12.2.21

révolutions énumérées


pour Anne

  Suite des investigations sur Révélations minuscules, en guise de préface, à la gloire de Jean Paulhan, la préface à Révolutions minuscules de Ricardou notamment étudiée dans le précédent billet, avec tous les renvois à mes précédentes études.
 
  Au-delà de la symétricologie et du compte des mots dans les phrases, je distingue maintenant un autre niveau de codage concernant le numérotage des phrases et des paragraphes. Si le décompte des mots dans les phrases est parfois sujet à caution, par exemple en ce qui concerne les mots composés, les comptes de phrases et de paragraphes sont peu contestables, à condition d'être rigoureux sur le choix des critères.
  Après minutieuses vérifications, je crois pouvoir assurer que le texte compte 328 phrases débutant en italique corps 13, réparties en 219 paragraphes.
  Un doute peut subsister quant à la signature finale, Noëlle Riçoeur, également en italique corps 13, avec le même retrait que les paragraphes. Cette prétendue soeur de l'auteur est évidemment fictive, et la signature fait donc partie du texte.
  Un premier décompte m'avait conduit à 329 phrases, éventuellement significatif sous la forme 328+1, mais je n'avais pas alors de raison particulière de mettre à part telle ou telle phrase, alors que le décompte définitif de 328 phrases + l'éventuelle signature serait mieux adéquat.

  Quoi qu'il en soit, je ne vais m'attacher ici qu'à des positions de phrases ou de paragraphes, et je commence par un exemple plutôt convaincant, j'espère.
  Ricardou était obsédé par les 4 et 8 lettres de ses prénom et nom; il en est d'ailleurs plusieurs fois question dans le texte, et cette obsession conduit aux nombres dérivés 12 (4+8, nombre de mots du titre et de participants aux messes boulistiques, entre autres), 32 (4x8, l'année de naissance 1932), 48 (ici le prétendu numéro de la rue Monge permettant d'accéder aux Arènes de Lutèce, c'est en fait le n° 49), 84.
  Pas de présence explicite d'un "84", mais voici le paragraphe 84:
      C'est alors (à peine avais-je fait pivoter, n'est-ce pas, comme il sied, en écho, sa manuscrite menue page) qu'il lui fallut convenir, et, sitôt, ce fut, étrangement, sa prompte guérison, que beaucoup, sauf à décidément ne rien entendre, devait se voir de nouveau renversé.
  Il est constitué d'une seule phrase (numéro 152) de 48 mots précisément. L'écho symétricologique est entre "c'est" et "renver", en 4 et 8 lettres, et chacun peut constater que 84, c'est 48 renversé.
  Il peut y avoir davantage, car le centre de la phrase se situe entre "il" et "lui", entre deux "L", deux "elle" ou deux "ailes" exploitées dans Le lapsus circulaire, texte éminemment complémentaire de Révélations minuscules.
  Par ailleurs CESTREN-VERSE peut se réarranger en CENTRES et REVES, mots particulièrement à l'honneur dans Révélations minuscules et dans Le lapsus circulaire.

  Qu'en est-il du paragraphe 48? Il est constitué de 4 phrases (numéros 87 à 90), les échos symétricologiques étant "c'est intéressée", "on rond", " alors " "le  exemples". Le paragraphe débute donc par "c'est" en 4 lettres et finit par "exemples" en 8 lettres.
  Les 4 phrases ont 39-64-32-48 mots, en tout 183. Je note d'abord 48, qui est aussi la moyenne entre 64 et 32. Quant à la somme 183, c'est la taille en cm de l'homme idéal selon Le Corbusier. Je rappelle que les deux dernières phrases du texte ont 183 et 226 mots, les dernières mesures du Modulor. Elles constituent également une signature, avec "coeur" au centre des 183 mots (l'écrivain est supposé se nommer Jean Ricoeur) et "j'en" mots 112-113 des 226 mots).

