3.5.23

le tempérament bien formaté


pour les forts en thèmes

  Bach est revenu ces derniers temps parmi mes principales préoccupations, et hier 27 avril m'est venue une nouvelle idée. Dans ce monument que constituent les deux livres (I et II) du Clavier bien tempéré (WTC), où se prêtent à de multiples possibilités les nombres de mesures des Préludes, des Fugues, des diptyques, des tonalités, je n'avais pas encore songé à quelque chose d'assez immédiat, les nombres de notes des thèmes (ou sujets) des Fugues.
  Il m'est tout de même arrivé de parler des 38 notes du thème de la Fugue I-21, en B comme Bach, et des 21 notes du thème de la Fugue II-1, suivies de 38 notes lors de l'exposition (énoncés successifs du thème dans chaque voix de la fugue), en relation avec BA-CH vu comme 21-38, mais je n'ai guère approfondi, alors que des résultats frappants apparaissent immédiatement pour l'ensemble des thèmes B-a-c-h.

  Il est assez largement admis que Bach était sensible à la somme 14 des lettres composant son nom, lettres qui sont aussi dans la notation allemande les notes si♭-la-do-si, b-a-c-h, 2-1-3-8. C'est admis parce qu'il y a de bons indices le suggérant, mais aucun témoignage direct ne l'atteste, et s'il fallait considérer les "bons indices" comme des preuves, où s'arrêter?
  Je ne prétends donc pas révéler les intentions secrètes de Bach, je me contente d'explorer les nombres attachés à son oeuvre, laissant à chacun le loisir de conclure, sinon d'explorer plus avant.

  Alors voici ce qu'il en est des thèmes dans les tonalités B-a-c-h, soit si♭ maj-la min-do min-si min.
                       B        a        c       h
livre I            38      31      20       21   = 110
livre II           24      12       9        21   =  66

  Presque tous ces nombres me sont significatifs, et je vais commencer par les totaux, 110 et 66, somme 176. Bach a donné en 1722 un manuscrit très soigné du premier livre, auquel il a donné un titre de 24 lettres, Das wohltemperirte Clavier. Est-ce un hasard pour cette exploration des 24 tonalités? en est-ce un autre si l'adjectif agglutiné wohltemperirte, créé pour l'occasion, a 14 lettres, le nombre supposé fétiche de Bach?
  On peut s'interroger sur la numérologie de ce titre, mais il y a plusieurs possibilités, aucune n'étant certaine, et il n'est pas même acquis que Bach s'en soit préoccupé. Toujours est-il qu'une possibilité est l'alphabet latin de 23 lettres, où I-J sont confondus, de même que U-V-W, et l'on a alors:
DAS WOHLTEMPERIRTE CLAVIER = 23+176+66 = 265
(vérification sur le Gématron)
  On voit que la valeur 176 de WOHLTEMPERIRTE est égale aux notes des thèmes Bach des deux livres, et celle 66 de CLAVIER à celle des notes du second livre seul.

  J'avais vu ici que cette valeur 176 se découpait en 53 pour WOHL et 123 pour TEMPERIRTE, or les deux derniers diptyques Prélude-Fugue du premier livre totalisent 53 et 123 mesures. La répartition en Préludes et Fugues mène à 66 et 110.

  Les Fugues du premier livre correspondant aux tonalités B-a-c-h totalisent 242 mesures, soit 176+66, WOHLTEMPERIRTE CLAVIER. Celles du second livre totalisent 249 mesures, je n'y vois rien d'aussi immédiat.

  Voici les nombres de mesures des deux livres du WTC (1722 pour le manuscrit de Bach du WTC1, 1744 pour le premier manuscrit complet connu du WTC2), avec les rangs des pièces, les lettres du titre, et les noms des tonalités selon la notation allemande:


  Certains préludes sont à reprises, leurs nombres de mesures étant soulignés ci-dessus, correspondant à la musique écrite. Ces nombres doivent être doublés pour la musique exécutée.
  L'étude des 16 tonalités BACH, majeures et mineures confondues, m'avait conduit à remarquer que les seules avec reprises étaient, dans l'ordre, h-c-a-B, la rétrogradation de Bach, ce qui est significatif pour le contrapuntiste, ainsi le thème BACH du 14e et dernier Contrepoint de l'Art de la fugue est aussi donné sous forme rétrograde. Pour avoir B-a-c-h dans l'ordre, il eût fallu un 3e livre.
  Aujourd'hui, je constate que ces Préludes doublés pourraient inviter en résonance à doubler les notes des thèmes des Fugues associées, 21-24-12-9, somme 66 correspondant à nouveau à CLAVIER.

