7.6.24

Vérité quand tu nous tiens

à Caleb & Pinhas

  La parution de Norferville a déclenché un torrent de découvertes pouvant unir les 7 romans de Thilliez parus au Fleuve Noir, en-dehors de la saga Sharko.
  Ce n'est pas fini, mais avant de plonger plus avant dans les développements vertigineux que j'entrevois, je vais tenter de préciser le point peut-être le plus net apparu dans mes investigations, l'omniprésence du mot "vérité".

  Je rappelle d'abord que les trois langues historiques bibliques sont l'hébreu de l'Ancien Testament, le grec du Nouveau, et le latin, avec la traduction de la Vulgate qui a été jusqu'au 16e siècle la principale voie d'accès au texte, soumise à l'interprétation du catholicisme romain.

  Le 2e roman de l'heptalogie Thilliez a 64 chapitres, 64 valeur du grec "vérité".
  Le 3e roman a 89 chapitres, 89 valeur du latin "vérité".
  Les 6 derniers romans totalisent 441 chapitres, 441 valeur de l'hébreu "vérité".  La différence entre 441 et 64 est 377, valeur de l'hébreu "sept", or le roman ouvrant l'heptalogie est Vertige, en 7 lettres. Le mot contient les 6 lettres "vérité", la lettre en sus G étant la 7e de l'alphabet.  Vertige est un huis-clos se passant dans un gouffre que le narrateur baptise Vérité.

  J'ignore tout des connaissances de Franck en grec, latin, ou hébreu, et ne présume aucunement de ses intentions. Ce dont je suis sûr est que ce schéma offre une si remarquable cohérence qu'il serait dommage de la taire.
  Il est certain également que Franck cache des jeux tortueux dans son écriture, ainsi le dénouement de Vertige repose sur un détail si infime qu'il a échappé à la plupart des lecteurs, et que Franck a dû préciser quelle était la seule solution du roman (à ses yeux).

  Mon approfondissement débute par la dernière trouvaille, les 89 chapitres de Rêver correspondent à la valeur de la vérité latine, VERITAS=89 selon l'alphabet latin.
  Il se trouve qu'une des énigmes du roman est une série de 28 lettres tatouées par un psychopathe sur le corps d'une de ses victimes, Victor (un mot latin, "vainqueur"). L'enquêtrice Abigaël parvient à trouver sa signification par une anagramme latine:
« Puella sine ore vobis salutem dat »
« La petite fille sans visage vous salue. »
  Au passage, le roman est si compliqué que, malgré plusieurs lectures, je ne me rappelle ni pourquoi le psycho a choisi cette phrase, ni comment Abi a résolu l'anagramme.
 
  Le mot "vérité" est au premier plan de l'intrigue, dont la formidable intrication est liée à la double vie du père d'Abi, le gendarme retraité Yves Durnan.
  Il était passionné par la BD XIII, dont il avait la collection complète.
  Une photo dépassait de l’une des bandes dessinées intitulée L’Appât. Sur le cliché servant de marque-page, on voyait un poisson-lune couvert d’épines, photographié en gros plan. Elle retourna le cliché. Il était écrit, au feutre noir et en diagonale :
  J’espère que tu trouveras la vérité, autant que je souhaite que tu n’y arrives jamais…
  Cette phrase revient 7 fois dans le roman, in extenso ou tronquée.

  J'ai déjà indiqué que le prénom Abigaël signifie "mon père est joie", ironiquement car son père est la cause involontaire de l'énigmatique drame qui la frappe.
  Le diminutif Abi est souvent employé, or en hébreu ABY, אבי, "mon père", a pour valeur 13. Son père avait une double vie sous l'identité Xavier Illinois, afin d'avoir une signature ressemblant au XIII de son héros.

  Incidemment, je me demandais dans le précédent billet si le prix 24€ de l'essai 888 était lié à son titre, or presque chaque album de la série XIII est vendu 13€.
  Tiens, L'appât où figurait le marque-page "vérité" est le 21e album, 21 et 13 termes de la série de Fibonacci parmi ces 89 chapitres, autre terme. Si ce n'est pas le cas ici, un des rares usages actuels des chiffres romains est la numérotation des chapitres, et Rêver aurait pu s'achever sur un chapitre LXXXIX.
  L'appât contient les lettres PAPA, et c'est ainsi qu'Abi nomme son père, PAPA = 34, Fibo suivant 13 et 21.

  Le marque-page "vérité" est la première énigme d'une chaîne qui peut rappeler celle de La poussière de soleils de Roussel. J'avais vu une étonnante possible allusion à Roussel dans Deuils de miel. Au passage, il me vient qu'une des énigmes de Roussel est "125", ce qui me fait penser au Bourreau 125 de La forêt des ombres.