  Qu'en est-il des phrases 48 et 84? Je ne vois rien d'immédiat pour les 80 mots de la phrase 48, mais les 119 mots de la phrase 84 (échos "la là") m'évoquent les valeurs des 8+4 lettres:
RICARDOU + JEAN = 89 + 30 = 119.
  Comme vu dans le précédent billet, cette technique, la gématrie, amène un prodigieux prolongement aux harmonies des deux dernières phrases en 183 et 226 mots. Car il se trouve que Le Corbusier était le pseudonyme de
CHARLES EDOUARD JEANNERET = 226.
  Les mesures du Modulor sont conçues à partir de la suite de Fibonacci exprimée en pouces ou demi-pouces, et 226 cm correspondent à 89 pouces, valeur de RICARDOU (ou de RICOEUR). Le mot central COEUR de l'autre phrase occupe la position 92, valeur de JEANNERET.

  Les brouillons des textes concernés ayant été perdus, et Ricardou ayant gardé pour lui ses intentions, il est douteux d'avoir jamais de certitude. Sachant qu'il évoquait souvent Le Corbusier et son Modulor, il me semble acquis que les nombres de mots de ces deux dernières phrases sont bien issus du Modulor.
  Pour la gématrie, mon arithmo-manie quasi innée m'a conduit à me passionner pour ces jeux, d'abord en hébreu, et Ricardou qui a connu une kabbaliste a pu avoir une démarche similaire.

  Bref, si c'est le cas, il convient de s'intéresser au nombre 89, valeur de RICARDOU, et nombre de la suite de Fibonacci, qu'il connaissait. Voici le paragraphe 89 (correspondant à la phrase 158, c'est moi qui ai souligné les mots "en écho"):
      En classique mystificateur, me laissant le triste soin de saisir de travers, sans même sourciller, l'essentielle gageure que révélait pourtant sa bouche, mon frère avait permis que j'entendisse, ainsi qu'on l'a par malheur lu, "Tes remarques, du reste (...), je dois convenir qu'elles me donnent l'envie, maintenant, en écho, et DE RIRE, et me taire...'', au lieu de ce qu'en fait il avait sans doute énoncé, "Tes remarques, du reste (...) je dois convenir qu'elles me donnent l'envie, maintenant, en écho, et D'ECRIRE, et me taire...", c'est à dire, fort simplement, reprise du célèbre "mettons enfin que je n'ai rien dit", à l'issue du sublime volume Les Fleurs de Tarbes ou la terreur dans les lettres, la prétendue leçon calculée, in extremis, sur les illustres lèvres de Jean Paulhan.
  Il a 140 mots, le nombre précédant 183 et 226 sur l'échelle du Modulor, correspondant à 55 pouces.
  J'avais eu la curiosité de regarder ce qui se passait à la césure d'or 86-140 des 226 mots de la dernière phrase, et y avais trouvé le significatif mot "centre". Il m'avait semblé complémentaire que la phrase 113 (série Rouge du Modulor) ait 70 mots (le nombre précédent de la série Rouge) et que la césure d'or 27-43 de ces 70 mots tombe sur le mot "juste".
  Je n'y reviens pas, et constate qu'un écho essentiel dans cette phrase de 140 mots touche précisément les mots "(53) en (54) écho" à partir du début, symétriques des mots "en (54) écho (53)" à partir de la fin, pour reprendre les formulations adoptées par Ricardou dans l'analyse de ses phrases. S'il est besoin d'une confirmation de ce jeu, l'écho principal est sur la syllabe "en" ("En-Paulhan").
  La césure d'or de 140 est 54-86, la double césure 54-32-54, or les 140 mots du paragraphe 89 se partagent en
54 mots finissant par "en écho",
32 mots,
54 mots débutant par "en écho".

  L'expression "en écho" apparaissait aussi dans les 48 mots du paragraphe 84 donné supra, aux positions 17-18, or la césure d'or de 48 est 18-30. Incidemment, 84 est la valeur des lettres RICROU communes à RICaRdOU et à RICOeUR (et à CORbUsIeR).
  30 est la valeur de JEAN. Il y a peut-être aussi un écho voulu aux rangs 30 dans la phrase du paragraphe 89 (RICARDOU), entre "(30) entendisse" et "dit (30)".