  Les thèmes B ont 38 et 24 notes, ce qui m'évoque une découverte essentielle lorsque j'ai abordé le nombre d'or dans le WTC, où j'ai d'abord examiné le rapport de mesures entre Prélude et Fugue de chaque diptyque.
  Dans 3 diptyques, le nombre de mesures du Prélude est en rapport d'or optimal avec celui de la Fugue, ce sont les diptyques 14-24-38 (ou 14 du second livre), et le nombre moyen de mesures des 3 ensembles est 100, idéalement réparti en 38-62.
 

  Ainsi les nombres moyens de mesures 38-62-100 sont le prolongement des rangs 14-24-38... L'élégance de ce résultat plaiderait aisément pour une intentionnalité effective, mais un approfondissement conduit à d'étranges constatations, et l'ensemble de mes découvertes bachiennes est si vertigineux que j'avais abandonné ce terrain, estimant en avoir assez fait.
  Ce 25 avril, il m'est venu de calculer la valeur de l'allemand "100" selon l'alphabet prêté à Bach,
EIN HUNDERT = 27+86 = 113,
soit le nombre de mesures du diptyque 38, ou 14 (=BACH) du second livre, lequel est souvent vu comme le plus accompli. Hors toute appréciation subjective, F2-14 est la seule triple fugue du WTC, fugue à 3 voix et 3 sujets superposables. La triple fugue est un sommet de l'art contrapuntique, et Bach n'en a composé que deux autres, pour orgue.
  Je m'imagine un instant dans la tête d'un Bach désireux de magnifier son nom et le nombre d'or dans le WTC: Je vais composer trois ensembles dorés du 14e au 14e du second livre, soit le 38e, ainsi l'ensemble intermédiaire sera nécessairement le 24e; pour être parfaitement compris, je vais donner à mes ensembles une moyenne de 100 mesures, et le dernier aura 113 mesures, valeur de "100".

  Hors toute intentionnalité, il apparaît une coïncidence irréductible, sinon plusieurs. Si on cherche une suite additive de 3 rangs parmi les 48 tonalités successives du WTC, et qu'on impose une harmonie entre ces tonalités, la plus immédiate étant quarte ou quinte, la seule solution est 14-24-38, fa#, si (quarte de fa#), fa# (quinte de si).
  Il est logique de regarder ce qui se passe pour le diptyque final, 48 en si, et intéressant de constater que sa fugue a tout juste 100 mesures.
  Le prélude a 66 mesures, presque les 2/3 de 100 (et juste valeur de CLAVIER). Ceci pourrait être une allusion à la tempérance, la quinte juste étant donnée par la vibration d'une corde aux 2/3 de sa longueur. L'accordage tempéré consiste à modifier certaines quintes.

  L'Art de la fugue était prévu pour s'achever sur ce qui n'avait encore jamais été fait, une quadruple fugue dont la fin a été perdue, si bien que la pièce a longtemps été considérée comme une triple fugue indépendante, avant qu'un musicologue ne s'aperçoive que le Grand Thème de L'Art de la fugue se superposait aux trois thèmes déjà présents. Les adeptes numérologues ont apprécié que ce Contrepoint 14 introduisait pour la première fois dans l'oeuvre de Bach un sujet débutant par les notes B-A-C-H.

  Ainsi les 38 et 24 notes des thèmes de F1-21 et F2-21, en B comme Bach, peuvent faire penser aux PF 24 et 38, et à l'architecture dorée des 3 diptyques bornés par les PF 14, comme BACH...
  Il s'y ajoute que les 20 et 12 notes des thèmes de F1-2 (c) et F2-20 (a) sont dans le même rapport 5/3 que les 40 et 24 mesures du PF1-14, rapport 5/3 qui est aussi celui entre 110 et 66, les notes thématiques des fugues B-a-c-h dans les deux livres.


