page 98). Il s'agit de Raymond Roue-sel, annoncé par les deux R majuscules de RicaRdou, en référence au monogramme de Roussel.
Du sel vespéral de Raymond
Le but de ces manoeuvres était probablement de forger l'écho entre "M'introduire" et "Raymond". A plusieurs reprises (7), l'écho symétricologique est entre I et O, la lettre ou le son. Ainsi l'on a "Inexorablement-numéro." pour la phrase page 52 reprise numérotée page 95, "Y-crescendo." page 73, "Ou-"i"." pages75-76. Les nasalisations "in-on" seraient une innovation.
Ricardou donne dans la phrase suivant "Ou-"i".", page 76, la valeur symétricologique de cette correspondance:
Il eût sans doute été convenable par suite, qu'il avouât, plus simplement encore, les interminables hypnoses, que n'avait-il rêvassé, en lesquelles le plongeait, à l'improviste, depuis qu'hélas il en avait perçu l'existence, et parce que, Dieu sait pourquoi, il accordait à la première (la seconde) une valeur masculine et un caractère féminin à la seconde (la pénultième), le symétrique vis-à-vis, il prononçait "le vice à vie", en l'abracadabrante kyrielle des lettres de son cryptopatronyme, du "i" avec le "o".Traduction: le I masculin est symétrique du O féminin dans le nom RICARDOU.
Les deux mots au centre de cette phrase de 86 mots sont "sait pourquoi", dont le plus immédiat pourrait être les 4 et 8 lettres, les "fétiches numéros" de JEAN RICARDOU.
C'est peut-être son obsession pour Roussel qui a inspiré la signature de Ricardou réduite aux initiales JR, la "triple fourche" évoquée à diverses reprises dans cette "minutieuse préface".
Roussel devient "Roussil" en page 100, vraisemblablement pour la symétrie "O-I". Ricardou a encore probablement remarqué que M est au milieu de RAYMOND, encadré par Y et O.
Note: çoeur Erica m'informe que la signature JR est d'abord inspirée par les empreintes de pattes d'oiseaux, d'où les "empreintes d'oiseaux" achevant la nouvelle Autobiographie (et le recueil Révolutions minuscules).
L'oeuvre peut-être la plus fascinante de Roussel, Nouvelles impressions d'Afrique, est magnifiée par la phrase "Inexorablement-numéro." de la page 52, où ce titre en 4 mots trône au centre de ses 108 mots.
La phrase de la page 76 que je viens de citer "In extensO" est suivie par une phrase en 138 mots débutant par "Il" (Jean) et finissant par "soeur jumelle." (Noëlle), évoque la fiction essentielle de Ricardou, La prise/prose de Constantinople, et ses "deux titres spectaculaires, en face à face".
Au centre de ces 138 mots figurent précisément les 8 mots des titres alternatifs de l'ouvrage, mais Ricardou les a modifiés en La prise de la rose, La prose dérisoire, si bien que les mots "prise" et "prose" s'y trouvent symétriques.
Un personnage énigmatique de La poussière de soleils, de Roussel, a pour seule appellation le Minus-Habens.
Au mot RICARDOU pourrait correspondre, ou s'opposer car ce n'était pas sa qualité la plus péremptoire, le mot MODESTIE, également en 8 lettres avec O et I aux mêmes positions, inversées. Ce mot apparaît à plusieurs reprises dans cette "confuse préface", notamment achevant page 69 une phrase qui débute par un mot de 8 lettres, TIENDREZ, et dans une phrase page 101 dont les mots centraux sont "avec modestie, j'en". Les 4 et 8 lettres de "avec modestie" font donc écho à "j'en", à probablement comprendre "Jean".
De quoi s'interroger sur l'abondance de l'expression "j'en conviens" dans cette complexe préface, notamment au centre de sa dernière phrase.