  Le paragraphe suivant, 90, est encore composé d'une phrase de 48 mots,
      Bref, le menu feuillet, découvert parmi peu d'autres dans la boîte, avait permis qu'enfin je comprisse, et de l'obsession fraternelle, et, toute jumelle, de la mienne, qu'elles provenaient, et l'une, et l'autre, identiquement, d'une lecture trop longtemps maintenue dans les ténèbres.
dont les termes extrêmes sont "Bref-ténèbres", à nouveau en 4-8 lettres. La phrase 90 achevant le paragraphe 48 avait également 48 mots. Ces 4-8 lettres ont pour valeurs
BREF TENEBRES = 31 + 88 = 119, de même que
JEAN RICARDOU = 30 + 89 = 119.
  Je souligne l'écho entre paragraphe 90 et phrase 90.

  Le paragraphe suivant, 91, est composé d'une seule phrase, numéro 160, de 200 mots, la plus longue phrase ensuite décortiquée par Ricardou, dont j'ai déjà donné un scan, que revoici:
   C'est moi qui avais entouré de rouge une partie du détournement du logo de l'éditeur, parce que je pouvais y lire "novel roman", formant un jeu qui m'est essentiel depuis plus de 20 ans.
  Les deux mots au centre juste des 200 sont "(100) juste centre (100)", deux mots qui apparaissent aux centres d'autres phrases, ce qui me semble pouvoir valider leur présence aux césures d'or des phrases "Modulor" déjà commentées.

  Lorsque Ricardou redonne la phrase avec tous ses mots numérotés, pages 98-99-100, il en a "oublié" 3 mots, afin d'avoir "(99) centre (99)" au centre, page 99, et les commentaires soulignent cette autoréférence, en évoquant la première parution d'une nouvelle de Ricardou dans le n° 99 de la NRF.
  J'ai ensuite découvert  une autre autoréférence dans Le lapsus circulaire, l'autre texte écrit pour cette réédition des nouvelles de Ricardou en 1988, où la symétricologie est utilisée pour certaines phrases, avec des variantes vertigineuses (mais que cachent les autres phrases?). Il est donc indiqué page 66 de reprendre une phrase symétricologique de la page 61, dont le centre est précisément "symétrie".
  Ceci n'impliquait a priori pas de minutieux ajustements comme pour la page 99 de Révélations minuscules, imposée par le numéro de la NRF, puisque, toujours a priori, il aurait pu suffire de compléter sur épreuves le numéro de la page incriminée, mais je me suis avisé que 99 et 61 étaient les valeurs de
NOUVEAU + ROMAN = 99 + 61 = 160,
les nombres 99 et 61 étant par ailleurs un couple doré (99/61 = 1,622..., tandis que φ, le nombre d'or, = 1,618...).
  Parce que mon premier dénombrement était erroné, je n'avais pas vu que "novel roman" apparaissait dans la phrase 160, avec la possibilité d'écrire
99/061 ≈ 160/99,
symétrie qui me semble unique*, du moins tant qu'il s'agit d'approximations de φ dans une même suite additive, et c'est "renversant"...

* Il se trouve que j'ai étudié les symétries dorées en 2010, entre suites additives distinctes, et que j'y suis revenu en 2014 dans un billet de Quaternité intitulé Rêvolutions, ignorant alors qu'il existait le recueil de nouvelles Révolutions minuscules de 1971, réédité en 1988, "augmenté d'un inédit capital d'une centaine de pages (Révélations minuscules, en guise de préface, à la gloire de Jean Paulhan)".