  Le matin du 28 avril, au réveil, il m'est venu de relier 5/3 à 53, un nombre énigmatiquement surreprésenté dans les diptyques du WTC, et à une notion essentielle dans la musique tonale: l'accord de trois notes est formé de la tonique (1), de la quinte (5e note en partant de la tonique), et de la tierce (3e note en partant de la tonique). Cette tierce peut être majeure (4 demi-tons au-dessus de la tonique) ou mineure (3 demi-tons au-dessus de la tonique), déterminant le mode.
  Par ailleurs l'harmonie musicale est liée à la gamme dite "naturelle", où la résonance entre les sons est commandée par des rapports arithmétiques simples. Imaginons par exemple une corde de longueur donnée L vibrant en do:
- l'octave est donnée par 1/2 (la corde de longueur L/2);
- la quinte, sol, par 2/3;
- la quarte, fa, par 3/4;
- la tierce majeure, mi, par 4/5 (la mineure mipar 5/6);
- la sixte, la, par le rapport 3/5.

  L'oreille occidentale s'est habituée depuis quelques siècles à une gamme chromatique de 12 demi-tons, incompatible avec les harmonies naturelles. Pendant longtemps, l'accord d'un instrument ne permettait de jouer que dans certaines tonalités, et au 17e siècle ont été imaginés divers tempéraments, ou façons d'accorder l'instrument pour pouvoir jouer dans un maximum de tonalités.
  Curieusement, le tempérament choisi par Bach, probablement parmi les multiples propositions de divers théoriciens, ne nous est pas parvenu, malgré de bonnes conjectures. La seule certitude est qu'il ne s'agissait pas du tempérament égal, apparu plus tard, et que chaque tonalité avait donc sa particularité, discernable par les plus fines oreilles.

  Enfin ceci est l'affaire de spécialistes, mais j'en retiens notamment que les deux notes les plus enharmoniques du nom Bach sont a et c, la et do, la obtenu par une corde de longueur 3/5 par rapport à celle donnant do, or les thèmes en c et a de F1-2 et F2-20 ont 20 et 12 notes, dans le rapport a/c = 3/5.
  Par ailleurs la tierce et la quinte sont les bases de l'harmonie, d'où quelqu'un de concerné pourrait songer à utiliser ces nombres 3 et 5, par des rapports immédiats, mais aussi par des nombres tels que 35 et 53. C'est l'occasion de remarquer que le WTC débute par le prélude en do majeur, l'une des pièces les plus célèbres au monde, en 35 mesures, dont voici la première, de la main de l'auteur:
 

  La portée supérieure est en clé de do. Le motif de 8 doubles croches se répartit en un arpège ascendant de 5 notes, dont les 3 dernières notes sont ensuite répétées.
  L'arpège est le plus simple, do-mi-sol-do-mi, où la tonique est donc suivie de la tierce et de la quinte, 3 et 5.
  Enfin les deux premières notes, tenues pendant tout l'arpège, sont pour Bach c et e, les lettres de rangs 3 et 5.

  Il y a 4 autres pièces de 35 mesures dans le WTC, soit donc 5 pièces de 35 mesures, 2 Préludes et 3 Fugues. Les diptyques concernés totalisent 353 mesures.
  C'est le seul nombre présent 5 fois parmi les 96 pièces. Ce n'est pas forcément inouï, trois autres nombres ont 4 occurrences, 24, 28, et 70 (le double de 35, mais il y a déjà tant à dire sur 35 et 53 que je vais laisser ces 70 de côté).

  Il est bien plus remarquable de trouver 3 fois le nombre 53 comme somme des mesures de diptyques (tous dans le premier livre), alors que c'est le total le plus bas parmi les 48. Je rappelle que 53 est la valeur de WOHL, "bien (tempéré)".
  Trois autres totaux sont des multiples de 53, 159-106-159 (les deux derniers dans le second livre), ainsi 3 diptyques totalisent 3 fois 53 mesures, et 3 autres 3+5 fois 53...
  L'ordre des tonalités concernées ne semble pas indifférent, Cis (159), E (53), g (53), H (53), D (106), Fis (159). Chaque étape représente la tierce de la précédente, la quinte de l'antéprécédente.

