31.12.23

84


à Theo & Neila

  16 décembre: je me couche avec Psycho Killer, un roman de "Anonyme" emprunté quelques jours plus tôt, peut-être parce que je venais de relire Mortelles voyelles, de Gilles Schlesser, tournant autour du roman anonyme A noir. J'en ai parlé notamment ici.
  C'est le 5e livre de cet "Anonyme", auteur anglo-saxon qui a débuté logiquement par Le livre sans nom (2010, 2006 pour l'original The Book with no name). Psycho Killer a pour particularité que sa traduction française est parue en 2013, avant l'édition anglaise en 2015.
  Au réveil le lendemain, mon regard s'est posé sur la couverture de Psycho Killer, posé la veille sur l'amas de livres en désordre à côté du lit, et j'ai été frappé par la correspondance entre les orbites vides du crâne et un grand 8 sur la partie visible de la couverture de 84 K à proximité, un livre enfoui sous quelques autres...
  J'avais été attiré par ce nombre 84, sensible dans mes recherches jungiennes, et j'avais acheté ce roman de SF en 2021, peut-être aussi séduit par ses 83 chapitres. Hélas sa lecture m'avait vite rebuté.

  Encore hélas, je n'ai d'abord été frappé que par ce double 8, et n'ai pas songé à fixer la disposition exacte des livres à mon réveil, disposition qui, il me semble, accentuait la coïncidence. 
  Je l'ai regretté lorsque je me suis avisé que ce double 8 faisait écho à mon précédent billet, consacré à la construction octale des Huit coups de l'horloge de Maurice Leblanc. Il m'est alors revenu que, lors de l'écriture de ce billet, je n'avais pas du tout pensé que, 5 mois plus tôt, j'avais découvert une autre surdétermination octale dans L'anneau de Moebius (2008), de Thilliez.
  De même, alors que j'avais écrit Le huitième horloger de l'hexagone il y a quelque 25 ans, je crois n'y avoir pas pensé à propos des 8 de Thilliez. 
  Je ne vais pas m'apitoyer à nouveau sur la déliquescence de ma cervelle, et je passe au 20 décembre, où j'ai découvert dans ma boîte aux lettres le numéro 25 de L'Aiguille preuve, publication annuelle de l'AAAL, l'Association des Amis d'Arsène Lupin, à laquelle j'ai réadhéré cette année.

  Ce numéro, Arsène Lupin ou le grand horloger, est essentiellement consacré aux Huit coups de l'horloge dont c'est le centenaire de la publication française, mais j'y ai appris avec surprise qu'il y en avait eu une antérieure en anglais, d'abord en feuilleton dans la revue US Metropolitan Magazine, à partir d'octobre 1921, puis en livre, en 1922.
  Il y a des différences dans cette première version, ou deux nouvelles sont interverties, la 3, Thérèse et Germaine, et la 5, Le cas de Jean-Louis. Ceci perturbe quelque peu les symétries que j'étudiais dans le précédent billet, mais peut-être cette interversion est-elle un choix de l'éditeur américain.

  Il y a bien plus ennuyeux, car mon idée d'une symétrie de thèmes abordés de manière tragique et légère est née des ressemblances entre l'histoire 6, La dame à la hache, où Hortense est menacée par la hache d'une folle, et l'histoire 4, Le film révélateur, où la soeur d'Hortense est poursuivie en forêt par un énergumène brandissant une hache.
  Mais l'énergumène est son amant, et ils répètent des rôles qu'ils comptent proposer à Los Angeles (Holy wood avais-je suggéré, pour une autre expression en 8 lettres débutant par H).
  Or, dans l'édition anglaise, Rose-Andrée n'est pas la soeur d'Hortense, mais une vague connaissance. Dalbrèque ne la poursuit pas avec une hache, et ils n'envisagent pas d'aller faire carrière à Los Angeles.