  A propos des phrases de 48 lettres bornées par des expressions de 4-8 lettres, comme "C'est-renversé" et "Bref-ténèbres", on retrouve ces mots "Bref" et "ténèbres" bornant la phrase 182 occupant tout le paragraphe 105, elle a 113 mots:
      Bref, car, ce me semble, la démonstration en est claire (sauf si, au fil de mes précises pages, vous avez préféré fort vaguement songer à autre chose, aux profuses virtualités peut-être, pourquoi non, de votre propre pseudopatronyme, puisque les manières de votre officiel géniteur, pour tout dire, vous avaient non moins paru bizarres, quelque peu, depuis longtemps), le futile apport de la moindre préface, fût-elle issue de la mienne menue plume, dans un dispositif soumis à des soins si retors, n'eût su que paraître incongru, obscurcissant tout, à celui qui n'appréciait rien tant, au cœur tumultueux, je le crains déchiré, de ses excentriques fantasmagories, que l'intégral contraire des ténèbres.
  Le mot central est "longtemps", en écho au "bref" initial. Je remarque que la phrase compte 565 lettres, 5x113, soit une moyenne exacte de 5 lettres par mot. La phrase 159 en 48 mots bornés par "Bref-ténèbres" contenait aussi le mot "longtemps".
  113 cm est donc la hauteur du nombril doré du bonhomme Modulor de taille 183 cm, et cette phrase 182 est suivie par la phrase 183 (paragraphe 106):
      Supportant mal, néanmoins, je le confesse (en regard de ce que, la plupart des soirs du seigneur (après que trop longtemps je me fusse défendue en redisant, que n'a-t-on murmuré, sur le mode ironique, "je ne suis pas tout à fait celle que tu crois"), selon souvent d'innombrables détails, non sans parfois quelques scrupules, avec mes lèvres, visibles ou non, nous savions accomplir ensemble), de me trouver toujours maintenue à l'écart, noir sur blanc, de ses microscopiques excès d'encre, et commençant à songer malgré moi, jusqu'à peut-être l'obsession, qu'en temps voulu la chance pourrait bien m'être consentie de procéder au scandaleux insert d'une préface dans ses monumentaux calculs imperceptibles, j'avais prétendu une fois, devant lui (pour amoindrir la prévisible ampleur du cataclysme, d'avance, à mes propres yeux), minimiser les bénéfices de ses abusifs tissus.
  Elle a 147 mots, un nombre ici peu évocateur, de même que les termes initial, médial et final (Supportant, à, tissus), mais gommer le contenu des parenthèses laisse 72 mots,
      Supportant mal, néanmoins, je le confesse, de me trouver toujours maintenue à l'écart, noir sur blanc, de ses microscopiques excès d'encre, et commençant à songer malgré moi, jusqu'à peut-être l'obsession, qu'en temps voulu la chance pourrait bien m'être consentie de procéder au scandaleux insert d'une préface dans ses monumentaux calculs imperceptibles, j'avais prétendu une fois, devant lui, minimiser les bénéfices de ses abusifs tissus.
or 72, c'est l'équivalent en pouces de la taille idéale de 183 cm, avec le nombril à 113 cm.

  Certes, la phrase précédente de 113 mots contient aussi une longue parenthèse de 47 mots, et les mettre pareillement à part ferait perdre le jeu 113-183(72), entre deux phrases successives, rappelant le jeu final 183-226. Les rares explications de Ricardou sur l'utilisation des parenthèses sont loin de tout éclaircir, et diverses phrases riches en parenthèses me demeurent impénétrables, bien que je sois certain qu'elles recèlent des finesses.
  Je crois avoir néanmoins compris qu'il n'aimait pas se répéter. Lorsqu'il reprenait une phrase, c'était toujours avec de légères variantes. Il en va probablement de même pour les contraintes, et il faut s'attendre à de multiples variantes sur la symétricologie et les parenthèses, sinon à d'autres procédés non signalés.
 
  En rappelant les jeux vus plus haut:
- le paragraphe 48 a 183 mots, bornés par des expressions en 4-8 lettres, et s'achève par la phrase 90 en 48 mots;
- le paragraphe 90 est une phrase de 48 mots, bornés par "Bref-ténèbres" en 4-8 lettres;
- le paragraphe 105 (phrase 182) est une phrase de 113 mots, bornés par "Bref-ténèbres";
- la différence entre 90 et 182 est 92, "coeur" de 183 et valeur de JEANNERET;
- la phrase 183 a 147 mots, 72 sans les parenthèses, et 72 pouces correspondent à 183 cm;
- la phrase suivante, 184 donc, a 91 mots, en harmonie d'or avec les 147 précédents; 147/91 se réduit au rapport fibonaccien 21/13.
  Vertigineux si c'est intentionnel, davantage si ça ne l'est pas.