  Il peut cependant sembler regrettable d'avoir au départ deux tierces mineures successives, ce qui conduit à une quinte diminuée entre cis et g (do# et sol), le diabolus in musica, considéré jadis comme une suprême disharmonie.
  La succession suivante est parfaite, 3 tonalités majeures, une tierce mineure de H à D, une majeure de D à Fis, donc une quinte de H à Fis. Ces 3 notes si-ré-fa# forment l'accord de si mineur, la tonalité préférée de Bach.
  Comme vu plus haut, les deux derniers diptyques du WTC1, en Si majeur et si mineur, totalisent 53 et 123 mesures, valeurs de WOHL et TEMPERIRTE, et il peut apparaître significatif d'avoir ce 53 suivi dans le second livre de diptyques de 106 et 159 mesures, 2 et 3 fois 53. (1-2-3) fois 53.
  Bien, très bien, très très bien tempéré...
  Autre approche: les deux dernières fugues en si mineur (chacune avec un thème de 21 notes) achevant chaque livre totalisent
76 + 100 = 176 mesures, encore WOHLTEMPERIRTE,
encadrant les 66 mesures (CLAVIER) du Prélude P2-24. Je signale que c'est un autographe de Bach qui offre 66 mesures, tandis que le manuscrit de 1744 d'Altnikol le donne en 33 mesures. De telles divergences de notation d'une même pièce apparaissent aussi dans l'Art de la fugue, d'où il serait tentant d'en déduire que Bach se préoccupait peu des nombres de mesures...

  Une bizarrerie est qu'à chaque tonalité où le nombre de mesures est un multiple de 53 correspond dans l'autre livre un diptyque dont l'un des nombres est 35, et ceci va plus loin, car aux 424 (8 fois 53) mesures correspondent
PF1-3 en Cis (159) > PF2-3 (50+35=85);
PF2-5 en D (106) > PF1-5 (35+27=62);
PF1-13 en Fis (159) > PF2-13 (30+35=65);
la somme de ces 3 diptyques en vis-à-vis étant
85+62+65 = 212, soit 4 fois 53, moitié de 424. Ou encore,
les 12 pièces de ces 6 diptyques ont pour nombre moyen de mesures 53.

  Il peut venir la curiosité de regarder ce qui se passe pour les deux autres diptyques avec un 35, en C et As, et les 8 pièces des deux tonalités totalisent 385 mesures, 11 fois 35, un nombre à éventuellement mettre en parallèle avec les 583 mesures, 11 fois 53, des 6 diptyques dont les nombres de mesures sont 53 ou un multiple de 53.

   Ceci peut aider à prendre conscience que les 176 notes des thèmes Bach dans les deux livres, réparties selon le rapport 5/3, donnent pour moyenne par livre 88, 53+35. C'est aussi 55+33, et j'ai parlé ici de la fugue pour orgue BWV 544 en 88 mesures, avec 33 mesures sans pédalier.
  Je rappelle que 176 est la valeur de WOHLTEMPERIRTE (WOHL tout seul 53), et il est maintenant loisible de remarquer que la valeur du titre complet, 265, se factorise en 5 fois 53.
  Le nombre de mesures exécutées du premier livre est 2088 mesures écrites plus les 47 mesures de reprises du dernier Prélude, soit 2135, 61 fois 35.

  Il y a moyen d'aller plus loin encore, avec les valeurs des 3 mots du titre, 23-176-66.
  Si 35 peut signifier 3/5, la sixte, et une corde de longueur 3/5 vibre 5/3 fois plus vite qu'une corde de longueur 1, 23 peut alors signifier 2/3, la quinte. D'après ce que j'ai compris de la théorie des tempéraments, une différence existe entre le cycle de 12 quintes justes et l'octave parfaite, et l'accordage d'un instrument se fait en répartissant cette différence entre quintes justes et quintes tempérées, le nombre et l'emplacement des quintes tempérées déterminant le tempérament. Selon le tempérament égal, toutes les quintes sont tempérées. J'imagine qu'une bonne solution pourrait être de couper la poire en deux et d'avoir 6 quintes justes et 6 tempérées, 6-6, ou 66=CLAVIER...
...mais ce n'est évidemment pas aussi simple.