  Ce n'est ennuyeux que pour les amateurs de saine logique, et il ne me déplait pas que ma construction soit démentie par l'analyse génétique. Ainsi Leblanc aurait après coup (de l'horloge) modifié sa première mouture pour l'adapter à ma théorie future... J'ai rencontré des cas analogues, notamment dans les différentes versions de pièces de Bach.
  Mais qui sait ce qui s'est exactement passé pour cette première édition? Ce qui est sûr, c'est que le recueil est resté tel qu'il était en 1922, et on en trouve le texte ici. Il ne semble pas y avoir de différences pour les autres nouvelles.

  Ce cas n'est pas un cas unique chez Leblanc, et j'ai étudié ici celui des Dents du tigre, paru en 1920 en français, mais dont une traduction était parue dès 1914 aux USA.
  Cela pourrait porter à reconsidérer l'affaire du Cercle rouge, la parution simultanée en mars-avril 1911 d'une aventure de Sherlock Holmes et d'une de Lupin offrant d'étranges similitudes. Je ne trouve pas trace d'une parution antérieure des Confidences d'Arsène Lupin, mais l'existence de traductions antérieures aux parutions françaises peut amener à diverses hypothèses.

  Je m'émerveille de cette découverte d'une première édition anglaise des Huit coups de l'horloge juste après avoir lu Psycho Killer, roman anglais dont la première édition a été française.

  Un lecteur du précédent billet, Gef, m'a signalé une coïncidence. Au moment où il arrivait au point où Rénine-Hortense me faisait penser à la reine Hortense, sa femme lui parla du film espagnol El Reino ("le royaume").
  Incidemment, le film est dit porté par l'acteur principal, Antonio de la Torre, et la première nouvelle des Huit coups est Au sommet de la tour.

  Je ne connaissais pas ce film, et il y eut un rebond deux jours plus tard. Je voulais voir une saison d'Engrenages, et lorsque j'inscrivis "engrenage" dans la fenêtre de recherche d'un site de streaming, il apparut ces 6 titres, parmi les quelque 10000 titres de films ou séries sur le site.
  Le titre apparaît parce que le mot engrenage figure dans son résumé:
Manuel López-Vidal est un homme politique influent dans sa région. Alors qu'il doit entrer à la direction nationale de son parti, il se retrouve impliqué dans une affaire de corruption qui menace un de ses amis les plus proches. Pris au piège, il plonge dans un engrenage infernal...
  Psycho Killer m'a amené une autre coïncidence "royale". Une enquêtrice y rencontre un criminel qui avait prétendu être atteint du syndrome des personnalités multiples, et avait choisi comme nom de son autre personnalité Roy, comme le jeune tueur de Peur primale. J'avais vu ce film en son temps, 1996, donc 1998 à la TV, mais je ne savais pas que le jeune Aaron/Roy était Edward Norton, lequel jouerait plus tard L'illusionniste, un de mes films favoris.
  Y jouait aussi Andre Braugher, Cassiel dans La cité des anges, remake des Ailes du désir de Wenders. J'apprends que Braugher est mort ce 11 décembre, a seulement 61 ans. Lors de l'écriture début 2014 du Calisse qui tue, j'avais appris la mort récente de l'autre Cassiel, Otto Sander.
  Un Roy dans une histoire de personnalités multiples me rappelle la fantastique sortie simultanée des films Dédales (France) et Identity (USA). Parmi les multiples coïncidences entre les deux films, il y avait les noms Ray (autre forme de "roi") et Malik ("roi" en arabe).