  Il faut rappeler qu'il s'agit d'un texte explicitement codé, par un surdoué du bulbe (au QI de 187 paraît-il), et qu'il ne s'agit donc pas de se demander s'il y a des codages, mais de les identifier. 
  Je suis convaincu qu'une partie de ce que j'ai vu est effectivement intentionnelle, mais je suis bien loin de l'être pour le tout. Il est possible que j'aille trop loin, et fort probable aussi que l'essentiel m'échappe. Je dois à mes compétences particulières d'avoir identifié les nombres du Modulor dans des phrases significatives, avant que des connaissances de Ricardou m'aient confirmé sa fascination pour Le Corbusier, et d'autres compétences sont certainement nécessaires pour aborder d'autres pans de cette oeuvre labyrinthique.

  Pour donner une idée de l'éventuelle complexité, voici l'une des phrases commentant la phrase avec "(99) centre (99)" au centre:
      Si l'inquiétude, cependant, est soudain revenue, je l'avoue, en les fuligineux abysses de mon âme, ô signeur, c'est qu'ayant conçu, pour me rassurer enfin de façon intégrale, l'abominable périlleux dessein de vérifier la censure de l'autre scabreux système (vous savez, le bord trop calculé de maintes parenthèses), au moins, dans mes insus labeurs, j'ai reçu la minuscule révélation que ") moins (57)" " (57) absurde (" que je j'avais imaginé, l'idée selon quoi l"'(79) écriture)" pourrait bien être un "((58) je” "((79) avec" la "lecture (58))”, non sans leurres peut-être, au long de tel scrupuleux récit.
  Comme on peut le vérifier plus haut sur le scan, la phrase originale en 200 mots comporte deux passages entre parenthèses, l'un venant après le mot 57 à partir du début, "absurde",
(je l'avoue, un instant, parcourant d'un œil vague l'ensemble des neuf menus récits devant lesquels il faut, en plus, mon écriture)
l'autre avant le mot 57 à partir de la fin, "moins",
(avec la luxuriance de ses excessifs aveux biaisés, et les deux obsessions jumelles, l'une et l'autre guérie par meilleure lecture)
et les 4 mots "écriture-je-avec-lecture" bornent effectivement ces parenthèses.
  Toutefois, dans la première version de la phrase en 200 mots, il y a 24 mots entre les premières parenthèses, et 22 entre les secondes, et il n'y avait donc pas alors de symétrie entre "écriture" et "avec". Les mots "en plus" ont disparu dans la version numérotée en 197 mots, et ce sont en fait plutôt ces mots qui sont venus, en plus, dans la version antérieure (et un adjectif plus loin pour avoir "juste centre" au centre, sinon ç'aurait été "juste").
  Cette phrase qui expose le jeu des deux parenthèses symétriques de 22 mots recèle elle-même une finesse, car la proposition de 9 mots entre parenthèse y est exactement centrale, avec 44 mots de part et d'autre.
  Je reste méfiant quand Ricardou emploie l'expression "pourrait bien", ainsi, le jeu "écriture-je-avec-lecture" étant néanmoins assuré, je me demande si ce n'est pas en tant que lecteur qu'il y associe "moins" et "absurde".

  Le texte complet compte 7 phrases de 48 mots (sauf erreur dans mes comptes).
  S'il est légitime que 48 corresponde à JEAN RICARDOU, les autres personnages importants du texte pourraient être pareillement signifiés, ainsi JEAN PAULHAN correspondrait à 47 (de même que JEAN RICOEUR).
  Il y a 9 phrases de 47 mots, dont certaines concernent directement Paulhan, mais aucune n'a d'écho 4-7 comme j'en ai décelé de 4-8 pour Ricardou.