  La dernière énigme conduit Abi à une valise munie d'un cadenas à quatre molettes de vingt-six lettres chacune. La combinaison X-I-I-I fonctionne immédiatement.
  Précédemment, Abi avait rêvé de la petite fille sans visage:
Sur ses jambes, une bande dessinée : XIII. Et pas de visage. Juste une surface lisse, rosée, qui semblait molle.
  La gamine lui donna un papier sur lequel était inscrit un code : 10-15-19-8.
  Dans le roman, le code conduit à s'intéresser à J-O-S-H, Josh Heyman, auteur d'un polar offrant d'étranges résonances avec l'affaire en cours. En-dehors du roman, ce code permettait aux lecteurs d'accéder au chapitre manquant, sur le site de l'éditeur.
  J'avais vu à l'époque que la somme des 4 nombres était 52, 4 fois XIII, mais j'ai découvert récemment que le prénom de Caleb Trask dans A l'est d'Eden y est associé à Caleb et Josué, seuls hommes de la génération du désert à avoir pu entrer en Terre promise.
  Josh est un diminutif de Joshuah, autre translittération de Josué, aussi un cousinage (sinon un jumelage) devient envisageable entre les polardeux Josh Heyman et Caleb Traskman.
  Je mentionnais ici, en 2014, l'exégèse juive selon laquelle les deux espions envoyés à Jéricho par Josué étaient Caleb et Pinhas, parfaite quaternité-quintessence car Pinhas = 208 = 4 fois 52, valeur de Caleb (en hébreu). J'observais aussi que 52 c'est 4 fois 13, valeur de l'hébreu ehad, "un". Aussi je trouve extrêmement curieux de trouver en 2016 dans Rêver un jeu 13-52 basé sur Josué, Josh Heyman préfigurant la trilogie Caleb Traskman, dont le vrai nom est Christian Lavache (LAVACHE=52).
 
  Cela m'a quelque peu éloigné du thème choisi, "vérité". J'y reviens avec Puzzle, et ses 64 chapitres pouvant évoquer le grec αληθεια. S'il y a des énigmes latines dans Rêver, le grec intervient-il dans Puzzle?
  Je n'ai aucune envie de relire attentivement le livre, et la seule occurrence que me donne le texte numérisé est lorsqu'un des concurrents de la chasse au trésor remarque que Hadès, l'organisateur du jeu, était dans la mythologie grecque le maître des Enfers. Son nom complet est Virgile Hadès, allusion à Virgile guide de Dante aux Enfers dans La Divine comédie.
  Le texte numérisé livre 42 occurrences du mot "vérité", dont, remarquablement, 9 dans le seul dernier chapitre 64, valeur du grec αληθεια, en 7 lettres avec pour lettre centrale θ, le chiffre 9 de l'alphabet numéral grec.
  Ces 42 occurrences ont un hallucinant écho, si fou que je ressens le besoin de redonner mon avis sur les coïncidences de lettres et de nombres. Que GUERISON soit l'anagramme de SOIGNEUR, par exemple, est remarquable, mais ne peut évidemment signifier que tout "soigneur" apporte la "guérison".
  Il en va de même pour la gématrie. Ce n'est pas parce que DIEU = 39 = CHIEN qu'il faut vénérer tout "chien" (ou tout DOG = GOD).
  Mais il y a des créateurs qui, les prenant au sérieux ou non, utilisent ces jeux dans leurs créations, et il peut être important de creuser ces pistes, notamment pour des auteurs comme Thilliez qui ne se cachent pas d'utiliser ces jeux.
  Si les découvertes dans cette voie dépassent les intentions de l'auteur, ça signifie toujours quelque chose, l'approche la plus simpliste étant de décréter que ce sont d'ironiques hasards. Jusqu'où le hasard peut-il aller? Ce cas m'intéresse particulièrement puisqu'il concerne la "vérité", et que l'auteur concerné pourrait témoigner de ses intentions.

  Ceci dit, j'en viens à Anne Machet, auteure de deux livres publiées par les Presses Universitaires de Lyon, ce qui pourrait être un gage de sérieux, mais elle prétend trouver une sagesse numérique cachée dans les mots de la Bible grecque, la Septante traduction de la Bible hébraïque, et le Nouveau Testament, dont les livres sont connus par leur version grecque, mais les Evangiles sont très probablement des traductions d'originaux en araméen, en tout cas il n'est guère envisageable que Jésus, au cas où il eût existé, se fût exprimé en grec.
  Ainsi, en ce qui concerne les relations trouvées dans la Septante, elle ne s'interroge jamais sur ce qu'était l'original hébraïque, la traduction grecque étant souvent immédiate. Je comptais étudier un cas concernant Jacob où interviennent les nombres 377 et 64 (pour αληθεια, "vérité").