Il faut encore revenir sur la dernière phrase numérotée par Ricardou pages 99-100, en 197 mots avec "centre" pour 99e mot, mais la phrase originale page 47 a 200 mots, les 100es mots centraux étant "juste centre":
Parmi divers changements, la phrase reprise pages 99-100 s'achève sur "je ne sais pas pourquoi, la mise à nu d'une improbable concordance.", avec un mot final se suffisant à lui-même, "concordance". Ailleurs, page 17, Ricardou associe le mot "compétence" à l'éminent professeur, et "connaissance" page 29.
Les jeux avec "ce con" ne sont qu'un aspect de cette compulsive préface, laquelle nécessiterait probablement des volumes entiers pour dénicher les "cadeaux de Noël" semés par Ricardou, sans garantie de décoder tous les jeux prévus, ni de mettre à jour des niveaux imprévus.
C'est cet aspect qui m'intéresse, et m'a motivé pour décortiquer toute cette confuse préface. Je rappelle que j'y ai relevé d'emblée trois coïncidences majeures:
- D'abord l'inscription dans un espace minime, le rectangle que j'ai tracé plus haut sur le scan de la page 47, des lettres ROMAN NOVEL qui me sont depuis longtemps significatives. Au cours de cette étude j'ai fait une découverte reliée à ce jeu qui sera le juste sujet du prochain billet; avant une étude détaillée je l'ai ajoutée en note à la fin de ce billet.
- Cette phrase est reprise page 99, avec "centre" pour 99e mot central, et une référence dans le texte à cette page 99. Il y a de même dans l'autre recueil une autoréférence dans le texte à sa page 61, or 99-61 sont les valeurs des mots NOUVEAU-ROMAN. Le précédent billet m'a été l'occasion d'un prolongement, avec la constatation que, selon la gématrie ricardolienne, mais je n'imagine guère que Ricardou l'ait effectivement prévu,
NOUVEAU ROMAN = LECTEUR NEUF = 81 45.
Son oeuvre la plus vendue, l'essai Le nouveau roman, portait en exergue Aux nouveaux lecteurs.
- Enfin j'ai remarqué dans cette constructive préface ses deux phrases finales de 183 et 226 mots, car 183 et 226 sont deux des mesures du Modulor, correspondant à la taille de l'homme jusqu'à la tête, et jusqu'à son bras levé.
J'avoue n'être pas certain que ceci n'ait pas été calculé par Ricardou, car la dernière phrase contient en position 9 à partir de la fin "(φ)", symbole du nombre d'or, symétrique de "au", symbole du métal or. Par ailleurs, un couple de phrases pages 73-74 semble établir la liaison entre "Or" et "nombre.".
D'autres éléments sont venus lors du décorticage de cette confraternelle préface. La 183e phrase (plutôt 182e), page 54, a 113 mots, or le Modulor est basé sur une taille idéale de l'homme de 183 cm dont la section d'or tombe au niveau du nombril, à 113 cm.
Cette phrase offre quelques subtilités, débutant par "Bref" et finissant par "ténèbres.", avec pour mot central "longtemps". Une symétrie intérieure apparaît entre "moins" et "moindre", alors que Ricardou souligne dans l'avant-dernière phrase commentée la correspondance entre "moindre" et "moi", page 97 (à peut-être relier à minus, "moins" en anglais).
Tiens, la 186e phrase (plutôt 185e), page 55, a 51 mots, et pour mot central "moins", tandis que la 192e phrase (plutôt 191e), page 57, a 83 mots, et pour mot central "moindre". 51 et 83 forment pour moi un couple doré particulier, parce qu'il s'agit du partage doré idéal de leur somme 134, et parce que 51,83° est "l'angle d'or", l'angle dont le cosinus est 0,618..., φ (SUIS-je-CON d'envisager le jeu du COSINUS?) Par ailleurs les mots centraux ont les rangs 26-42, dont le rapport se simplifie en les nombres de Fibonacci 13-21.