  JEANPIERRE RICHARD donnerait 107. Trois paragraphes comptent 107 mots, d'abord le 28 puis le 32 évoquant "l'illustre critique", dont la fameuse phrase "Combien ... Lutèce.", où Ricardou a lu "ce con" est reprise au paragraphe 30, entre 28 et 32.
  Le paragraphe 201 a 2 phrases de 52 et 55 mots, cette dernière centrée sur "confesse", un mot du type "con...ce" dont il y a de nombreux exemples touchant le professeur sorbonnard.

  NOELLE RICOEUR donnerait 67. Deux phrases ont 67 mots, dont la phrase 75 qui a "centre" au centre, et "Si récit" pour bornes. Deux autres phrases ont ces mêmes bornes "Si récit", dont celle donnée supra où Noëlle livre sa propre analyse des parenthèses de la dernière phrase étudiée.

  Je vais m'arrêter là. Bien d'autres phrases mériteraient mention, et plus encore ne semblent avoir qu'un rôle de remplissage.
  La fin du texte me reste ardue. Après les derniers commentaires sur la phrase avec "(99) centre (99)" au centre viennent 8 (le trop fétiche nombre!) longues phrases. Elles ont 256, 247, 285, 156, 213, 187, 183 et 226 mots, et comptent en tout 30 parenthèses (+ éventuellement 2 autres insérées dans des passages déjà parenthésés).
  Les 320 phrases précédentes peuvent se prêter à un parfait partage:
- 160 phrases s'achevant sur la phrase de 200 mots avec "juste centre" au centre;
- 160 phrases s'achevant sur la reprise de cette phrase légèrement modifiée et son analyse.

  A ce jour, outre les deux dernières phrases, signatures "modulées or", je n'ai qu'une relative certitude pour la première des 8 dernières phrases, en 256 mots:
      Pis encore: puisque, selon mon hypothèse sans doute invraisemblable, vous êtes toujours avec moi, ô le proche visage et votre haleine presque, deux, un seul empan peut-être, suivant la plausible acuité de vos oculaires sphères (mais ne reculez point, voyons, si peu soit-il, qu'alliez-vous rêvasser ?), puisque vous me tenez en quelque espèce, de surcroît, par au moins une main (ne me lâchez pas, dites, il est trop tard), et puisque, du reste, directement ou non, ayant perçu ma silhouette en sa vitrine, vous avez déboursé, pour m'avoir (car vous n'avez pas réussi à me voler, n'est-ce pas ?), certaine mince obole auprès du proxénète, et puisque, dès lors, vous êtes en droit d'exiger que je vous entretienne à cœur ouvert, sachez qu’à force de l’apercevoir (l’image vespérale, je dois le dévoiler, est quasiment obsessionnelle) en train de pourrir pourpre, là-bas, Dieu sait où, loin de mon moi tranquille (qui vous parle de me violer au bord de l'eau ?) avec sa roue, en les obscurs tréfonds de son oblongue boîte en hêtre, je ne sais plus (en l'absence, toujours, d'un quelconque deus ex machina) comment en finir, disons, avec l'actuelle préface, tant votre attention trop soutenue, aiguisée, sans cesse mieux experte, vos curieuses paranoïaques manières d'en détail me scruter entre chevelure et chevilles, et vos exigences minutieuses, si souvent à l'endroit de plusieurs parmi mes syllabes, ô la langueur malgré mes chants, ont persécuté de ténébreux abysses en toit sans répit.
  L'écho début-fin est la syllabe "pi", et un écho immédiat de la phrase est le même mot "ô" aux rangs 15 à partir du début et de la fin. C'est un mot d'une seule lettre, de rang 15 dans l'alphabet, une lettre que Ricardou assimile volontiers à un cercle parfait, donc associée à la constante du cercle, pi. A noter que PI-O, pio, signifie "saint" en italien. A noter aussi que "o" est graphiquement et étymologiquement un "oeil", et que les "oculaires sphères' sont convoquées ici.
  Entre deux "ô" il y a 226 mots, la longueur en cm de l'instrument Modulor, équivalente à 89 pouces, 89 valeur de RICARDOU.
  Avant et après ces 226 mots il y a 15+15 mots, soit 30 valeur de JEAN. Ceci ressemble fort à la dernière phrase en 226 mots avec "j'en" au centre, et peut constituer un argument de poids en faveur de l'emploi voulu de la gématrie.
  Les 226 mots sont bornés par "le" et "syllabes", ce qui évoque fortement SILAB LEE, la cité vénusienne de La prise/prose de Constantinople, une des multiples anagrammes des lettres ISABELLE données dans le roman.