  Il m'a semblé devoir faire l'effort de lire 84 K, et je ne l'ai pas regretté. J'ai du mal avec les récents auteurs de SF, souvent exigeants avec leurs lecteurs. C'est le cas de ce roman, à l'intrigue éclatée, aux personnages non présentés d'emblée, aux particularités stylistiques parfois déroutantes.
  Enfin, c'est peut-être moi qui suis out...
  Les deux personnages principaux sont Theo et Neila, et je me suis avisé que, ayant dédié le précédent billet
à Hortense & Daniel
soit le prénom et le nom de l'héroïne des Huit coups de l'horloge, avec une arrière-pensée pour Daniel Nathan, alias Dannay, alias Queen (Hortense?), les lettres THEO et NEILA étaient contenues dans ces deux mots, d'où la dédicace de ce billet (et l'auteur NORTH est aussi dans Hortense).
  On ne sait pas comment Theo et Neila se sont rencontrés, ni ce qui les réunit, et ils ne sont pas nés Theo et Neila. Elle est une transsexuelle, née Neil, et lui est présenté comme "l'homme appelé Theo Miller", et dans les flashbacks "le garçon qui deviendra Theo". On ne connaîtra pas sa réelle identité.
  "Theo" et cette ambiguïté m'ont rappelé une des premières phrases de Cristal qui songe de Theodore Sturgeon, roman qui m'a fasciné au point de le lire d'une traite après l'avoir débuté, pratiquement sans relever les yeux, le jour de mes 21 ans. Le jeune Horton est le fils des Bluett, mais
Armand et Tonta n'étaient pas les véritables parents de Horty. Ceux-ci habitaient à l'étage supérieur, mais les Bluett l'ignoraient.
  On ne tardera pas à savoir que ces "parents" sont les cristaux qui forment les yeux du jouet de Horton, un diable à ressort. Ceci permet à Horton de changer de sexe à volonté, et il devient Hortense dans la troupe du Cannibale.

  Theodore Sturgeon est aussi celui qu'a choisi Daniel Nathan pour finaliser le synopsis de L'adversaire (1963), une histoire de personnalités multiples où John Henry Walt est aussi Nathaniel, équivalent hébraïque de Theodore, et Dieu, soit JHW(H), El, Theo...

  84 K se passe dans une Angleterre où les riches peuvent ne pas répondre de leurs forfaits pourvu de payer. Ce n'est pas très nouveau (Selon que vous serez puissants ou misérables...), mais a évolué en une tarification très élaborée. 
  Ainsi l'ancienne amie de Theo, Dani, a été assassinée, et sa meurtrière s'en tire en payant 84 000 £ (84 K).
  Les lettres DANI sont aussi dans DANIEL, comme NEILA.

  Theo, Theodore, Theodor Haemmerli... Jung n'est jamais loin de ma pensée, et j'ai vu un autre écho entre Psycho Killer et 84 K, après le 8 qui m'est apparu dans les orbites vides du crâne.
  Psycho Killer a un court prologue et 55 chapitres. Son numéro ISBN est 9-782355-842276.
  J'ai étudié l'an dernier deux romans de 55 chapitres (net, sans prologue ni épilogue) dont la partie numéro de publication se terminait par 55. Ici 55 se partage entre le numéro d'éditeur et celui de publication, mais le code-barres affiche une séparation après 55.
  La séparation entre 55 et 84 m'est significative, car 55 et 84 sont en rapport d'or optimal avec les valeurs 34 et 52 de CARL et JUNG.
  Ceci a donné lieu à une apothéose en 1955, lorsque Jung a reçu une carte, en provenance de Kos, du frère du docteur qui l'avait sauvé en 1944, Armin Haemmerli, et
ARMIN HAEMMERLI = 55+84.
  J'ai donné ici le texte complet de la réponse de Jung, le seul courrier notable envoyé à Armin, semble-t-il. Jung s'y déclare profondément touché par cet envoi de Kos, parce que Theodore lui était apparu dans ses visions sous la forme de Prince de Kos, et comment cela lui avait fait craindre pour sa santé. Theodor en avait ri, mais, le 4/4/44, le jour où débuta la convalescence de Jung, il dut s'aliter pour ne plus se relever.

  Avant de découvrir ça, le rapport 84/52 (=21/13) m'était déjà essentiel car 13 et 21 étaient mes Fibos fétiches (les suivants dans la suite de Fibonacci sont 34 et 55.
  Dans 84 K sont donnés les tarifs pour divers délits. L'un des moins onéreux est le viol, 8452 £.

  Il y a bien d'autres choses à dire de ce roman, j'y reviendrai prochainement.

  A propos des Huit coups de l'horloge, l'AAAL signalait que 8 est un nombre porte-bonheur en Chine, où la cérémonie d'ouverture des JO de 2008 avait été débutée le 8/8/08 à 8:08.
  Par contre, 4 est porte-poisse, et j'ai parlé quelque part d'une personne née un 4/4/44 qu'aucun hôtel en Chine n'acceptait d'accueillir.


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