Le MOINDRE cacherait-il une MINE D'OR ?
La dernière phrase de la page 83 commence par les mots "Or, au" et s'achève sur "art, Jean.". J'avais noté la correspondance "or-argent", et remarque maintenant que le second mot est aussi le symbole chimique de l'or, Au, dont j'ai soupçonné l'écho avec (φ) dans la dernière phrase .
Deux phrases successives, page 50, ont pour symétries début-fin "Or-décor." et "Au-noyau.".
L'or a le numéro 79 dans la classification périodique, ce qui pourrait donner un indice de pourquoi l'or interviendrait dans cette contagieuse préface aux 7 nouvelles de La cathédrale de Sens et aux 9 Révolutions minuscules. Ces nombres sont souvent cités et font l'objet de divers jeux symétricologiques.
Si je n'ai pas trouvé de phrase de 79 mots qui viendrait appuyer le plus immédiatement cette hypothèse, il y a deux phrases de 97 mots, et elles montrent chacune une symétricologie élaborée, alors qu'à mon sens la plupart des phrases se limitent à un écho entre début et fin.
La première est page 59, 197e phrase (plutôt 196e), formant un paragraphe avec la phrase suivante de 49 mots, celle avec "méridional" au centre, donnée et commentée supra.
Son mot central, 49e donc, est "nommé", préparant peut-être "méridional" au coeur des 49 mots suivants. Plusieurs échos sont patents, "léger souci" avec "profond coeur", "personnelles pensées" avec "convictions intimes", "insidieux" avec "insu", d'autres peut-être.
Il s'agissait selon mon premier dénombrement de la 197e phrase, avec 197 qui pourrait se décomposer en 1 convaincante préface, 9 Révolutions minuscules, 7 nouvelles de La cathédrale de Sens.
Précisément, la dernière phrase donnée avec ses mots numérotées a 197 mots, avec "centre" pour 99e mot page 99. Parmi les 6 phrases de commentaires, la 5e compte 97 mots, avec au centre cette parenthèse, "(vous savez, le bord trop calculé de maintes parenthèses)", en 9 mots, alors qu'est évoqué ailleurs le degré neuf des parenthèses (rousseliennes).
Parmi les 329 phrases répertoriées selon la méthode exposée supra, il n'y en a qu'une où je n'ai pas repéré de symétrie début-fin, la 35e phrase, page 18:
L'art de ces denses quelques pages, très attentif aux matérielles assises sur quoi tout ledit jeu repose, se plaît à rendre sensible, d'emblée, non sans délicatesse, la solide géographie du sol, tandis que le célèbre volume pharamineux, à l'inverse, nul ne l'ignore, rompait toujours la spécifique consistance du poème selon maints fragments épars, pour l'interminable profit, sans doute imaginaire, d'une assemblée de thèmes en cours d'immatriculation.Erica Freiberg, confidente et collaboratrice de Ricardou, n'a pu m'éclairer sur ce point. Peut-être s'agit-il d'un clinamen, l'erreur dans le système chère aux Oulipiens.
Sinon, l'accolement "art-Jean" de la phrase vue supra me fait envisager que cette "immatriculation" pourrait être ici synonyme de "numérotation", l'art précisément à l'oeuvre dans cette complice préface (Ion est par ailleurs en roumain le prénom Jean).
La phrase se comprend à la suite du paragraphe précédent, le "volume pharamineux" étant L'univers imaginaire de Mallarmé, publié au Seuil (d'où le Seuil vespéral de Richard), et les "quelques pages" étant l'annexe Terre écrite, dont va être citée la première phrase dans le paragraphe suivant ("Te...te." peut correspondre à une symétrie ricardolienne pour ce titre, d'où l'attention à la première phrase est légitime).
Je vais m'en tenir là, espérant avoir donné une idée de ce jeu, "trop compliqué pour que quiconque, y compris vous à plus d'un titre, puisse jamais apercevoir l'intégrale transmutation que vous me paraissez avoir le dessein de faire...", aurait dit Paulhan à Ricardou (page 106).