  Ceci dit, j'ai conscience de n'avoir éclairci que quelques aspects de cette phrase où, notamment, les 6 passages entre parenthèses, totalisant 66 mots, doivent être significatifs.

  Une autre éventualité pour la phrase en 156 mots, présentant les échos "(55) nombre" "il (55)", suggérant "nombril". L'homme de 183 cm a son nombril doré à 113 cm selon Le Corbusier, et une parenthèse se ferme après 113 mots, sur les mots "Arènes de Lutèce"; restent 43 mots, autre nombre de la série Rouge.
  C'est "dans le rond des Arènes de Lutèce" que se déroulaient les messes boulistiques présidées par Paulhan, selon Jean-Pierre Richard. Ricardou prend soin de préciser, dans le paragraphe de 107 mots signalé plus haut, que l'illustre critique n'est guère scrupuleux: le sol central des Arènes n'est pas rigoureusement rond, et c'est ailleurs, dans les vestiges des antiques gradins, que se réunissaient les joueurs. 
  Néanmoins la piste centrale elliptique peut être assimilée à un O, et il est frappant que la fin de ces messes ait été marquée par l'érection d'un I ithyphallique, la tour Zamansky de la fac de Jussieu.
  Paulhan est mort en décembre 68. En octobre 67, je débutais mes études à Jussieu, en pleins travaux. Mes promenades entre les cours m'ont fait découvrir les Arènes, ce dont je n'ai qu'un vague souvenir, assez négatif puisque je n'y suis jamais revenu. La tour a été achevée en 70.

  Je rappelle que mon but n'est pas de dévoiler les clés de l'écriture ricardolienne, mais de tenter d'approfondir plus généralement les mystères de l'écriture. Je subodore que les codeurs s'exposent à être surcodés par je ne sais quelle résonance de l'inconscient collectif, ou autre, mais la théorisation n'est pas mon fort.

  L'importance du Modulor, du nombre d'or, de la numérotation des phrases et paragraphes m'a conduit à une question: y a-t-il des points où paragraphes et phrases sont en rapport d'or?
  Il y a souvent plusieurs phrases par paragraphe au début du texte, et donc pas de possibilité au départ. Par la suite, il y a de plus en plus une phrase par paragraphe, et ceci mène à un point harmonique idéal, pour le paragraphe 170 correspondant à la phrase 275. 275/170 se simplifie en une fraction fibonaccienne,
55/34 = 1,6176..., proche du nombre d'or 1,6180...
  Comme c'est une excellente approximation, les deux fractions voisines sont aussi de bonnes approximations, 274/169 et 276/171.

  Le nombre 170 m'évoque aussitôt une relation que j'ai exposée dans le billet 170 de Quaternité, Rêvolutions, dont j'ai parlé plus haut, avant de découvrir ce point harmonique 170-275.
  J'avais choisi ce titre parce que le mot REVOLUTIONS a pour valeur 170, se répartissant selon consonnes/voyelles en
RVLTNS / EOUIO = 105/65 = 21/13 (Fibonacci).
  Tiens, les comptes de lettres envisagés plus haut me font aujourd'hui remarquer qu'à ce partage correspondent les nombres de lettres 6-5, se concaténant en 65, la petite section d'or (et la valeur de CENTRE).
  Le billet m'avait fait étudier les harmonies dorées anacycliques et palindromes dans le système décimal, et, en cours d'écriture, alors que le titre était déjà choisi, à découvrir que les nombres
65-105-170 devenaient en base 4
1001-1221-2222.
  J'avais complété la série par le terme précédent, 220 (40 décimal), précédé d'un zéro pour avoir le palindrome 0220, et 4 palindromes dorés de 4 chiffres en base 4!!!!
  Ceci ressemble quelque peu à mon écriture plus haut de la suite dorée
061-99-160, après avoir découvert que c'était dans la phrase 160 que Ricardou avait transformé le nom de son éditeur en Les romances nouvelles, en pensant certainement au NOUVEAU ROMAN (99-61).