  Ce sera pour plus tard. J'ai téléchargé son troisième livre, qui n'a pas de version papier et qu'elle offre gratis au public via l'éditeur 999, Les nombres incognito.
  Il faut d'abord dire qu'elle distingue deux valeurs aux mots grecs, N correspondant à la somme des valeurs des lettres-chiffres dans l'alphabet numéral de 27 lettres-chiffres, et n, somme des rangs des lettres dans l'alphabet final de 24 lettres. Elle ne se limite pas à N et n, et considère aussi N+n et N-n, ce qui augmente quelque peu les possibilités de coïncidences.
  Je ne choisis pas par hasard ce paragraphe, concernant le verset 50 du psaume 89 (Veritas!), mais ce n'est qu'un minuscule échantillon des calculs d'Anne, couvrant 200 pages...

  Voici le verset
50 ποῦ ἐστι τὰ ἐλέη σου τὰ ἀρχαῖα, Κύριε, ἃ ὤμοσας τῷ Δαυΐδ ἐν τῇ ἀληθείᾳ σου;
Où sont, Seigneur! tes bontés premières, Que tu juras à David dans ta fidélité? (traduction Segond)
dont elle n'analyse que quelques mots ou syntagmes dans ce paragraphe, tel quel:
Où sont tes tendresses d’antan ? Ps 89.50

  Où ? Ps 89.50 που (+) 550+51=601 tes tendresses d’antan Ps 89.50 τα ελεη σου τα αρχαια (-) 281+20+617+281+(713-51)=1861 promises à David Ps 89.50 τω Δαυιδ (+) 1143+457=1600 // Vérité ! Ps 89.50 αληθεια (=) 64+42=106.
  Ici (+) signifie N+n, (-) N-n, et Anne s'est manifestement trompée dans la dernière indication, (=), qu'il faut évidemment lire (+). Je ne cherche pas à comprendre pourquoi certains nombres sont en italiques, pourquoi certains N+n ou N-n sont détaillés. Il semble qu'Anne ait voulu mettre l'accent sur les nombres 601 et 106 de et Vérité, les mêmes chiffres se retrouvant dans le 1600 de à David, mais je ne vois pas le rapport avec 1861.

  Quoi qu'il en soit, il est exact que le code ordinal, utilisé par d'autres exégètes, donne 42 pour αληθεια (1+11+7+8+5+9+1), nombre d'occurrences de "vérité" dans Puzzle.
  Anne est sans doute la seule à avoir additionné N et n, soit 64+42 = 106, or
PUZZLE = 106 = ZZL + PUE = 64 + 42.

  En 64 chapitres, avec 42 occurrences de "vérité". Fascinant. Crois-je que c'est intentionnel? Non, mais qu'importe mon avis, la réponse appartient à Franck, et j'ai montré ailleurs qu'il connaissait au moins un livre extrêmement zarbi, Codex Biogenesis de JC Pérez (ce qui a conduit Pérez à accuser Franck de plagiat sur FaceBook).

  Quoi qu'il en soit, ceci conduit à s'interroger sur les occurrences de "vérité" dans l'heptalogie. Revoici un tableau déjà donné ici, mais avec cette fois les nombres d'occurrences de "vérité" dans chaque roman, à la place des nombres de mots des titres:

VER   49    42*     7      86    336   Vertige
PUZ   64    42      6    106    432    Puzzle
REV   89    30      5      68    600    Rêver
LEM   81    25    19    202    528    Le manuscrit inachevé
ILE    84     29*   15    179    528    Il était deux fois
LAB   55     31    11    133    384    Labyrinthes
NOR  68     10*   11    136    456    Norferville

  Le compte est douteux dans 3 cas, je m'en explique:
- Dans Vertige, 11 occurrences de "vérité" sont le nom propre Vérité, je ne les ai pas distinguées des autres.
- Dans Norferville, la note finale de l'auteur contient aussi le mot "vérité", je ne l'ai pas comptabilisé.
- Si le compteur livre bien 29 occurrences pour la numérisation de Il était deux fois, le document contient aussi, sous forme image, les 15 pages manuscrites de la prétendue "vraie fin" du Manuscrit inachevé, celle écrite par Caleb Traskman, alors que la première était dite rédigée par son fils Jean-Luc. Or il y a 2 occurrences de "vérité" dans ces pages:

 

  Au passage, on reconnaît l'écriture de Franck, et repère l'oubli d'un accent sur le premier "vérité". Thilliez indique d'ailleurs dans sa présentation qu'il peut y avoir des erreurs dans ce texte non corrigé.
  Faut-il comptabiliser ces 2 "vérité"? Je n'avais pas compté dans mes calculs cette annexe, donnée à l'envers dans les éditions imprimées du roman. Les accepter conduit à 87 "vérité" pour la trilogie Traskman, or 87 est la valeur de l'anglais TRUTH, "vérité".