J'ai bien entendu cherché un titre symétricologique pour ce 298e billet, en partant de la formule Unir ça (...) j'adore, anagramme de JEAN RICARDOU. Le plus satisfaisant m'a semblé
Unir ça, début, centre, terme, j'adore = 297 seulement, mais il est envisageable d'y ajouter l'unité exprimée. J'ai encore vu
Unir ça, début, ce centre, et fin, j'adore = 298, en 9 mots.
C'est l'anagramme CENTRE RECENT, découverte par hasard après avoir fini le précédent billet, qui m'a motivé pour effectuer le dénombrement des mots de cette complète préface, d'abord pour voir si ce mot "récent" y apparaissait.
Ce n'a pas été le cas, mais j'ai envie de célébrer cette nouveauté par une phrase symétricologique, et voici ce à quoi je suis parvenu:
récent qualifie ce que créent les Lutéciens du centré.
ou "du centre", mais j'ai été tenté de respecter l'accentuation. La phrase a
9 mots,
45 lettres, 9x5,
gématrie 495, 9x55 ou 45x11.
Deux phrases qui ont des débuts et fins identiques ont pour centres "centre" (page 72) et "Lutèce" (100e mot parmi 199, page 78).
Le programme envisagé pour cette année 2020 imposait la publication de ce billet le 4 avril, et je n'ai pas trouvé de 4/4 particulièrement notable (peut-être les deux fois 44 mots encadrant la parenthèse de la page 101).
Mais le 15e chapitre de Novel Roman, écrit pour sa seconde moitié en symétricologie, s'est trouvé par hasard publié le 4 avril 2018. J'ai pour ma part eu à coeur d'écrire des phrases simples, et d'en livrer le décodage complet ici. J'y remarquais avoir écrit 81 phrases, sans préméditation, et ce nombre s'est révélé être la valeur de NOUVEAU comme de LECTEUR dans le précédent billet (en "gématrie ricardolienne").
Effectuant une recherche sur les "messes boulistiques" de Richard, l'une des rares références est un article de Patrick Longuet où la comparaison de Richard de l'écriture au jeu de boules s'inscrit dans la quaternitas des pères de l'Eglise.
Mon précédent billet a été en résonance avec le blog Alluvions de Patrick Bléron, où a été publié le 11 mars La grande maladie du vieux temps, conduisant à un écho entre "9" et la peste, notamment le roman de Camus. J'ignorais alors que Ricardou y faisait allusion, avec le "doctueur Richard, ou Cottard". Les échos novénaires se poursuivent dans les articles suivants de Patrick.
Note: en fait, l'indispensable çoeur dp me signale que ce "doctueur Cottard" fait plus probablement référence au Docteur Cottard de La Recherche, à laquelle Ricardou se reporte souvent. Il a peut-être inspiré le personnage de Camus.
Derniers développements sur Révélations minuscules ici.
Effectuant une recherche sur les "messes boulistiques" de Richard, l'une des rares références est un article de Patrick Longuet où la comparaison de Richard de l'écriture au jeu de boules s'inscrit dans la quaternitas des pères de l'Eglise.
Mon précédent billet a été en résonance avec le blog Alluvions de Patrick Bléron, où a été publié le 11 mars La grande maladie du vieux temps, conduisant à un écho entre "9" et la peste, notamment le roman de Camus. J'ignorais alors que Ricardou y faisait allusion, avec le "doctueur Richard, ou Cottard". Les échos novénaires se poursuivent dans les articles suivants de Patrick.
Note: en fait, l'indispensable çoeur dp me signale que ce "doctueur Cottard" fait plus probablement référence au Docteur Cottard de La Recherche, à laquelle Ricardou se reporte souvent. Il a peut-être inspiré le personnage de Camus.
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