  Je me suis demandé quel était mon billet 275, et c'est Belletto, en janvier 2019.
  J'y reprenais la modification du logo de l'éditeur de Révolutions minuscules, les impressions nouvelles, pour en faire les romances nouvelles, où j'ai été sidéré de pouvoir lire dans un rectangle les exactes lettres roman novel.
  Ce n'est pas le seul billet où j'ai parlé de cette sidération.

  Dans le billet suivant, numéro 276 donc, RB & B, j'étudiais un autre roman de Belletto, L'enfer, où un personnage central est
RAINER GOTTARDT = 65 105,
pianiste particulièrement apprécié pour son interprétation du Prélude et Fugue 24 du Clavier bien tempéré, en 170 mesures. Je ne sais plus si j'ai alors songé à la répartition de REVOLUTIONS en 65/105 dans mon billet 170, mais je ne l'ai pas cité.
  Ce billet 276 m'a aussi conduit à évoquer le nombre 171, avec un rappel "que L'enlèvement débute page 171 de l'édition 1988 de Révolutions minuscules", mais sans remarquer le rapport doré 276/171, et sans évidemment soupçonner que les 171 premiers paragraphes de sa préface contenaient 276 phrases.

  Tiens, dans mon billet 170, Rêvolutions, j'avais fait de la symétricologie sans le savoir:
J'ai encore songé à l'anagramme VERSOLUTION, qui pourrait concaténer l'idée que la clé, la solution, est dans le retournement, le verso.
  Pour le titre de ce billet, j'ai souhaité partir de l'harmonie 170 paragraphes contenant 275 phrases. "révolutions" s'imposant pour 170, il m'a semblé devoir compléter par un adjectif de valeur 105.
  J'ai choisi révolutions énumérées pour d'une part l'écho symétricologique, d'une part les nombres de lettres 11-9, avec 119 valeur de JEANRICARDOU.
  Incidemment, je repense à la naissance de Belletto un 11/9, ce qu'il a notamment utilisé dans Créature, paru en février 2000, roman centré sur une catastrophe majeure devant frapper la Terre le 11 septembre 2001... ... et je repense aux Lieux-dits de Ricardou, roman de 1969 qui peut offrir aussi des échos avec l'attentat contre les tours jumelles.
  On y voit le personnage Atta, même nom que le terroriste aux commandes du premier Boeing (Mohammed Atta), énoncer qu'il faut allumer correctement deux cigarettes afin qu'elles se consument entièrement.

  D'autres adjectifs de valeur 105 auraient pu convenir, mesurées, décomptées, alambiquées, recyclables...
  J'ai aussi cherché des adjectifs permettant un partage consonnes/voyelles 65/40, mais les possibilités sont moins satisfaisantes, discutées, sublimées, puériles...

  C'est le billet numéro 309, et j'ai évoqué plus haut le paragraphe 201 pour les 107 mots de ses phrases 309-310. S'il y a bien 107 mots dans le texte publié, je me demande si "Dieu sait qu'elle extravagante histoire" ne serait pas une erreur, car il y a des erreurs dans ces textes ultracodés, ce qui ne peut qu'avoir des conséquences catastrophiques pour le décryptage.
  Il ne peut y avoir de certitude pour Révélations minuscules ou Le lapsus circulaire, dont les brouillons ont été perdus, mais j'ai pu établir qu'il y avait des erreurs dans les deux éditions de L'art du X, dont le manuscrit final de Ricardou existe. Certaines de ces erreurs nuisent gravement à l'intelligence du texte.

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