  J'ai tenté de dénombrer les notes de tous les thèmes du WTC, et ceci m'a conduit du premier jet à 396 notes pour le premier livre et 462 pour le second, soit 6 et 7 fois 66...
...mais ce résultat mirifique se doit d'être tempéré par quelques bémols. Si la fugue canonique a des règles claires, Bach y déroge parfois, et certains thèmes varient au cours de la fugue, parfois même au cours de l'exposition, et plusieurs cas sont litigieux dans le WTC.
  Le plus dérangeant est celui du thème de F2-20, en la mineur qui fait donc partie des fugues Bach, et le remettre en cause détruirait une bonne partie de ce qui précède.
  Wikipédia lui donne bien 12 notes,
 

s'achevant sur un mi, quinte de la, mais signale que c'est le seul du livre II qui module à la dominante, et que le thème ne revient jamais ensuite sous cette forme passée l'exposition. La forme rythmique est bien présente dans les deux autres énoncés de l'exposition, mais les hauteurs des notes varient... Bref seul Bach pourrait dire quelle était son intention exacte.

  Pour info, voici les notes thématiques que j'ai recensées dans les deux livres:
I: 14-20-17-5-13-12-24-13-14-26-15-11-16-18-21-11?-7-15-10-31-38-10-14-21
II: 21-9-6-22-9-24-20-13-6-42-18-21-23-15-36-18-20-25-19-12?-24-27-12?-21
  Les ? marquent 3 thèmes litigieux, et il peut y avoir d'autres problèmes, comme la comptabilisation ou non des deux autres thèmes de la triple fugue F2-14. Ces thèmes ont 8 et 22 notes, ce qui peut faire penser aux 8 fois 22 notes des 8 thèmes Bach (si F2-20 a bien 12 notes).

  Ceci peut encore faire penser à un écrit biblique propre à attirer le croyant comme l'amateur de nombres, et il est au moins acquis que Bach était l'un comme l'autre.
  Le psaume 119 (118 chez les luthériens) est composé de 176 vers répartis en 22 strophes de 8 vers. C'est un psaume "alphabétique"; il y en a d'autres dans le psautier, en 22 vers débutant chacun par une des 22 lettres de l'alphabet hébreu, mais dans celui-ci ce sont les 8 vers de chaque strophe qui débutent par la même lettre.
  22 strophes de 8 vers débutant par la même lettres;
  8 thèmes B-a-c-h-B-a-c-h de moyenne 22 notes.
  Je rappelle que le recueil Alphabets de Perec est constitué de 16 séries de 11 poèmes, encore un 176 lié à l'alphabet.

  Les 24 notes du thème de la Fugue II-21 ont une double particularité, déjà vue il y a longtemps, mais pas encore partagée:
- les noms allemands de ces 24 notes totalisent la valeur 192, 24 fois 8;
- les 24 notes du thème à la quinte totalisent la valeur 96, 24 fois 4, moitié de 192.
  Un thème à la quinte est souvent la transposition exacte du thème à la dominante, mais il y a ici deux variantes, aux notes 3 et 5, tiens, 3-5 à nouveau, notes soulignées ci-dessous:
 

  La 3e note du thème à la quinte est un mi♭, alors que la quinte rigoureuse du la correspondant serait un mi, qui introduirait une dissonance avec la voix medium (mais c'est Bach qui est le maître du jeu, et il aurait certainement pu trouver une combinaison pour harmoniser un mi).
  La 5e note du thème à la quinte est un si♭, alors que la quinte rigoureuse du fa correspondant serait un do. Cette substitution de la quinte (elle-même quinte de la tonique) par la quarte est très fréquente chez Bach.
  Dans la perspective 3-5, la voix medium poursuit après le thème par un motif proche de ses 6 premières notes, en tierces, superposées aux quintes du thème à l'alto.
  Mesure 32 apparaît le second thème à la quinte, cette fois exacte transposition du thème à la dominante, avec un mi et un do aux notes 3-5. Un autre thème à la quinte débute mesure 78, presque identique, mais ses notes 15-16 sont des la♭. Il y a en tout 9 thèmes complets, 3 si♭, 3 fa, 1 sol mineur, 1 mi♭, 1 do mineur (où les ba du thème à la dominante deviennent ch). Le total de la valeur des 9 thèmes et 216 notes est 1485, 9 fois 165.
  Le thème en quinte, en fa, de la mesure 32 est d'abord seul au medium, de même que l'était le thème à la dominante au début de cette fugue de 93 mesures, ce qui introduit un partage immédiat 31-62, 1-2. C'est précisément à la mesure 63, début du troisième tiers, que débute à l'alto le thème en do, quinte de fa.
  Ce thème en do, c=3, est le 8e thème de cette fugue 21, offrant décidément de vertigineuses perspectives (le 1er thème est en B=2).