  Mon étude m'a fait examiner toutes les occurrences de "vérité", et découvrir ainsi que parmi les 211 occurrences, une seule était le pluriel "vérités", à savoir la 7e des 10 occurrences de Norferville, chapitre 58:
Les habitants étaient réunis sur leurs perrons, discutant entre eux par groupes, propageant vérités et rumeurs.
  Ceci peut inviter à considérer la répartition des 10 occurrences, et former le motif 6-1-3, immédiatement significatif dans le monde juif, avec les 613 mitswot de la Tora. Ceci a notamment inspiré un polar de Tobie Nathan, un auteur dont l'oeuvre a attiré mon attention, et un échange avec lui m'a confirmé la pertinence de mes interprétations. Le nombre de chapitres de ses romans est notamment significatif (voir ici).

  Une étude du corpus thilliézien m'a montré qu'il semblait y avoir moins de "vérité" dans la saga Sharko, par exemple 8 dans La faille (dont un pluriel, avec "quatre vérités") et seulement 4 dans Atomka.

  Ne pas considérer le pluriel de Norferville peut conduire à 210 "vérité" dans les 7 romans, 7 fois 30, alors que les chapitres totalisent 490, 7 fois 70, les gématries des titres 910, 7 fois 130.
 
  Tiens, l'expression In vino veritas a un équivalent en hébreu, l'égalité entre la valeur 70 des mots yayin, "vin", et sod, "secret". Ceci est à l'origine d'un adage talmudique:
"Quand le vin (Yayin) entre, le secret (sod) sort" (Erouvim 65a).
נִכְנַס יַיִן יָצָא סוֹד
Translittération : nixnas yayin yatsa sod.
Traduction : In vino veritas (“ Dans le vin,  la vérité”).
Gimetria : Le mot “vin” (יַיִן, yayin) = 70, de même que le mot
                 sod ” (סוֹד, secret).
Note du 11/7: il m'est venu que dans notre alphabet
SECRET = 70 également.


  70 est le diviseur commun de 210, 490, 910: 3, 7, 13 fois 70. Il y a au moins une autre façon de parvenir au total de 210 "vérité", c'est de ne pas tenir compte du "verité" fautif du manuscrit "de Caleb", et ceci pourrait ravir l'amateur de quaternité-quintessence, en considérant que ce "verité"apparaît à la fin de Il était deux fois.
  Avant lui, il y a 42+42+30+25+29 = 168 "vérité", 4 fois 42.
  Après lui, 1+31+10 = 42 "vérité(s)", 42 qui, je le rappelle, est la valeur "n" de αληθεια.

  Ceci met en évidence qu'il y a 84 "vérité" dans les romans VER-LEM-ILE, dont j'ai souligné les multiples points communs. Une de mes relatives certitudes est l'importance des nombres 52-84 dans LEM-ILE, le point le plus immédiat étant l'acrostiche donné par les 84 chapitres de ILE.

  Ceci m'a encore conduit à examiner de près les "erreurs" du manuscrit "de Caleb", qui sont de plusieurs types.
  Il y a des incertitudes de l'auteur, dument signalées.
  Plusieurs cas de petits mots oubliés, j'en ai compté 5, l', de, leur, une, sa.
  Enfin des fautes d'orthographe, encore faudrait-il être sûr qu'elles soient volontaires, car les premiers tirages de plusieurs Thilliez présentaient des fautes parfois grossières (par exemple page 15 de Norferville, "identitée protégée", erreur aussi présente dans l'e-book).
  Bref, je relève
-
pourchaissait, donné plus haut avec
- verité, page 482;
- suffisament, page 488;
- quatre ou cinq whisky, page 489 (il existe deux pluriels, whiskys étant préconisé);
- asséna, page 493, qui ferait pendant avec verité, mais qui connaît toutes les subtilités de la conjugaison d'assener?

  Enfin je relève page 491
 

  Ce n'est pas une faute dans l'absolu, mais il me semble que tout correcteur proposerait "s'amenuiser".
  Les lettres impliquées dans les erreurs, y compris ce cas, sont donc e-i-m-r-s, et je suis tenté d'y lire

rémi s.

signant ainsi ce billet.


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