  Les 24 notes du thème de F2-21 en B suivent immédiatement les 12 notes de celui de F2-20 en a (avec toujours un doute sur ce 12). Or a/B = 1/2, 12/24 = 1/2, et 12 pourrait être le nombre idéal pour signifier un rapport 1/2. Il y a 12 notes, donnant 24 tonalités majeures et mineures, 48 pièces dans le premier livre, et les spécialistes de Bach s'étonnent qu'il ait doublé ce premier livre par un second, près de 20 ans plus tard. Ce n'était pas dans ses habitudes de faire deux fois la même chose.  

  L'étonnant résultat de F2-21 m'a fait calculer pareillement les valeurs des thèmes des autres fugues Bach, à la dominante et à la quinte. Le seul résultat qui me parle est justement pour l'autre fugue en B, F1-21, dont les 38 notes ont respectivement les valeurs 229 et 156. C'est la somme qui peut être significative, 385, nombre rencontré plus haut, 11 fois 35. Cette factorisation 11.35 pourrait amener à factoriser 11.3.5 la valeur moyenne 165 des 9 thèmes de l'autre fugue en B, F2-21.
  Voir le détail de ces thèmes en B sur le Gématron.

  Ce n'est qu'aujourd'hui, après plus de 25 ans d'études bachiennes, qu'il m'est venu, après avoir écrit ce paragraphe mentionnant les 38 notes du thème de F1-21, que les 21 notes du thème de l'ultime fugue F2-24 suivaient la signature rythmique 3/8:
 
 
  Il faut que je l'ajoute à 21-38, GOTT mit BACH, où l'un des points les plus remarquables était l'exposition du thème de 21 notes de F2-1, sur 12 mesures:
– 21+38 notes au medium;
– 38 notes à l'alto;
– 21 notes du thème à la basse.
  Aujourd'hui j'ajoute que les 118 notes de cette exposition pourraient faire allusion au Psaume 118 (tiens les 21 notes en 3/8 ont pour valeur 354, soit 3 fois 118). La signature de cette fugue est 2/4, et le rapport arithmétique se simplifie en 1/2. Ce pourrait ressembler aux 21 et 38 mesures des première et dernière Sinfoniae. Et est-il indifférent que l'ultime fugue 3/8 soit la 24 du second livre?

  Ce 3/8 final peut encore s'appliquer aux deux mots essentiels du titre,
WOHLTEMPERIRTE  CLAVIER = 176  66,
car 66/176 se simplifie en 3/8.
  Ces mots ont 14 et 7 lettres,
et 14/7 se simplifie en 2/1.
  Je rappelle que le premier diptyque du premier livre compte 1283 notes.

  Encore une fois, rien n'atteste que Bach se soit livré à des calculs guématriques, et encore moins quel système il aurait employé, car il en existait de nombreux au 18e. Ce ne me semble pas une raison pour s'abstenir de chercher, car même en partant d'équivalences illusoires, la réflexion sur les nombres bachiens peut conduire à mettre à jour de réelles intentions, ainsi, par exemple, il me semble que les multiples jeux 3-5 rencontrés peuvent constituer une solide approche.
  Le hasard (?) veut que j'achève ce billet à la veille du 3/5, aussi je vais le publier demain.

  Pour info, un autre système guématrique, l'alphabet Schwenter, donne la valeur 177 pour WOHLTEMPERIRTE, et ceci m'avait conduit ici à toute une série d'harmonies.

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